Désireux de reprendre la main, après les événements de Mai 1968, le Général de Gaulle dissout l’Assemblée Nationale. Les élections législatives sont fixées aux 23 et 30 juin 1968. Si dans l’ile, les candidatures des députés sortants, Michel Debré, dans la première circonscription, comme celle de Marcel Cerneau, dans la troisième, ne font aucun doute, la situation est bien différente dans la deuxième circonscription.
Cette circonscription, allant de la Possession à Saint-Louis ne compte plus de député titulaire, Gabriel Macé, maire de Saint-Denis qui est allé se faire élire dans l’Ouest, est décédé quelques semaines avant les événements de 1968. C’est son suppléant, Joseph Peyret-Forcade, qui lui a succédé à l’Assemblée Nationale. Pas question de le reconduire tant ce grand propriétaire terrien de Piton Saint-Leu, discret, sans engagement public réel, a été totalement inexistant dans ses nouvelles fonctions. Les leaders de la Droite vont renvoyer ce député, qui aura eu le plus court mandat détenu par un parlementaire dans le département, à peine 3 mois, à l’anonymat.
La désignation d’un candidat pour représenter ce qu’on appelle alors « le Camp des Nationaux », fait l’objet de multiples tractations. Diverses hypothèses sont testées mais l’idée qui domine est de rechercher une personnalité pas forcément encartée à l’UNR, le nom du parti gaulliste d’alors, et avec un profil plutôt modéré.
C’est dans ce contexte qu’est désigné Jean Fontaine. Ce Tamponnais, ingénieur des Eaux et Forêts, a 46 ans. Cet ancien engagé des Forces Françaises Libres ne détient alors aucun mandat électoral et est totalement inconnu du grand public. Politiquement, c’est un départementaliste convaincu et plutôt socialisant. C’est donc lui qui a été préféré à des personnalités syndicales et socialisantes plus en vue, ou encore à Marcel Vauthier, cet ancien député et sénateur qui était également sur les rangs.
Réalisme et efficacité politique obligent, c’est Paul Bénard, maire de Saint-Paul, qui est désigné pour faire équipe avec Jean Fontaine. Ces deux hommes au caractère trempé, soucieux de leur indépendance, aux prises de position carrées, vont former un duo de choc et durable, dominant pendant près de trois décennies la vie politique réunionnaise.
En 1973 Jean Fontaine est réélu député au terme d’une campagne très dure contre Paul Vergés. C’est en 1977 que Jean Fontaine tire profit de la cassure entre socialistes et communistes à Saint-Louis pour ravir à la gauche la municipalité. Mais c’est Saint-Paul, commune dirigée par son ami Paul Bénard, qui lui donne un mandat de Conseiller Général. Si Jean Fontaine ne sera maire et conseiller général que pendant un mandat, il sera successivement réélu député de façon consécutive jusqu’en 1986.
Rentré dans la politique directement par un mandat de parlementaire comme modéré, Jean Fontaine va par la suite développer une posture toujours plus intransigeante l’amenant à rallier le Front National, devenant ainsi le premier député élu de ce parti. Ami de Jean-Marie Le Pen, il participera à ses côtés à de nombreuses actions et présidera durant quelques années l’Association des élus du Front National.
En 1986, à la fin de son quatrième et dernier mandat de député, il s’installe dans le sud de la France pour habiter près de Perpignan, cette grande ville aujourd’hui très convoitée par le FN.