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Macron à Davos : une approche néo-libérale noyée dans un discours altermondialiste

Le 23 janvier 2018, Emmanuel Macron tenait un discours au forum économique mondial de Davos, et a semble-t-il étonné son monde, avec ses accents résolument altermondialistes. Méfions-nous des leurres.   D’abord la forme : le premier tiers en anglais, langue que notre président maîtrise à peu près bien sur le plan syntaxique, où il brosse […]

Ecrit par Dr Bruno Bourgeon, président d’AID – le vendredi 23 février 2018 à 16H52
Le 23 janvier 2018, Emmanuel Macron tenait un discours au forum économique mondial de Davos, et a semble-t-il étonné son monde, avec ses accents résolument altermondialistes. Méfions-nous des leurres.
 
D’abord la forme : le premier tiers en anglais, langue que notre président maîtrise à peu près bien sur le plan syntaxique, où il brosse à coups de grand traits la crise de la globalisation, en pointant dès la deuxième minute l’ennemi, les nationalismes et les extrémismes. L’utilisation de l’anglais n’est pas anodine : c’est à vous, grands de ce monde, que je m’adresse (le parterre des élites économiques et politiques). Il décrit les mauvais résultats de cette mondialisation : déficits publics, défaut de croissance, chômage. En dépit de ce diagnostic, il veut montrer aux classes moyennes et laborieuses les bienfaits de cette mondialisation.
 
Puis il passe à l’exemple français, veut rendre son pays plus innovant et compétitif, pour la rendre plus juste : or si nos sociétés sont injustes, c’est bien la faute au néolibéralisme. C’est la pensée contradictoire, de Macron : dire tout et son contraire. On est chez Orwell : la guerre, c’est la paix, la liberté, c’est l’esclavage, l’ignorance, c’est la force. Même rhétorique sur la gestion des entreprises, sur la justice sociale. Il finit par « France is back ». D’où, on se le demande.
 
En français, dont il connaît les subtilités linguistiques, il ne s’adresse plus au parterre, mais à ses concitoyens. Le discours s’inscrit alors à deux niveaux de lecture. Quelques exemples :
 
La croissance n’est pas une finalité en soi, et l’on a oublié les sacrifices que les Français ont faits pour l’obtenir… Elle est structurellement de moins en moins juste (discours altermondialiste). Exactement le contraire de ce qu’il a dit en anglais précédemment.
 
La bonne option pour certains (Trump, les nationalistes, les extrémistes) serait d’en sortir (de la mondialisation) car la menace est l’effondrement (discours altermondialiste). Deuxième lecture : ça commence à se voir que ça ne marche pas. Sous-entendu : les gens remettent en cause le système, mais pas nous, il nous faut donc convaincre les classes moyennes et laborieuses du bénéfice de la globalisation. Donc nous avons un déficit d’explication.
 
Vient le cours d’économie comparée : Schumpeter, le théoricien de l’évolutionnisme économique, comparé à Darwin, pour un retour du darwinisme social, le cauchemar de Darwin : les plus faibles s’adaptent ou meurent. L’on s’aperçoit là que Macron n’est pas un simple pantin du libéralisme. Beaucoup plus intelligent, il se fait passer pour l’homme du bien commun, mais appartient bien au monde des tenants du système. Nous n’en sortirons pas, ce sont les « méchants » qui veulent en sortir : le boucle est bouclée. Le jeu du double langage est très développé chez notre président. Il va même plus loin en invoquant un contrat mondial entre investisseurs, banques et entreprises : tout ce qui nous a amené où nous sommes. C’est brillant : « on va vous convaincre de rester dans le système, vous les pauvres », avec le sous-entendu aux riches : « les gars, ça commence à chauffer pour nous ». Il nous faut donc, pense-t-il, adapter le système pour survivre et pouvoir continuer à engranger nos dividendes. Ainsi la régularisation du système financier par le FMI : attaquons nous au bitcoin, au shadow banking, aux monnaies virtuelles, comme si la menace était celle-là, comme si ces trois points étaient responsables de l’appauvrissement des populations.
 
S’ensuit la feuille de route pour ne pas perdre le pouvoir.
 
Notre président reste bien dans la même veine néolibérale et globalisante, il n’est pas là pour le bien commun ou la survie de l’Humanité (pas un mot sur le réchauffement climatique si ce n’est la boutade initiale où il se moque des climato-sceptiques), mais pour la poursuite du néodarwinisme social. Le même modèle nous est vendu de façon plus fine, mais il nous est bien vendu.
 
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