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Petite-Ile au bord du précipice, selon son maire

"Tous les voyants sont au rouge. Je n’ai plus de marge de manœuvre". Serge Hoareau prépare les esprits aux conséquences d’une défaillance de l’Etat et de la Civis.

Ecrit par – le jeudi 16 juillet 2015 à 15H25

« Il faut sauver le soldat Petite-Ile ». La formule imagée de Serge Hoareau résume le casse-tête auquel se retrouve confronté le maire de la commune rurale du sud. Tous les scénarios envisagés ramènent inexorablement la commune à opérer une cure drastique dans les mois à venir. Quitte à « déclarer l’année 2016 comme étant une année blanche, sans manifestation ni investissement », en vient même à envisager le maire.
 
Il y a un mois, Serge Hoareau a appris de la Civis que 720.000 euros allaient manquer à l’appel lors du vote de la prochaine dotation de solidarité communale (DSC). Une amputation sévère couplée à la baisse des dotations de l’Etat (280.000 euros) qui envoie la commune dans le mur, comme tant d’autres sur le territoire national.
 
« Sans la DSC, on ne passe pas ! »

« Les comptes de la commune flirtaient déjà avec la zone rouge depuis des années ». Mais « l’effet ciseau » a lieu dès cet exercice 2015 pour ne faire que s’amplifier à l’horizon 2017. Le différentiel recettes/dépenses de fonctionnement explose avec la défaillance des partenaires financiers. « Sans la DSC, on ne passe pas ! », prévient-il.
 
Après une embellie anecdotique de +14.000 euros d’épargne nette en 2014, « une goutte d’eau dans un verre vide », Petite-Ile s’apprête à décrocher lors de cet exercice en cours de l’ordre de -420.000 euros. Si les projections pessimistes se confirment, ce différentiel s’aggravera encore en 2016 et 2017 (1,7 million d’euros à chaque exercice budgétaire).  
 
« Nous ne parlons là que des décisions réglementaires prises » (Etat/Civis, ndlr), poursuit Serge Hoareau. Son prédécesseur endosse aussi une part de responsabilité, indique le maire et conseiller départemental. « Ces choix (de 2010,11,12), nous sommes en train de les payer cash ». Serge Hoareau pointe du doigt notamment l’embauche de 33 CDD qu’il « compte ne pas renouveler » lorsque leur terme arrivera. Une économie non négligeable lorsque l’on a en tête l’une des lignes budgétaires de la commune : les 15 millions des dépenses réelles de fonctionnement sont constitués de pas moins de 10,5 millions rien qu’en charges de personnel.

« Aujourd’hui je ne sais plus comment faire »
 
Après le constat, les perspectives. Serge Hoareau est clair : hormis les CDD évoqués plus haut, « il sera difficile de toucher au personnel » dont l’évolution de carrière est telle qu’elle est, c’est-à-dire intouchable statutairement.
 
A la rentrée scolaire 2015, chaque repas consommé sera facturé 1,60 € au lieu d’1,30 €. L’école de musique verra ses tarifs passer de 240 euros à 550 euros annuels. Voilà pour les décisions déjà engagées.
 
D’autres pistes sont envisagées. Toutes douloureuses pour le contribuable à commencer par le premier levier, celui des trois taxes historiques. Le retour à l’équilibre passera aussi par la réduction des subventions versées aux associations, le non renouvellement des départs à la retraite, la révision du mode de gestion (en régie ou en DSP) de certaines prestations, voire la suppression de services facultatifs.

« Si nous étions une entreprise privée, nous serions mis en liquidation »

La rentrée supplémentaire de recettes pourrait s’articuler autour de l’augmentation des tarifs des services à la population, la revalorisation de l’occupation du domaine public ou encore la chasse aux fraudeurs (lire par ailleurs – article à venir). Mais l’apport de recettes nouvelles est à envisager avec prudence. Un exemple : rien n’empêche des parents de désinscrire leur marmaille de l’école de musique avec sa nouvelle grille tarifaire à la hausse.
 
Cette annonce en période de trêve a pour but d’alerter les partenaires de la commune. « Si nous étions une entreprise privée, nous serions mis en liquidation », sensibilise le maire qui dit ne pas entendre d’autres communes élever la voix. Seul le Département a parlé du non transfert financier mais « quelle action derrière ? » demande le maire. « Moi aujourd’hui je ne sais plus comment faire. Je tiens à alerter l’opinion publique. »
 
Serge Hoareau assure avoir adressé au président de la Civis un courrier dans lequel il demande à l’intercommunalité à ce que la baisse de la DSC soit lissée dans le temps. Toutes les communes membres sont touchées mais à des degrés divers. « Cilaos pleure, les Avirons pleure aussi, l’Etang-Salé peut absorber le choc, Saint-Pierre aussi ».
 
Ce jeudi après-midi, le maire rencontre son personnel communal pour tenir le même discours et préparer là aussi au discours de rigueur.

 

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