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Une seule solution pour sortir de la crise : L’égalité totale

Cette réflexion n'avait pas vocation à être publiée. En tous cas pas aussi rapidement. J'ai conscience qu'elle n'est pas tout à fait aboutie et qu'elle aurait encore mérité quelques approfondissements. Mais vu les événements qui secouent l'ile et l'absence de solutions concrètes pour sortir de la crise, j'ai pensé intéressant de soumettre mes réflexions à votre jugement. A vous de me dire ce que vous en pensez. Pierrot Dupuy

Ecrit par zinfos974 – le mardi 20 novembre 2018 à 18H44

Tout pays, où qu’il se trouve dans le monde, est susceptible de faire face à deux handicaps économiques majeurs. Mais en général, il n’en subit qu’un seul.
 
Soit il a des salaires élevés, du fait qu’il appartient au cercle dit des pays développés. Mais dans ce cas, il n’a pas le handicap de la distance puisqu’il dispose d’un marché captif à sa porte. L’Europe pour la France, les Etats-Unis, etc…
 
Soit il est loin de ces marchés, je citerai comme exemples des pays comme la Chine ou Maurice plus près de nous. Mais il compense le coût du fret qu’il va dépenser pour amener ses marchandises jusqu’aux pays développés où il va les vendre, par un coût de main d’œuvre très faible. Ce qui lui permet de vendre au même prix, voire même moins cher, que celles qui sont produites sur place.
 
Nous à la Réunion, nous sommes un des rares pays au monde où nous cumulons les deux handicaps : les salaires élevés ET la distance.
 
Si nous voulons développer notre économie, il nous faut donc jouer sur un de ces deux handicaps.
 
Lequel ? Les salaires ? Difficile d’annoncer aux Réunionnais qu’à compter du 1er janvier prochain, leurs salaires vont être diminués pour être alignés sur ceux de Maurice ou de Madagascar pour prendre les deux exemples les plus proches de nous. Soit environ 312€ par mois à Maurice et 44€ à Madagascar. Vous avez compris que c’est impossible, ce serait immédiatement la révolution.
 
Tout au plus peut-on jouer sur des exonérations ou des diminutions de charges mais il n’en demeure pas moins que le salaire de référence est et restera le SMIC et que nous serons donc toujours plus cher que nos voisins. Sans parler du fait que le gouvernement d’Emmanuel Macron revient régulièrement sur ces avantages accordés aux entreprises des DOM.
 
Ne reste donc que le handicap de la distance.
 
La départementalisation, un premier pas. Mais insuffisant !
 
En mars 1946, trois députés un peu illuminés, les Réunionnais Raymond Vergès et Léon de Lepervanche et l’Antillais Aimé Césaire, ont réussi à convaincre le gouvernement et les parlementaires de l’époque de transformer ces quatre vieilles colonies situées à des milliers de kilomètres de la métropole, 9.000 km pour la Réunion, en départements français. C’est à dire avec les mêmes lois que la métropole, et les mêmes droits et devoirs.
 
C’était une véritable folie au lendemain de la seconde guerre mondiale, dans un pays qui rappelons-le était ruiné. Et pourtant ils l’ont fait. Et pourtant, plus de 72 ans après, on peut se dire que c’est une relative réussite.
 
Relative car si on ne peut qu’être fier du développement social et administratif de ces départements d’outre-mer comme on les appelle, force est de reconnaître que l’échec est patent d’un point de vue économique.
 
La Réunion, pour parler d’elle puisque c’est celui que nous connaissons le mieux, vit sous perfusion d’argent public.
 
L’économie « réelle » est catastrophique.
 
     – 30 % de la population active est au chômage, ce qui, en France, équivaudrait à plus de 10 millions de chômeurs.

     – À ce sombre tableau, il convient d’ajouter les handicaps suivants : Le PIB par habitant est d’à peine 20.000 euros contre plus de 32.000 euros en France.
 
     – L’Indice de développement humain qui se calcule selon les trois critères « santé, éducation et revenu » montre que La Réunion est en retard de près de 20 ans sur celui de la France.
 
     – La pauvreté frappe près de 42 % des Réunionnais. Plus de 30 % des habitants de l’île, soit plus de 160.000 personnes, survivent grâce aux minimas sociaux.
 
     – La jeunesse, qui constitue l’avenir de La Réunion, n’est pas épargnée par cette tragédie sociale puisque 50 % des jeunes quittent le système scolaire sans diplôme et 70 % des jeunes qui ont quitté le système scolaire sont frappés par le chômage et l’exclusion.
 
     – Les richesses ne manquent pourtant pas à La Réunion, elles sont simplement réparties de manière inéquitable. Ainsi, 20 % des classes les plus aisées accaparent près de la moitié des richesses de l’île. Parmi les dix communes françaises les plus inégalitaires en termes de revenus, neuf d’entre elles sont réunionnaises. De la même manière, parmi les six villes les plus pauvres de France, quatre sont réunionnaises
 
     – Et je ne vous parle pas du taux d’emploi qui est très faible : 44 %, soit 20 % de moins qu’en France hexagonale et un niveau de vie très bas pour près de la moitié de la population réunionnaise : 42 % des Réunionnais vivent en dessous du seuil de pauvreté ce qui, ramené à l’échelle nationale, représenterait quelque 25 millions d’individus.
 
     – Passons rapidement sur le taux d’illettrisme record,116 000 personnes pour 830 000 habitants, soit 14 % de la population. Ramené à l’échelle de la France hexagonale, cela représente plus de 9 millions d’habitants.
 
     – Le Produit Intérieur Brut (PIB) par habitant est de 17.700 euros, soit 40 % inférieur au PIB français.
 
     – Et en matière de logements, plus de 25 000 familles sont toujours en attente d’un logement décent.
 
On pourrait continuer la liste à l’envie mais on va en rester là. La démonstration est à mon avis suffisante.
 
Cette situation n’est, certes, pas nouvelle mais elle ne fait qu’empirer d’année en année et cela, quel que soit le gouvernement en place.
 
Face à cela, que proposent nos politiques ? Rien ou presque. Encore et toujours plus de défiscalisation, le maintien de l’octroi de mer et le retour des contrats aidés.
 
Voilà en gros notre avenir, sachant que ces remèdes, qui ne sont que des emplâtres sur une jambe de bois, n’ont pas fonctionné dans le passé. Ou pas assez. Et qu’il n’y a aucune raison qu’ils fonctionnent dans l’avenir.
 
Quoi faire alors ?
 
Pour imaginer l’avenir, revenons au passé… Et plus particulièrement aux années 80.
 
L’égalité sociale, un deuxième pas. Mais toujours insuffisant…
 
Le 31 décembre 1986, Jacques Chirac qui est Premier ministre, fait voter la loi dite de « parité sociale globale ».
 
Paul Vergès dénonce cette « loi d’apartheid social ». Et l’année suivante, en compagnie d’Elie Hoarau, ils démissionnent de leurs mandats de députés. Mais juste avant, à la tribune de l’Assemblée nationale, Paul Vergès lance : « À vous la Parité, à nous l’Égalité, le peuple tranchera ».
 
On connaît la suite, la parité a perdu et la loi sur l’égalité sociale a été votée en 1996.
 
Avec cette revendication d’égalité sociale, Paul Vergès jouait gagnant sur tous les tableaux.
 
Il offrait au gouvernement un choix duquel il sortait gagnant quelle que soit l’hypothèse retenue : soit on lui refusait l’égalité sociale, et il avait beau jeu d’expliquer aux Réunionnais que les Français ne voulaient pas d’eux, qu’on les considérait comme des sous-Français et que, dans ces conditions, il ne leur restait plus qu’a demander leur autonomie, voire leur indépendance.
 
Soit le gouvernement acceptait et il en tirait tous bénéfices auprès des Réunionnais en leur expliquant que c’est lui qui leur avait permis d’obtenir un salaire et des prestations familiales à celles des métropolitains. Et que donc, s’ils voulaient que leur situation continue à s’améliorer, il fallait continuer à lui faire confiance… et à voter pour lui !
 
Pourtant, Paul Vergès le visionnaire, a fait une erreur majeure. Est-ce l’âge, est ce la satisfaction du devoir accompli ? Toujours est-il qu’une fois l’égalité sociale obtenue, il en est resté là. Pourtant, l’égalité sociale n’est qu’une partie de l’égalité entre la Réunion et la France.
 
Suis-je l’égal d’un Zoreil parce que je touche le SMIC comme en métropole et que ma femme touche les mêmes allocations familiales qu’une femme zoreille ? Bien sûr que non.
 
     – Je serai l’égal d’un Zoreil quand le taux de chômage à la Réunion sera le même que celui de la métropole.
 
     – Quand les prix dans les grandes surfaces seront les mêmes que dans une grande surface de métropole.
 
     – Quand, pour me déplacer sur le territoire national, c’est à dire entre Gillot et Paris, je paierai l’équivalent de ce que paye le Zoreil le plus défavorisé, c’est à dire celui qui doit faire un Marseille/Lille ou un Marseille/Brest.
 
     – Quand le prix d’un abonnement téléphonique ou internet sera le même qu’en métropole.
 
     – Quand le prix des voitures sera identique à la Réunion et dans l’hexagone…
 
Et je vous laisse ajouter les points qui vous intéressent à la liste…
 
C’est ce que j’appelle l’égalité totale. Utopique me direz-vous. Oui, sans doute. Mais pas plus utopique que quand nos trois députés ont réclamé la départementalisation ou lorsque Paul Vergès a revendiqué l’égalité sociale.
 
Mais comment faire ?
 
C’est là que nous en revenons à notre point de départ. Comme nous ne pouvons jouer sur le handicap des salaires, il faut que nous jouions sur celui de la distance.
 
L’égalité totale, l’aboutissement de la revendication d’égalité
 
Aujourd’hui, une bonne partie des échanges entre la France et la Réunion est déjà dématérialisée. Beaucoup de ces échanges passent par voie numérique, via internet.
 
Je propose d’aller jusqu’au bout du raisonnement et de coller virtuellement La Réunion à la France.
 
C’est à dire de faire disparaître le coût du fret entre l’Europe et la Réunion.
 
Autrement dit, que la France et l’Europe prennent en charge le fret entre notre ile et l’Europe.
 
Je vous entends déjà : Pierrot Dupuy est devenu fou. Rassurez-vous, pas encore tout à fait.
 
Savez-vous combien représente ce coût aujourd’hui ? Selon le MEDEF et la CPME que j’ai contactés, environ 300 millions d’euros. On n’a pas la statistique exacte, l’INSEE n’a pas pensé à la faire, mais par déduction, on arrive à ce chiffre.
 
300 millions. 300 petits millions serai-je tenté de dire, comparé par exemple au 1,8 milliard que va coûter la Nouvelle Route du Littoral.
 
D’accord me direz-vous. Mais ça servira à quoi ?
 
Et bien, imaginez la situation. Si on décide demain que la Réunion est collée à la France et que le coût du fret est égal à zéro, on pourra tout fabriquer à la Réunion, en étant dans les mêmes conditions que n’importe quelle entreprise métropolitaine.
 
Imaginons que je veuille fabriquer des frigidaires à la Réunion. Je fais venir les composants de métropole, ils arrivent ici au même prix que si c’était à Marseille ou à Rennes puisque je ne paye pas le fret. Je fabrique mes frigidaires ici et je peux les renvoyer au port du Havre où ils arriveront au même prix que les frigidaires fabriqués en France.
 
Et ce qui est valable pour les réfrigérateurs le serait pour n’importe quel produit.
 
On pourrait tout fabriquer localement et enfin nos produits seraient compétitifs au niveau européen. Ce qui permettrait de développer une véritable industrie locale et de créer des emplois.
 
On pourrait même imaginer une Réunion avec le plein emploi.
 
Car en plus de fabriquer pour l’Europe, nous pourrions devenir une véritable tête de pont de l’Europe dans la zone et pourrions espérer vendre à nos voisins de l’océan Indien mais aussi de l’Afrique, des produits pas trop cher avec le label « qualité Europe ».
 
Alors, je suis honnête, si l’égalité totale se réalise un jour, le coût de la prise en charge du fret ne sera plus de 300 millions mais de beaucoup plus puisque les flux d’échange seront bien plus importants. Il faudra bien faire venir les matières premières et réacheminer les produits transformés en Europe.
 
Mais dans le même temps, puisque les marchandises seront enfin au même prix dans les grandes surfaces, que nous paierons tous nos produits au même prix qu’en métropole, l’Etat pourra arrêter de surémunérer ses fonctionnaires.
 
Et il pourra arrêter toutes ses aides spécifiques. De même, il pourra supprimer l’octroi de mer et doubler la TVA.
 
Tout comme il pourra mettre un terme à l’abattement de 30% sur les impôts.
 
Il perdra d’un côté mais il gagnera de l’autre.
 
Dans la colonne dépenses, il faudra compter les sommes déboursées pour le frêt plus la compensation (dotation globale de fonctionnement) à verser aux collectivités pour compenser la perte de l’octroi de mer.
 
Dans la colonne recettes, il pourra compter sur l’économie réalisée sur les salaires des fonctionnaires et assimilés, la suppression de l’abattement de 30% sur les impôts, le doublement de la TVA et les impôts supplémentaires prélevés sur les bénéfices des entreprises et sur les salaires des Réunionnais qui auront trouvé un travail grâce à ces mesures, et qui n’en payaient pas jusque-là puisqu’étant chômeurs.
 
Et surtout, il offrira enfin un réel avenir à nos populations.
 
Voilà le rêve que j’ai fait. A vous de me dire maintenant ce que vous en pensez et si vous le partagez avec moi.
 

 

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