Jérôme Filippini quitte ses fonctions de préfet de Corse

En poste depuis octobre 2024, Jérôme Filippini a demandé à être relevé de ses fonctions. Il retournera à la Cour des comptes. Son successeur est attendu fin août.
Le préfet de Corse, Jérôme Filippini, s’apprête à quitter ses fonctions moins d’un an après sa prise de poste. Âgé de 56 ans, il avait été nommé fin octobre 2024, après avoir exercé pendant deux ans et demi à La Réunion. Son départ, confirmé par une source proche du dossier à l’AFP, s’effectue à sa demande pour des « raisons strictement personnelles ». Il réintégrera la Cour des comptes, dont il est membre, nous apprennent Réunion La Première et Corse Matin.
L’annonce officielle de son remplacement est attendue ce mercredi en Conseil des ministres, et son successeur devrait entrer en fonction le 25 août. Contactée, la préfecture n’a fait « aucun commentaire ».
Un passage remarqué dans l’île de Beauté
Durant ses neuf mois en Corse, Jérôme Filippini s’est illustré à plusieurs reprises, dans un contexte local toujours marqué par des tensions entre l’État et certains courants nationalistes, et par la persistance de réseaux criminels bien implantés.
Le 15 décembre dernier, il avait coordonné la venue historique du pape François à Ajaccio. Ce déplacement constituait une première pour l’île méditerranéenne, et restera comme le dernier voyage officiel du souverain pontife avant sa disparition, survenue le 21 avril.
Face à la mafia, un discours fort
Mais c’est surtout en mars que le préfet a marqué les esprits. Alors que près de 1 500 personnes manifestaient à Ajaccio contre l’emprise de la mafia, Jérôme Filippini n’était pas resté confiné dans les murs de la préfecture. Il était sorti à la rencontre des manifestants, montant sur un camion pour leur adresser un discours fort au mégaphone.
Lire aussi : Le préfet Jérôme Filippini manifeste contre la mafia en Corse
« Compte tenu des relations parfois difficiles entre la Corse et la République, on peut comprendre qu’il y ait beaucoup de raisons de se faire des reproches », avait-il déclaré. « Je dirais volontiers au nom de l’État tout le mal qu’on a pu faire dans le passé. Mais le passé n’est pas notre code. Et on a maintenant le choix : soit la Corse, sa société, ses élus et la République se font confiance, se tiennent la main, et alors nous arriverons à triompher du crime. Si nous ne nous faisons pas confiance, alors le crime a déjà gagné. »
Ce geste et ces mots avaient été salués dans une île marquée par l’assassinat en 1998 du préfet Claude Érignac.
Une carrière dans les Outre-mer et au service de l’État
Avant la Corse, Jérôme Filippini avait été préfet de La Réunion à partir de 2021. Il y avait exprimé son souhait d’y rester : « Je n'oublierai pas La Réunion, elle est dans mon cœur », avait-il déclaré avant de quitter l’île intense.
Ce départ de la Corse intervient alors que le gouvernement s’apprête à présenter au Parlement un projet de réforme constitutionnelle portant sur le statut de l’île. Dans ce contexte sensible, le changement de représentant de l’État pourrait relancer certaines tensions ou attentes. L’identité du futur préfet n’a pas encore été rendue publique.
Lire aussi : Jérôme Filippini : ses succès et ses échecs
Un passage par l'intérieur et Matignon
Né en 1968, ancien élève de l’École normale supérieure et père de trois enfants, Jérôme Filippini a étudié la philosophie et les sciences politiques avant d’intégrer l’ENA. Entré à la Cour des comptes en 1996 comme auditeur, il en devient secrétaire général adjoint, puis occupe plusieurs postes dans les ministères de l’Intérieur et de la Justice, notamment à Montauban et à Paris.
Il dirige ensuite les systèmes d'information du ministère de l’Intérieur, puis contribue, entre 2011 et 2013, à plusieurs réformes majeures de l'État au sein des services du Premier ministre, créant notamment le SGMAP (Secrétariat Général pour la Modernisation de l'action Publique). De 2013 à 2017, il est secrétaire général de la Cour des comptes avant d’être nommé préfet du Lot en 2017, puis de l’Eure en 2020 avant d'être nommé préfet de La Réunion puis de la Corse.
Jérôme Filippini est chevalier de la Légion d’honneur et de l’Ordre national du Mérite.