Jeudi dernier, Karine* s’est rendue au commissariat de Saint-Pierre pour dénoncer son conjoint qui venait de la frapper. Le rapport médical confirme l’agression et elle se voit prescrire 3 jours d’ITT. Le conjoint est justement en route vers le commissariat pour raconter sa version. Mais sur les conseils d’un ami croisé en chemin, il se ravise. À la place, il la menace sur les réseaux sociaux… à proximité du commissariat.
Elle découvre la vérité
Pendant ce temps, Karine explique aux policiers qu’une dispute a éclaté, car elle vient d’apprendre que la mère de ses autres enfants est enceinte de lui. Elle indique être en couple avec lui depuis deux ans et a un bébé d’un an avec lui. Pour Brian, la relation est bien différente. Elle s’est terminée au bout de deux mois il y a deux ans, lorsqu’elle « a essayé de l’étrangler en pleine nuit ».
Visiblement, il n’avait jamais quitté la mère de ses trois enfants avec qui il est marié religieusement. Celle qui avait été sa victime lors de sa condamnation à 10 mois de prison avec sursis en 2020. Celle qui était déjà l’une des victimes en 2019 lorsqu’il a agressé ses compagnes de l’époque et où il a écopé de six mois avec sursis. Celle qui l’attendait encore aujourd’hui devant la salle d’audience.
Le prévenu a bien du mal a expliquer la nature de ses relations avec ses compagnes. Il poursuit ensuite en affirmant que Karine a glissé pendant qu’elle l’agressait. Il assure n’avoir rien fait en raison du sursis qui planait sur lui. Il lui a même fait un câlin pour la calmer. Elle déclare de son côté avoir suffoqué en raison de la pression qu’il a exercée.
La même malchance en 2019
Brian affirme qu’il avait subi le même scénario en 2019. La troisième femme de l’histoire, qui avait appris qu’il était marié religieusement, lui avait cassé une bouteille sur la tête.
Malgré les témoignages qui affirment le contraire, il assure que Karine n’arrive pas à se détacher de lui. « Donc la victime ne dit que des mensonges ? » lui demande la juge, ce à quoi il va répondre par l’affirmative.
Il explique ensuite qu’il avait entrepris un travail sur lui-même pour « ne pas être un méchant papa ». Il tient pour preuve que cela fait deux ans qu’il se tient à carreaux.
Il accuse surtout Karine d’être jalouse de ses enfants et de lui reprocher de trop parler d’eux. Me Frédéric Hoarau, qui défend la victime, va lui souligner que « la première chose à faire quand on aime ses enfants, c’est de les reconnaître ».
« Il est presque convaincu de ce qu’il dit »
L’avocat va poursuivre sa plaidoirie en affirmant que le prévenu « considère que les femmes sont un dû. C’est quelqu’un qui n’a pas conscience de l’autre. Il nie, il n’a aucune empathie. Sur les autres violences conjugales où il a été « victime », malheureusement il a été condamné. Il ne pouvait rien faire, car il était otage de la justice. Il est presque convaincu de ce qu’il dit, c’est ça qui est le plus inquiétant ».
La procureure Caroline Calbo va abonder dans ce sens. « Je ne vois pas d’évolution depuis ses deux condamnations. Je ne sais pas sa conception des femmes. À chaque fois, c’est lui la victime », argue-t-elle avant de requérir 6 mois de prison et la révocation des sursis précédents. Elle demande également l’interdiction d’entrer en contact avec la victime.
Me Sameïdha Mardaye va, elle, faire valoir que ce procès, comme dans de nombreuses affaires de violences conjugales, oppose « deux versions antinomiques ». Elle rappelle qu’il n’y a pas de témoins visuels et que le certificat médical peut correspondre à la version de la chute.
Le tribunal va le déclarer coupable des faits qui lui sont reprochés et le condamne à une peine de 12 mois de prison, dont 6 avec sursis. Elle ordonne la révocation partielle d’un sursis à hauteur de 6 mois ; il part donc 1 an en prison. Il aura toujours plusieurs sursis en cours à sa sortie de prison. Il a interdiction d’entrer en contact avec la victime.
*Prénom d’emprunt