L’allée principale mène à un monument particulier en pierre de taille venant de caveaux tombés en désuétude et aussi en béton armé.
Ce monument établi en février 1941, a eu comme architecte Mgr Cléret de Langavant. Il est dédié à la paroissienne Scolastique Malet (1812-1862).
Sur le registre de la cure – novembre 1941 – le curé de Saint-Joseph écrit : « Les médecins ayant identifié des ossements, ceux-ci furent déposés dans un coffret de natte vernis de 60 centimètres de long, et intérieurement garni de plomb. Une copie du procès verbal de l’exhumation y fut enfermée. »*
Par les grâces qu’elle concède, cette fidèle est très sollicitée. Sa tombe initiale située à quelques mètres de là, est régulièrement fleurie et couverte d’ex-voto.
Les tombes chrétiennes datent de 1840 pour les plus anciennes, du moins pour celles qui présentent encore une date. Sur celle-ci (voir photo) il est écrit sur la plaque de bronze scellée dans la pierre le nom de la défunte la date de son décès et son âge. Le caveau comme de nombreux autres aux alentours est surmontée d’une croix en pierre taillée.
En se baladant entre les stèles, apparait soudain une tombe chinoise, une autre puis encore une autre. L’une d’entre elles porte une inscription en Mandarin qui se traduit ainsi : « Tombe de fung Kit , du village de Soontag, commune de Saï Kao, province de Canton, construite le 20 juin de l’année courante et sous un bon signe ».* Cette sépulture est donc celle d’un immigrant Hakka de la première génération arrivé dans l’île à la deuxième moitié du XIXe siècle.
Au détour d’une allée, une autre tombe parait étrange, elle est datée de 1915. Des versets du Coran entourent le nom de la défunte Sara Omarjee Hassen. Il s’agit d’une sépulture musulmane, la seule du cimetière et peut être bien même de tous les cimetières de La Réunion. Les Musulmans ont leur propre cimetière dans chaque commune. « Les indo-musulmans sunnites originaires du Goujrat »* sont arrivés à Saint-Joseph dès 1850 alors que les Cantonnais ne sont que sept en 1885.
Dans cette commune située à l’extrême sud de l’île, le peuplement s’est fait lentement. Les premières concessions ont été attribuées en 1735. Les Blancs libres mais pauvres, car privés de leurs héritages et de leurs terres devenues des rubans étroits inexploitables, s’installent sur les plateaux et sur les terrains encore occupés par les forêts primaires. Le déboisement se fait à grands renforts de main d’œuvre à bon marché (esclaves et engagés malgaches). Le commerce des épices peut être une seconde chance de réussite pour ces laissés pour compte. Bourbon est pendant cette période de la fin du XVIIIe siècle, le grenier des Mascareignes. C’est sur la base de cette recherche de profit que s’appuie la colonisation du Sud. Peu à peu, les épices laissent place à la monoculture de la canne à sucre comme cela se passe partout ailleurs, jusqu’à ce que les plantes à parfum se développent et redonnent un coup de fouet à l’économie de Saint-Joseph.
Remerciements à l’équipe du Cimetière du Butor pour leur accueil.
Source principale :
*Le Patrimoine des Communes de La Réunion Flohic éditions