Communiqué
J’ai rencontré ce jour les conseillères parlementaires de Madame Sarah El Haïry, Ministre déléguée auprès de la ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités, de la ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse et du garde des Sceaux, ministre de la Justice, chargée de l’Enfance, de la Jeunesse et des Familles.
Ce rendez-vous fait suite aux échanges que j’ai eu avec la Fédération Nationale des Assistants Familiaux de la Protection de l’Enfance (FNAF/PE) qui m’ont fait part des défaillances de l’Aide Sociale à l’Enfance aussi bien sur le territoire hexagonal que dans nos péiy dits d’Outre-mer.
J’ai sollicité ce rendez-vous après avoir fait le constat d’une Aide Sociale à l’Enfance (ASE) défaillante à La Réunion à plusieurs égards. Un chiffre m’a particulièrement marqué : celui de la hausse de la prise en charge des enfants qui est passée de 2500 en 2023 à 2612 en 2023. De cette situation, les conséquences n’en sont que délétères avec une saturation de l’ASE pour pouvoir accueillir ces enfants. Aujourd’hui, à La Réunion on ne compte que 2,4 places pour 1000 jeunes et les départs à la retraite des assistants familiaux se multiplient sans remplacement automatique. Même pour les nouveaux arrivants dans la profession, certain.es rendent leurs agréments en à peine deux ans par manque de reconnaissance et de soutien. Devenir assistant familial n’est aujourd’hui pas un parcours évident puisqu’il ne fait pas l’objet d’une filière prédéterminée, ce choix de parcours ne se fait alors qu’à partir de 35/40 ans mais aucune évolution ni reconnaissance de l’expérience n’est envisagée.
Lors de mon rendez-vous, j’ai tenu à soulever plusieurs sujets qui me paraissent d’une importance cruciale. Si on ne peut que déplorer la désaffection du métier et sa perte d’attractivité, j’ai demandé à ce que soit revue l’indemnité d’entretien qui est disparate en fonction des départements. Comment peut-on expliquer que pour couvrir les besoins des enfants, certaines assistantes familiales ne perçoivent que 14 euros quand d’autres perçoivent jusqu’à 36 euros ? Il n’est pas acceptable de constater de telles différences de traitement alors que les assistants familiaux exercent tous le même métier et ses difficultés corrélatives mais doivent composer avec des indemnités insuffisantes. La FNAF/PE considère qu’il faudrait à minima une indemnité de 25 euros pour pouvoir assumer dignement les coûts qui sont les leurs (nourriture, déplacements, soins).
Si la bonne prise en charge des enfants n’est pas qu’une question économique, leur bien-être médical est aussi une priorité. 30 % à 34% d’enfants des enfants placés sont en situation de handicap. Pourtant, le manque d’infrastructures, de suivi médical régulier en raison de déserts médicaux et de manque de budget reste consternant. Une meilleure prise en charge médicale et thérapeutique des enfants placés doit être une priorité de ce gouvernement.
En août 2022, la loi Taquet a été actée et promettait des améliorations pour la protection de l’enfance. Force est de constater qu’au-delà de son application partielle sinon existante par les départements, la maltraitance institutionnelle des assistants familiaux est une réalité à déplorer. Dévoués aux enfants, leur droit au répit n’est pas garanti et se fait encore à la libre appréciation des départements. C’est un métier qui leur demande une implication quotidienne et pourtant rien n’est fait pour leur garantir une déconnexion du travail. Les enfants qu’ils ont sous leur responsabilité deviennent des membres à part entière de leur famille et ils doivent trop souvent assumer, à titre personnel, la charge de l’enfant majeur par manque et refus de suivi des départements. C’est un taux effarant d’anciens enfants placés à l’ASE qui deviendront ensuite des personnes sans-abris par faute de suivi ou encore de soutien à l’insertion dans la vie professionnelle.
Les assistants familiaux connaissent une hausse des informations préoccupantes à leur égard engendrant des semaines voire des mois de procédure administrative qui viennent secouer la prise en charge de l’enfant avec des séquelles impansables sur le plan psychologique.
Il devient ainsi urgent de :
– Repenser les disparités territoriales au regard des indemnités d’entretien
– Mieux financer les soins et suivis médicaux des enfants
– Envisager un meilleur fonctionnement des institutions pour que la prise en charge des enfants soit facilitée et que le travail des assistants familiaux soit simplifié
– Réfléchir à une meilleure attractivité du métier qui passe par la revalorisation salariale mais aussi une meilleure prise en considération des besoins des enfants et des assistants familiaux.
L’accueil familial est le meilleur accompagnement qui peut être donné aux enfants placés mais il faut investir pour que cette solution devienne la norme.
– Prendre en considération les besoins des assistants familiaux notamment au regard de leur droit de répit et de la maltraitance institutionnelle qu’ils subissent en raison des dysfonctionnements fréquemment remontés aux départements sans que solution ne leur soit trouvée.
– Repenser l’accès à la culture des enfants grâce notamment au développement de « l’artthérapie » ; c’est-à-dire aussi bien permettre aux enfants d’exprimer leur créativité par le truchement de l’art que leur donner l’accès aux lieux culturels.
Il est de la responsabilité de l’État de faire face aux défaillances du système pour que demain « l’enfant de personne » soit l’enfant de quelqu’un.
Ayant longtemps travaillé dans le secteur social, il est impératif que l’État soit au rendez-vous des exigences de la société et des besoins des enfants placés à l’ASE. Les enfants d’aujourd’hui sont les piliers de demain, nous leur devons la plus haute considération et cela passera par une meilleure coordination entre chaque acteur.