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Pierrot Dupuy – Quelques réponses et beaucoup de nouvelles interrogations

Hier, nous nous posions un certain nombre de questions à la suite de l'incendie dramatique de Montgaillard qui a malheureusement fait 5 morts et deux blessés graves dont le pronostic vital est toujours engagé. 24 heures après, nous avons des embryons de réponses pour certaines tandis que d'autres questions se posent.

Ecrit par – le mardi 14 décembre 2021 à 17H54

En premier lieu, [nous étions revenus sur les trois arrestations]urlblank:https://www.zinfos974.com/Pierrot-Dupuy-Les-questions-qui-se-posent-apres-le-drame-de-Montgaillard_a176663.html survenues juste après les faits grâce à différents témoignages recueillis sur place par les enquêteurs. L’information vient de tomber : la procureure de la République a décidé de relâcher les suspects sans retenir de charges contre eux.

Les suspects libérés sans être poursuivis « pour le moment »

[Selon le communiqué publié par le Parquet]urlblank:https://www.zinfos974.com/Incendie-mortel-a-St-Denis-Garde-a-vue-levee-aucune-poursuite-pour-l-instant_a176712.html , « il apparaît (…) de l’ensemble des auditions recueillies qu’aucun élément ne permet d’incriminer qui que ce soit à ce stade« . Les gardes à vue sont donc levées, « sans autre poursuite pour le moment« .

Le « pour le moment » a toute son importance. Il semble signifier que les enquêteurs n’ont certes pas trouvé de preuves pour l’instant, mais que cette piste n’est pas totalement abandonnée et sera réexaminée ultérieurement dans le cadre de l’information judiciaire qui va être ouverte, avec les moyens d’investigation beaucoup plus importants et performants que cette procédure permet.

Un architecte réputé pour son penchant écolo et son amour du bois

Venons en maintenant aux sujets qui fâchent. Tout d’abord nous avons appris que ce bâtiment avait été construit par un promoteur privé et ensuite vendu en VEFA (vente en l’état futur d’achèvement) à la SIDR.

C’est donc ce promoteur, que nous avons identifié, qui a déposé le permis de construire. Et c’est son architecte, qui a refusé de nous répondre pour le moment, qui a dessiné les plans.

Nous avions pas mal de questions à poser à ce professionnel que tout le monde présente comme LE spécialiste à La Réunion de « l’architecture écolo ». Il a notamment été le premier à utiliser massivement du bois dans ses constructions. C’est un peu sa marque de fabrique. On en retrouve en grande quantité dans des immeubles construits au Port, à la Possession, à St-Pierre.

Quand les coursives en bois brûlent, que reste-t-il comme issues de secours?

Nous aurions aimé qu’il nous confirme (ou nous infirme) que c’est pour gagner de la place, et donc pour pouvoir construire plus d’appartements, qu’il a décidé de construire ces coursives en bois à l’extérieur, collées en quelque sorte au bâtiment en béton.

Nous aurions aimé savoir s’il avait pensé, au moment où il a déposé le permis de construire, à ce qu’il adviendrait si la coursive en bois, qui était l’unique issue de secours, venait à être détruite par le feu? Emprisonnant du même coup les locataires à l’intérieur des appartements en flammes.

Et les détecteurs de fumée? Et les extincteurs?

[Le directeur de la SIDR que nous avons interrogé]urlblank:https://www.zinfos974.com/Incendie-mortel-a-Montgaillard-La-SIDR-repond-aux-interrogations_a176680.html , a beau jeu de nous répondre que c’est « l’embrasement de certains éléments pouvant être présents sur les coursives, qui a sans doute contribué à accélérer l’incendie”. Possible. Mais si ces coursives n’avaient pas été en bois, les locataires auraient pu s’enfuir… Ce qui n’a pas été le cas.

A sa décharge, ce directeur vient d’arriver à La Réunion. Il ne peut donc pas tout savoir. Mais nous trouvons malgré tout très « légère » sa réponse à notre question qui visait à savoir si ces logements étaient équipés en détecteurs de fumée et en extincteurs. “Normalement oui », nous a-t-il répondu, « Ce sont des éléments qui sont installés dans le cadre de la gestion de nos immeubles”.

Ce n’est pas ça que nous lui demandions. Nous nous doutons bien que tous ces équipements étaient présents au moment de la construction. L’immeuble n’aurait pas été réceptionné, sinon. Mais étaient-ils encore en état de marche le jour de l’incendie? N’avaient-ils pas été détériorés ou volés? Avaient-ils régulièrement été inspectés?

J’espère pour Thierry Ouillon qu’il aura des réponses plus précises à fournir aux enquêteurs…

Les « écolos bobos » imposent plus de bois dans les constructions

L’architecte n’est pas le seul responsable du choix du bois comme matériau. Il s’agit d’une volonté de la DEAL en application des règles de la RTAA DOM (Réglementation thermique, acoustique et aération DOM), un ensemble de règles encadrant les constructions dans les DOM.

L’idée, louable au départ, est d’ajouter une dimension « écolo » aux constructions. Sur le papier, le bois c’est mieux que le ciment, c’est incontestable. Sauf que ce bois n’est pas produit localement. Il est importé. Bonjour l’empreinte carbone! Voila bien un raisonnement d’écolos bobos parisiens qui ne voient pas plus loin que le bout de leur nez.

Ils ignorent également qu’à La Réunion, nous avons des carias. S’agissant de logements sociaux où il faut faire des économies de partout, ces énarques parisiens sont-ils certains que les bailleurs sociaux vont bien envoyer tous les ans une entreprise spécialisée répandre du Xylophène sur toutes les parties en bois? Or, du bois rongé par les carias ne présente plus la même résistance au feu et la même solidité…

Le bois coûte cher et se détériore très vite. Bien plus vite que le béton…

En l’absence de parkings, les voitures garées dans la voie d’accès ont empêché le passage des pompiers

Autre problème mis en avant par les pompiers : en arrivant sur place, ils n’ont pas pu accéder immédiatement à l’incendie, la seule voie desservant l’immeuble était très étroite et encombrée par les voitures qui y stationnaient.

Il faut savoir que la réglementation concernant les places de parking est assez cocasse.

Dans le privé, il est imposé aux promoteurs la construction de 1,5 place de parking pour un T1 ou un T2 et de 2 places à partir du T3.

Dans les logements sociaux, cette obligation tombe à 1 place seulement par logement. Pourquoi? Parce que les têtes pensantes qui nous gouvernent estiment que les locataires de ces immeubles sont plus pauvres et n’ont donc pas les moyens de s’acheter deux voitures par ménage. Ce en quoi ils ont tout faux! Ce ne sont peut-être pas des véhicules de toute première fraicheur, mais il y en a souvent plus qu’un.

Mais aussi, toujours dans ce souhait de lutter contre le réchauffement climatique, ils se disent qu’en limitant le nombre de places de parking, ils inciteront les locataires à emprunter les transports en commun.

Gagné! Résultat? Il y a bien plus de voitures que de logements et on retrouve les véhicules garés dans la voie d’accès qui devrait normalement être interdite de stationnement pour permettre l’accès aux pompiers en cas de sinistre, ou sur les trottoirs de la rue de la Vierge, empiétant sur la route et risquant en conséquence de causer des accidents.

Bravo! Il serait intéressant que l’enquête cherche à vérifier si des vies auraient pu être sauvées si les pompiers avaient pu intervenir 5 ou 10 minutes plus tôt.

Dans certaines communautés d’agglomération, le Plan de Déplacement urbain (PDU) impose la construction de « places de parking visiteurs », une place supplémentaire tous les 5 places. Ce n’était malheureusement pas le cas à Saint-Denis.

 

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