Six collectivités territoriales de La Réunion « intoxiquées » sont actuellement suivies par la Société de financement local (SFIL) à Paris.
Toutes tentent de se débarrasser des fameux prêts toxiques contractés à la fin des années 2000, avant que la crise financière ne révèle par effet domino le caractère instable de ces placements. Dans les faits, les crédits présentés par la banque privilégiée des collectivités, bénéficiaient d’un taux d’intérêt avantageux mais cachaient des risques de dérapage.
Au 31 mai 2015, six « emprunteurs » – c’est-à-dire six collectivités locales réunionnaises – « disposaient toujours de crédits sensibles chez nous », signale la société qui a remplacé il y a deux ans Dexia, l’ex-banque franco-belge qui finançait les collectivités locales.
Ces prêts à risque indexés le plus souvent sur des parités et des indices complexes, avaient mis en alerte plus de 1.500 communes, conseils régionaux, généraux et intercommunalités à travers la France, hôpitaux publics compris. Ceux de La Réunion n’y ont pas échappé.
Les collectivités locales réunionnaises concernées avaient jusqu’au 30 avril dernier pour entrer, de façon volontaire, dans le dispositif de fonds de soutien lancé par le gouvernement. En contrepartie, les collectivités devaient s’engager à abandonner les poursuites contre les banques…
78 millions d’euros concernés
La SFIL confirme que trois opérations de désensibilisation (opération qui transforme un prêt à risque en prêt simple à taux fixe, ndlr) ont été conclues avec 3 emprunteurs réunionnais. La SFIL se garde de dévoiler le nom des communes ou des collectivités locales concernées. Deux autres emprunteurs à l’époque de Dexia sont quant à eux « totalement sortis du risque que représentent ces produits », indique la direction de la SFIL. Au total, 80% des emprunteurs concernés ont déposé un dossier au fonds de soutien.
Mais Dexia n’était pas la seule banque vers laquelle des collectivités publiques réunionnaises se sont tournées pour contracter des prêts risqués à l’époque.
Selon la Direction des relations avec les collectivités territoriales à la préfecture, au total, ce sont sept collectivités réunionnaises disposant d’emprunts toxiques éligibles au fonds d’aide qui ont déposé une demande dans les délais. Après vérification des conditions de candidature et d’analyse financière de la Direction Régionale des Finances Publiques à Saint-Denis, les dossiers ont été ensuite transmis à Bercy, chargé d’examiner les demandes et d’autoriser les demandes d’aide financière.
La ville du Port limite le dérapage
Au total, le volume financier cumulé par ces collectivités réunionnaises atteint 78 millions d’euros. Mais ce montant total ne représente qu’une infime partie, soit 0,000022 %, de l’encours global des collectivités de La Réunion (1,7 milliard d’euros).
La ville du Port, la plus touchée par l’envolée des taux d’intérêts il y a quatre ans lors de la faillite de Dexia, continue de fournir des efforts pour juguler le dérapage financier. A ce jour, la mairie doit toujours sécuriser 5,7 millions d’euros issus d’un prêt contracté en 2008 et présentant un « risque élevé » selon les tout derniers documents communiqués aux élus.
Ce prêt représente 12% de l’encours total de la dette portoise. 34 autres prêts, cette fois d’une valeur de 42,6 millions d’euros, sont quant à eux identifiés comme représentant un « risque faible » pour la commune. Signe encourageant de redressement grâce à la désensibilisation : la part de taux fixe dans l’encours de la dette du Port s’élevait à 69 % au 1er janvier 2015 contre 36 % seulement au 1er janvier 2012.
Le Conseil général 17ème
Dans un classement inédit des 275 collectivités françaises endettées à plus de 7 millions d’euros, le magazine Challenges a fait apparaître, fin avril lors de la clôture des demandes de soutien, que le Conseil général de La Réunion totalisait 59 millions d’euros de prêts à risque selon les derniers chiffres communiqués par Dexia en 2012. La collectivité départementale n’a pas donné suite à nos questions sur l’évolution de cet encours depuis 3 ans. Le Conseil général de La Réunion se trouvait, toujours selon ce même classement, à une peu valorisante 17ème place nationale. Autre source d’inquiétude, ce montant représentait 77% de l’encours total chez Dexia.
Au plan national, l’encours « sensible » que traite la SFIL atteignait 6 milliards d’euros au 30 avril 2015 contre 8,5 milliards d’ euros au 31 décembre 2012. L’opération de sécurisation n’est donc pas prête de s’éteindre si rapidement.