Zinfos974: Pourquoi êtes-vous favorable à la suppression de l’amendement 73 ou amendement Virapoullé ?
Ferdinand Mélin-Soucramanien : Supprimer l’amendement, ce ne serait pas comme à avoir une baguette magique entre les mains, mais il serait dommage de s’en priver. L’article 73 alinéa 5 de notre constitution a été récemment révisé pour les autres départements d’outremer. Il donne un pouvoir plus étendu aux collectivités territoriales des DOM (ndlr: Sauf pour la Réunion) et leur permettent de faire valoir leurs spécificités.
En 2003, le sénateur Virapoullé avait fait voter cet amendement pour prévenir d’une éventuelle marche vers l’autonomie. Depuis, d’autres départements d’outremer ont fait ce choix sans pour autant toucher à la question statutaire. Curieusement, cet amendement adopté est une forme d’autocensure, d’automutilation, car il prive par avance les collectivités de leurs compétences, alors qu’elles devraient exercer leurs pleins pouvoirs.
Cet amendement est-il un frein au développement social ou économique de la Réunion ?
Évidemment compte tenu des spécificités de la Réunion, ses problématiques particulières, notamment sa géographie particulière, sa réalité sociale et économique.. Quand je vois M. Bertile (ndlr : Wilfrid Bertile ancien député réunionnais) s’exprimer, j’ai l’impression que la Réunion est une collectivité territoriale mineure qui n’a pas atteint l’âge de raison, celle de ne pas lui donner l’accès à cette compétence.
Mais n’y a-t-il pas un risque d’aller vers une certaine autonomie, celle tant redoutée par Jean-Paul Virapoullé ?
Non aucun risque. Le pouvoir est très encadré et reste sous contrôle du Conseil de l’Etat. La collectivité ne peut pas elle-même se conduire vers l’autonomie. La Guadeloupe a été la première à utiliser cette possibilité d’adapter les lois à ses spécifiés locales, mais elle a refusé une évolution statutaire, celle de passer à une assemblée unique. En revanche, maintenant elle dispose de pouvoir.
Ce serait difficile de faire abroger cet amendement ?
Non, il suffit que le gouvernement dépose un projet de loi ou que les parlementaires fassent une proposition de loi. Il suffit d’enlever l’alinéa 5 de l’article 73 de la constitution qui stipule que la « disposition prévue aux précédents alinéas n’est pas applicable aux Département et à la Région Réunion ». Mercredi dernier, le conseil des ministres a avancé une série de réforme constitutionnelle, l’occasion pour la Réunion d’accrocher le wagon.
La Réunion est-elle armée pour se voir doter de plus de compétences ?
La Réunion est un paradoxe. C’est la mieux à même d’assumer cette compétence. C’est la collectivité des DOM qui dispose de moins de pouvoir, c’est assez aberrant. Les autres collectivités des DOM sont moins autonomes et n’ont pas forcément l’outillage pour assumer cette compétence.
Dans les autres départements d’Outre-mer, l’expérience a-t-elle été positive ?
Pour le moment, elles n’ont pas fait grand chose. La Martinique et la Guadeloupe ont ouvert le bal. Elles se sont dotées de réglementations spécifiques en matière d’énergie et de développement durable. A la Réunion, on pourrait aller sur le même domaine et notamment l’autonomie énergétique, ou encore l’emploi local.