Adulé par les uns, honnis par les autres, Michel Onfray laisse rarement indifférent après s’être exprimé. Selon le thème abordé, les prises de position du philosophe seront toujours clivantes selon le point de vue de chacun. Et pourtant, s’il y a un thème où il pourrait apporter une réflexion qui pourrait faire consensus, c’est lorsqu’il parle de La Réunion et de l’insularité en général.
« J’adore cette île pour plusieurs raisons. Je trouve que c’est un modèle social, sociologique. D’abord, il y a la douceur, le calme », explique-t-il avant de s’épancher un peu plus sur la construction identitaire de l’île. « Les gens sont tous arrivés et ont fabriqué une communauté qui a l’air réussie. Tout le monde a l’air de bien s’entendre. Et ça, c’est assez réjouissant !«
L’autre axe fort qui nourrit sa vision de La Réunion, c’est comment l’identité créole s’inscrit dans son concept de « génie insulaire.C’est tout le génie identitaire aussi. Dès que vous allez au Japon, en Corse, en Martinique ou en Guadeloupe, la question qui se pose est : qui sommes-nous ? Et je trouve bien que l’on puisse s’intéresser à la question de son identité. D’abord de la définir, puis de la préserver.«
« Les livres m’ont sauvé«
Mais si Michel Onfray est de retour au salon du livre Athéna, c’est avec une idée bien en tête. L’auteur a insisté auprès des organisateurs pour aller à la rencontre des élèves, notamment ceux de l’IUT. « C’est un plaisir que j’ai toujours gardé : celui de la transmission. J’étais un fils de pauvres. La culture m’a sauvé. Les livres m’ont sauvé. J’essaye de rendre ce que j’ai reçu. Je suis un peu là par dette, mais j’aimerais bien pouvoir rembourser mes dettes toute ma vie.«
Michel Onfray espère pouvoir faire découvrir à quel point ouvrir un livre peut changer une vie. Déjà par son expérience personnelle, lorsque les mots d’Ernest Hemingway lui ont permis de surmonter la dureté de son passage à l’orphelinat.
Le philosophe veut également faire comprendre aux plus jeunes la nécessité de la lecture pour construire son esprit, d’une manière aussi simple qu’essentielle. « On fabrique un cerveau avec le livre. On commence en haut à gauche, on continue à droite, on descend, on tourne les pages. Avec le livre et les pages qui tournent, on voit dans l’espace le temps. Le déploiement du temps est visible dans l’espace. Et c’est une leçon !«
Selon lui, cette construction du cerveau par la lecture s’oppose à ce que le monde numérique peut créer. « Vous pouvez installer quelqu’un dans l’histoire avec un livre. Chronologiquement, vous pouvez lui apprendre à pouvoir s’inscrire dans la durée. Aujourd’hui, on ne fabrique plus ce genre de cerveau. On va sur un site internet, qui nous renvoie sur un autre site, qui lui-même nous renvoie sur un autre site. À un moment, vous êtes quelque part en vous demandant d’où vous êtes partis. Vous n’avez pas de chronologie et vous êtes presque dans un éternel présent. C’est problématique !«
C’est pour cela que Michel Onfray estime que « si les enfants ne vont plus vers le livre, c’est au livre d’aller vers les enfants », car ceux qui seront convaincus découvriront que « le plus bel endroit du monde, c’est une bibliothèque ou une librairie.«