C’est sur un rythme de ragga muffin que le chanteur a décidé de s’exprimer sur la politique, à quelques mois des dernières municipales. « Té le maire, a koz ou lé menteur? Té le maire, a koz ou lé volèr? (…) Oublie pas 2020 i sa arriver ou passe de kaz en kaz rienk pou fé ladi lafé. Ban contrat CDI ou donne ou bann copine. Avec sa ou connait i gagne ti galine galine. Et pendant tout ce temps l’argent té détourné. Le bann z’élu la met la main dans le paquet… « , chante Naty dans « Le Maire ».
L’affaire prend un tournant judiciaire quand Olivier Rivière porte plainte avec, au dossier, une attestation du maire de Petite-Ile. Serge Hoareau pense dans un premier temps que la chanson lui est destinée. David Nativel, l’auteur du titre connu sous le nom de Naty, travaille en tant que chauffeur de bus sur la commune de Petite-Île mais vit à Saint-Philippe et exerce l’activité de pompier volontaire au Tampon. Serge Hoareau appelle donc le mis en cause, lequel lui répond que le maire en question n’est pas lui. « Il m’a demandé si c’était Olivier Rivière. J’ai répondu oui pour ne pas le froisser », avoue le chanteur. En réalité, David explique ce jeudi devant le tribunal correctionnel qu’il pose ses « free style » (sans les écrire), « des textes à vocation satirique », sur des mélodies. « Je chante en général. Je ne sais pas si des gens se retrouvent là-dedans. Ce n’est pas quelqu’un de précis. Je ne cite pas de nom », précise-t-il.
Olivier Rivière, « lanceur d’alerte »
Olivier Rivière retenu, son conseil, Me Henri-Pierre Vergnon pointe des paroles dont la paternité a été reconnue par David Nativel, mais aussi la personne visée sur la base de l’attestation fournie par Serge Hoareau. Des paroles qui porteraient atteinte à l’honneur du maire de Saint-Philippe, laissant entendre des faits de corruption ou de détournement de fonds publics, estime la robe noire. Les raisons de cette diffamation alléguée seraient une histoire de vengeance. Le maire n’aurait pas intercédé en sa faveur suite à une mutation du pompier volontaire d’une caserne de Saint-Joseph à une autre du Tampon. Plus largement, en poursuivant l’auteur de la chanson, Olivier Rivière se positionne ici en tant que « lanceur d’alerte » , « pour mettre des limites au aspirations pseudo-artisitiques au non de la liberté d’expression », lance l’avocat.
Comme souvent dans les affaires de diffamation, le parquet s’en est remis à l’appréciation du tribunal.
« Un comportement politique local pas toujours exemplaire »
Pour la défense de David Nativel, Me Laurent Pasquet-Marinacce s’est d’abord attaché à démontrer les failles juridiques de cette plainte. « La question n’est pas de savoir si Olivier Rivière se sent visé mais si les auditeurs pensent qu’Olivier Rivière est visé ».
Avec l’aide de multiples références artistiques locales, de Zikaskan à Ousanousava en passant par le poète Patrice Treuthardt ou encore « Tiburce » de Téhem, Me Jérome Maillot a mis en exergue un ensemble de « visions satiriques d’un comportement politique local qui n’a pas toujours été exemplaire », rappelle-t-il. La visée de cette procédure est ainsi de « flétrir un homme » , « un chanteur qui fait un constat sur ma société », souligne Me Jérome Maillot. Pour autant, « l’artiste est souvent utilisé par les politiques pour créer de l’ambiance » lors des campagnes électorales n’oublie pas l’avocat dans le système de défense de David Nativel. Naty s’est en effet par la suite produit pour Wilfrid Bertil et son titre a également été diffusé par Jacques Techer, à ce moment-là en lice pour reprendre le cirque de Cilaos.
Après avoir patiemment écouté les plaidoiries des deux parties lancées dans l’arène judiciaire, les juges rendront leur décision le 25 novembre prochain.