Revenir à la rubrique : Politique

L’opposition et le gouvernement s’écharpent sur les retraites

On attendait du PS qu'il propose son plan pour sauver les retraites. C'est chose faite. Martine Aubry a dévoilé hier les mesures du PS, qui sont l'exact contre-pied du plan présenté la veille par Eric Woerth. Les membres du gouvernement et de la majorité présidentielle s'emploient depuis à discréditer consciencieusement chaque point de la proposition socialiste. Propositions, contre-propositions et dézingage.

Ecrit par Renaud Daron – le jeudi 20 mai 2010 à 15H21

Le plan d’Eric Woerth

Tout a commencé avec l’envoi aux syndicats d’un document d’orientation de 14 pages exposant les fondements de la réforme des retraites, que le gouvernement compte présenter à l’Assemblée Nationale en juillet. Dans ce document, Eric Woerth, le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, explique qu’il est indispensable d’allonger la durée d’activité des salariés et qu’il est hors de question, d’une part de baisser les pensions de retraites et d’autre part d’augmenter le niveau des prélèvements obligatoires ou des cotisations sociales.

Le ministre explique que cet allongement de la durée d’activité se fera progressivement, « au fur et à mesure que les générations, déterminées par leur année de naissance, atteindront l’âge de la retraite« . Le gouvernement dispose, selon le ministre, de trois leviers pour allonger cette durée d’activité : tout d’abord l’augmentation de la durée de cotisation, ensuite le report de l’âge d’ouverture du droit à la retraite et enfin le renforcement de l’incitation des salariés à « liquider leurs pensions de retraite au-delà de l’âge légal de 60 ans ». Tout en écartant de façon explicite le recours à ce troisième levier, dont le fonctionnement pourrait apparaître trop « complexe » aux français, d’après Eric Woerth.

Dans le même temps, Eric Woerth annonce la volonté du gouvernement « de mettre les hauts revenus et les revenus du capital à contribution« . Mais de quelle façon ? Il s’agira de créer « une contribution supplémentaire sur les hauts revenus et les revenus du capital », afin de financer un « fonds de solidarité vieillesse« . Une petite exception à l’intangibilité du bouclier fiscal est d’ailleurs prévue : les contribuables visés par la mesure ne pourront obtenir restitution des sommes versées au-delà du fameux bouclier.

Autre mesure censée « adoucir » le plan de gouvernement : prendre en compte la pénibilité pour les salariés victimes « d’usure physique professionnelle »…

Enfin, le ministre a déclaré que la réforme du financement des retraites allaient être l’occasion pour le gouvernement de « parvenir à plus d’équité entre les secteurs public et privé« .

Le contre-pied du PS et de Martine Aubry

Le plan du parti socialiste se veut l’exact opposé de celui du gouvernement. Il a déclenché à ce titre l’ire des ténors de la majorité présidentielle, qui n’ont pas mâché leurs mots et n’ont pas hésité à parler de « bombe fiscale » (E. Woerth et F. Fillon), de « matraquage fiscal sur les classes moyennes » (E. Woerth) ou encore « d’avalanche de taxes, d’impôts et de cotisation » et de « destruction de l’emploi et du pouvoir d’achat des Français » (Xavier Bertrand)…

Pour Martine Aubry, le gouvernement « dramatise » la question du financement des retraites. Et la première secrétaire du PS de briser le tabou sur la possibilité de trouver de nouvelles « ressources« . Comme on pouvait s’en douter, ces nouveaux financements seront à rechercher du côté des hauts revenus et des revenus du capital. Martine Aubry, qui veut financer un système de retraite fondé « sur un compte-temps à donner à chaque citoyen« , propose en premier lieu d’augmenter la CSG sur les revenus du capital (les livrets d’épargne et les plus-values sur les ventes de résidences principales sont exclus du champ de la mesure), de relever le niveau des prélèvements sociaux sur les bonus et les stock-options et enfin, de faire contribuer à hauteur de trois milliards d’euros par an les fonds d’intéressement et de participation.

Autre mesure phare : l’augmentation de la nouvelle contribution sur la valeur ajoutée mise en place par le gouvernement pour remplacer la taxe professionnelle. Le taux passerait de 1,5 % à 2,2 %, uniquement pour les grandes entreprises.

Le Parti socialiste propose également d’augmenter « à partir de 2012 » (une fois la crise atténuée, selon lui) les cotisations patronales et salariales de 0,1 % par an pendant 10 ans. L’objectif étant d’atteindre 1 % au bout de cette période, ce qui devrait permettre de récolter 12 milliards d’euros supplémentaires pour les retraites. La première secrétaire du Parti socialiste a aussi annoncé une surtaxe de 15 % de l’impôt sur les sociétés acquittées par les banques et institutions financières.

Avec une tel arsenal de mesures, le PS prévoit de récolter les 45 milliards d’euros nécessaires à l’horizon 2025 pour financer les retraites. Martine Aubry espère même récolter 5 milliards d’euros supplémentaires destinés à financer les retraites des salariés aux emplois pénibles. La première secrétaire du PS compte ainsi démontrer qu’il n’est pas indispensable de revenir sur le sacro-saint principe de la retraite à 60 ans…

Mais pour les membres de la majorité, il s’agit de mesures « anti-sociales » et « anti-économiques » car « un tiers des salariés en France bénéficient de la participation et de l’intéressement » et « 20 millions de Français bénéficient d’un contrat d’assurance-vie« , s’est insurgé Laurent Wauquiez… En outre, pour Eric Woerth, les mesures annoncées par la première secrétaire du PS « ne suffiraient pas » à sauver les retraites car s’appuyant sur des chiffres et hypothèses « fantaisistes« …

En définitive, au-delà de la bataille de mots et de petites phrases que se livre les deux camps, c’est bien là deux conceptions de la politique et de la société qui s’affrontent. On attendait du premier parti d’opposition qu’il formule des propositions, c’est chose faite.

 

Thèmes :
Message fin article

Avez-vous aimé cet article ?

Partagez-le sans tarder sur les réseaux sociaux, abonnez-vous à notre Newsletter,
et restez à l'affût de nos dernières actualités en nous suivant sur Google Actualités.

Pour accéder à nos articles en continu, voici notre flux RSS : https://www.zinfos974.com/feed
Une meilleure expérience de lecture !
nous suggérons l'utilisation de Feedly.

S’abonner
Notification pour
0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires

Dans la même rubrique

Européennes : Le candidat mahorais Saidali Boina Hamissi écarté de la liste du RN

Le Rassemblement national a exclu Saidali Boina Hamissi de sa liste pour les élections européennes suite à la controverse entourant ses propos sur les femmes et son soutien exprimé à Vladimir Poutine.
Cette décision, confirmée par une source interne du parti à l’AFP et initialement rapportée par France info, intervient après que des messages Facebook anciens du candidat mahorais ont été rendus publics, révélant des vues complotistes et racistes.

Aurore Bergé : “La Réunion a pris conscience de la nécessité de briser le tabou des violences intrafamiliales”

Ce mardi, la ministre déléguée chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations, a inauguré la nouvelle maison des femmes, de la mère et de l’enfant de Saint-Paul. Ce lieu a vocation à devenir un guichet unique regroupant des professionnels de santé du CHOR et des associations de lutte contre les VIF pour aider les femmes victimes de violence à se reconstruire.