C’est avec une profonde émotion que les écologistes ont appris le décès, ce lundi, d’Harry Gruchet. Outre son rôle éminent en tant que Conservateur du Museum d’Histoire Naturelle et ses recherches, notamment sur les milieux aquatiques terrestres, Harry Gruchet fut l’initiateur du militantisme écologique en créant, il y a quarante ans, avec ses amis Thérésien Cadet, Auguste de Villèle, Christian de Villèle, Yves Gomy et Paul Nougier, la SREPN (Société Réunionnaise de Protection et d’Etude de la Nature) qui deviendra, sous la présidence de Bernadette Ardon, la SREPEN (Société Réunionnaise pour l’Etude et la Protection de l’Environnement) afin de répondre à l’éventail de plus en plus large des préoccupations liées à l’impact grandissant de l’homme sur l’espace environnemental.
Harry Gruchet fut le premier à donner l’alarme sur la menace de disparition imminente du tuit-tuit, oiseau qui n’existe qu’à la Réunion et que dans les hauts de Saint Denis et la Possession. Il fut le premier à publier une étude scientifique, avant son ami Anthony Cheke et Marc Attié, dénonçant les méfaits du braconnage et l’absurdité de maintenir à cet endroit un troupeau de cerfs attirant les braconniers et dégradant le biotope. Il fut le premier à dénoncer la politique absurde, fortement teintée de jacobinisme borné, de l’Office National des Forêts de l’époque, qui consistait à transformer les hauts de l’île en pseudo forêt vosgienne avec l’implantation de cryptomeria japonica. Ce militantisme a aboutit en l’an 2000 à la création, par la Ministre Dominique Voynet, de la Réserve de la Roche Ecrite, embryon, avec la réserve de Mare Longue et celle des Grandes Pentes, du futur Parc National de la Réunion.
Modeste, discret, Harry Gruchet n’a jamais recherché les feux des projecteurs, mais il a su faire naître et encourager le militantisme en faveur du patrimoine naturel, notamment par la publication d’infos-nature très recherchées aujourd’hui, ou la publication d’ouvrage comme « Flore en détresse » de Joël Dupont, Jean-Claude Girard et Marcel Guinet.
Pour tout cela, pour la Nature, qu’il soit remercié et sa mémoire honorée. Adieu Harry. Si le paradis existe, tu y es, et nulle doute qu’il ressemble à la forêt primaire dans sa pleine et magnifique intégrité.
Jean-Pierre Espéret
