Deux congélateurs très basse température sont arrivés hier soir par avion militaire, dans le plus grand secret (une invitation presse a été annulée aussitôt envoyée), leur localisation demeurera secrète, en raison de la préciosité de leur futur contenu: les vaccins à ARN messager Pfizer-BioNtech.
Les vaccins à ARN doivent en effet être conservés entre -90 et -60°C, l’ARN étant extrêmement instable. Pfizer a élaboré des conteneurs thermiques spécifiques à carboglace pour acheminer les vaccins de leurs différents lieux de production (USA et Belgique) vers les pays ayant approuvé l’utilisation de ces vaccins innovants.
Les vaccins à ARN n’ont jamais été utilisés sur l’Homme, faute d’efficacité suffisante: la réponse immunitaire obtenue sur l’Homme était moindre que sur les animaux, jusqu’à ce jour. La recherche se penche depuis quelques années sur cette technologie révolutionnaire, qui pourrait prévenir de nombreuses maladies infectieuses, mais aussi guérir des cancers: elle est notamment utilisée pour guérir le mélanome de la langue chez les chiens.
Comment fonctionne le vaccin à ARN messager?
Notre génome contient le plan de fabrication (les gènes, environ 23 000) de chacune des protéines dont nos cellules ont besoin pour exister et fonctionner. Ces plans (nos gènes) sont gardés à l’intérieur du noyau cellulaire. Or, les usines qui synthétisent les protéines (les ribosomes) sont, elles, situées à l’extérieur de ce noyau, dans le cytoplasme des cellules. La fabrication des protéines n’est pas réalisée à partir des plans originaux, mais à partir de duplicatas: les ARN messagers (pour acide ribonucléique messager).
Si l’ADN est composé de deux brins (faits d’une succession de quatre briques élémentaires, appelées nucléotides), l’ARN n’a quant à lui qu’un seul brin, très sensible aux enzymes appelées RNAses, qui servent à le découper pour former le duplicata de plan d’une protéine. Pour que lesdites enzymes ne détruisent pas l’ARN (comme dans les films d’espionnage où le message s’auto-détruit sitôt lu), il doit être conservé à très basse température, qui les neutralise.
Quant au vaccin, il s’agit d’injecter au patient des molécules d’ARN correspondant à des protéines de l’agent pathogène contre lequel on souhaite l’immuniser. Ces protéines sont choisies en fonction de leur capacité à provoquer une réponse immunitaire. Après injection de l’ARN correspondant, les cellules de l’individu à vacciner fabriqueront elles-mêmes lesdites protéines. Le vaccin de Pfizer et BioNtech utilise un ARN messager codant pour la protéine Spike du coronavirus SARS-CoV-2, soit la clef qui lui sert à entrer dans les cellules qu’il infecte.
Deux injections sont nécessaires à trois semaines d’intervalle
Ce vaccin nécessitera deux doses, injectées à trois semaines d’intervalle. Son efficacité prouvée est de 95% dès 28 jours après la première dose, mais il est encore trop tôt pour savoir combien de temps durera la réponse immunitaire, la pandémie étant récente. Pfizer et BioNtech ont prévu de produire 1,5 milliard de doses d’ici la fin 2021, et, pour l’heure, le plan de vaccination français prévoit que seuls les plus fragiles soient vaccinés, commençant par les résidents d’EHPAD.