Le résultat excédentaire de +273.236 euros voté hier par les élus de la Chambre d’agriculture au budget initial de 2024 est trompeur. Engluée dans une « crise structurelle », selon les mots du vice-président du Département, Gilles Hubert, l’institution traînerait une dette d’environ 6 millions d’euros héritée, insiste le 1er vice-président Bruno Robert, de l’ancienne mandature.
Avant la plénière d’hier après-midi à laquelle il a tenu à assister, le préfet Jérôme Filippini a reçu l’intersyndicale FO – CFDT – CGTR afin de rassurer les salariés sur le suivi de l’État. Un audit de la Chambre d’agriculture a été commandé par l’État et confié à CdA France. Analysé par KPMG, il conclut à « la nécessité de reconstituer l’indépendance financière de la Chambre par une dotation exceptionnelle de 1,2 million d’euros pour améliorer la trésorerie de l’institution ».
Si le Département a consenti à verser un million d’euros, il ne s’agit que d’une avance censée permettre de payer les salaires des 167 équivalents temps plein de la Chambre. En 2024, les dépenses de personnel augmenteront de +115.561 euros en raison d’une hausse de la valeur de point de 1,75%, tandis que le nombre de salariés va diminuer à 162 ETP.
En l’absence d’annonce précise sur le mode de financement de la Chambre, les nombreux agents présents ce mardi après-midi pour la plénière ont fait part de leur inquiétude. Après une discussion et un vote dans la cour, l’intersyndicale a interrompu la séance des élus pour annoncer une grève illimitée. Les agents manifesteront ce mercredi matin lors de la plénière du Conseil départemental voisin.
« On nous parle de l’agriculture bio, mais c’est une hypocrisie. Il y a deux techniciens bio sur l’ensemble de La Réunion. Vous voulez qu’une connaissance technique soit transmise, mais on fait comment ? » a questionné le délégué du personnel CGTR Jean-Yves Payet, en s’adressant directement au préfet et aux élus.
« Il y a 800 agriculteurs en difficulté et 2,5 techniciens pour s’en occuper. J’invite n’importe qui à venir passer une semaine avec moi, je vous épargne les temps de transport : je viens vous chercher chez vous et je vous redépose le soir. Vous allez voir c’est quoi nos cadences de travail », a poursuivi le syndicaliste.
Concernant les pistes de travail qui pourraient permettre à la Chambre de trouver son « indépendance financière », Jérôme Filippini s’est contenté de rappeler les sources actuelles de revenus : aides de l’Europe, de la Région et du Département, recettes de la TA-TFB (taxe additionnelle à la taxe foncière sur les propriétés non bâties) ou encore les prestations vendues aux agriculteurs.
« Il n’y a pas de menace pour les salariés, pas dans l’immédiat. On a travaillé avec le préfet et le président du Département sur les solutions pour le futur », a rassuré pour sa part le président de la chambre verte, Frédéric Vienne. « Depuis les années 1970, la Chambre est présente à La Réunion, mais son financement n’a pas évolué. Cela ne peut pas continuer : son financement doit augmenter à hauteur des ambitions de la Chambre, à hauteur de la souveraineté alimentaire, à hauteur des ambitions de la transition écologique. Si on diminue l’importance et le rôle de la Chambre, tous ces enjeux-là risquent de ne pas être atteints. »
La grève à la Chambre d’agriculture levée après une entrevue avec Cyrille Melchior