6 mois auparavant, la mère de famille avait été suivie par les services de l’aide sociale à l’enfance pour son aîné. Au téléphone, elle menace. Le lendemain, alors qu’elle ne se rend pas à la convocation, le père des enfants a la mauvaise idée d’enregistrer l’entretien et de lui faire écouter. Thérèsa entre dans une colère noire, rappelle le service d’aide sociale à l’enfance et met ses menaces à exécution. Elle s’empare du manche en fer de son aspirateur, d’un couteau et de galets et débarque à la Maison départementale de Saint-Leu comme une furie.
La dame à l’accueil reçoit des jets de galets, deux éducatrices spécialisées qui tentent de la raisonner sont elles aussi menacées et sont la cible des jets de galets.
Quand Thérèsa tombe sur l’éducatrice spécialisée qui l’a accompagnée il y a peu, l’explosion de violence se fait encore plus destructrice. Thérèsa la poursuit jusqu’à son bureau qui s’est refermé derrière elle. L’éducatrice spécialisée terrifiée se réfugie sous son bureau mais la mère incontrôlable tente de la déloger à coups de tuyau d’aspirateur. Finalement elle parvient à lui attraper les cheveux d’une main et de l’autre poser la pointe du couteau de cuisine d’une vingtaine de centimètres juste au niveau de son cou.
C’est à ce moment que le directeur et une employée parviennent enfin à entrer dans le bureau. Tous deux tentent de faire entendre raison à Thérèsa. En vain. Ne pouvant attendre davantage l’arrivée des gendarmes, l’homme essaye de maîtriser la mère de famille en furie. Cette dernière ne se laisse pas faire. Elle le blesse au bras et aux mains avec son couteau mais le mord aussi également tandis que l’autre agent tente de lui faire lâcher le couteau.
« À l’époque, je n’étais pas dans mon état normal », Thérèsa n’en dira pas beaucoup plus face au tribunal correctionnel de Saint-Pierre. Elle assure ne garder que des souvenirs très flous des faits. Sa garde à vue a en effet dû être levée en raison de son état psychologique. Thérèsa a été hospitalisée durant un mois avant d’être à nouveau entendue puis poursuivie et incarcérée. Les premières expertises psychiatriques font état d’une abolition du discernement et d’un délire de persécution.
L’éducatrice spécialisée qui a le plus subi le déchaînement de violences de Thérèsa est la seule à avoir trouvé la force d’assister à l’audience. « Pour moi, elle savait très bien ce qu’elle faisait. Elle est arrivée avec beaucoup d’armes, s’y est pris à l’avance et a proféré des menaces« , témoigne-t-elle. En revanche, la victime ne s’explique pas les raisons de cet acharnement. Le suivi avec son fils s’était pourtant bien passé.
Ce déchaînement de violence a laissé un profond traumatisme chez les agents de la Maison départementale. 24 ont été en arrêt maladie, 10 en accident de travail. Certains n’ont toujours pas repris leur poste deux ans après les faits.
« L’éducateur spécialisé est en première ligne de la misère sociale. Son but est de développer des alternatives au placement « , tient à rappeler l’un des conseils des parties civiles.
Le Département s’est également constitué partie civile estimant son préjudice financier à plus de 600.000 euros pour le moment.
« C’est tout un service public qui a été dévasté et un raz de marée qui n’a pas diminué », s’inquiète le parquet qui préfère s’appuyer sur une deuxième expertise psychiatrique penchant davantage pour une altération du discernement. Thérèsa serait « plus dans des ruminations que dans un délire ». Rappelant les 21 jours d’ITT délivrés à l’éducatrice spécialisée et le casier de la prévenue portant 3 mentions dont la dernière en 2018 pour des violences sur ses enfants, le ministère public a requis 4 ans de prison dont 3 avec sursis probatoire face à une Thérèsa impassible.
Son avocate a axé sa plaidoirie sur l’expertise réalisée durant la garde à vue tendant vers une abolition du discernement de sa cliente. La robe noire a également pointé le lourd traitement médicamenteux de Thérèsa. La jeune mère de famille subit également des périodes de dépression, a déjà été suivie et a elle-même été placée en institution durant son enfance.
Le tribunal a finalement lui aussi penché pour l’altération du discernement. Thérèsa est reconnue pénalement responsable des faits qui lui sont reprochés. Les juges sont allés au-delà des réquisitions et ont condamné la mère de famille à 5 ans de prison dont 4 de sursis. Les 6 mois de détention restants sont en revanche aménageables. L’obligation de soins, de réparer les dommages mais aussi l’interdiction de contact avec les victimes et de se rendre à la Maison départementale de Saint-Leu durant 2 ans ont également été prononcés. Les parties civiles ont toutes été reçues et l’audience prochaine sur les intérêts civils fixera la plupart des demandes de dommages et intérêts. D’ores et déjà, Thérèsa est assurée de régler des milliers d’euros de préjudice morale et matériel.