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Un contrat pour un renouveau culturel à Saint-Denis

Un constat s’impose, Saint-Denis n’a toujours pas basculé dans le 3e millénaire. L’offre culturelle se caractérise par une absence de projet et une grande incohérence. La politique culturelle est indigne d’une ville de près de 150.000 habitants qui a vocation à rayonner sur l’ensemble du territoire, communal et réunionnais, mais aussi dans la région. On […]

Ecrit par Jean-Régis Ramsamy, Saint-Denis – le mardi 10 mars 2020 à 16H45

Un constat s’impose, Saint-Denis n’a toujours pas basculé dans le 3e millénaire. L’offre culturelle se caractérise par une absence de projet et une grande incohérence. La politique culturelle est indigne d’une ville de près de 150.000 habitants qui a vocation à rayonner sur l’ensemble du territoire, communal et réunionnais, mais aussi dans la région. On érige ici ou là des lieux culturels, la  Cité des Arts, Médiathèque FM, la bibliothèque  A. Peters,.. sur un territoire qui dispose de deux Campus universitaires l’Université et l’ Université Catholique et d’importants équipements culturels, le théâtre de Champ-Fleuri, la BDR , les musées, …Mais quels liens  entre toutes ces structures et outils? Des actions éclatées, sans cap ni souffle, donc sans dynamique et de surcroît  ignorant le plus souvent les créateurs et les nombreux acteurs associatifs qui se démènent  avec leurs difficultés. Or les associations constituent aussi un recours contre le manque d’emplois, d’activités, elles sont nombreuses à Saint-Denis. Mettons à leur disposition, une maison commune où elles pourraient accueillir le public, une boite aux lettres…

Didier Robert, la tête de liste le dit, le Téat de Champ-Fleuri peut toujours proposer des artistes de renom,  mais si on ne se préoccupe pas d’inscrire ces initiatives dans une véritable dynamique comment s’étonner que la majorité des dionysiens se sente exclus de ces actions culturelles ? Comment ne pas voir que nous accentuons le fossé entre élites et la population? Les tarifs sont-ils à la portée de toutes les bourses ? Nous ne sommes pas loin de l’analyse de l’historien Emmanuel Todd sur les élites. 

Il faudrait mettre fin à certaines manifestations dont le sens est incompréhensible, comme le Prix Métis. A quoi bon honorer une fois de plus des auteurs célèbres, qui cumulent les récompenses nationales ou internationales ? N’est-il pas mieux de mettre en avant nos propres auteur (es) ? nos propres structures d’ édition? Quel est le retour d’une telle opération pour le développement de la littérature ? Pour la promotion de la lecture dans une île où l’illettrisme est si élevée ? En quoi cette manifestation profite au développement culturel en général ? Nous pouvons travailler avec les écrivains sur la mise en place d’une Maison des écrivains. 

Nos enfants des écoles, des collèges et lycées devraient bénéficier pleinement d’une politique culturelle innovante, même s’il n’est pas question de se substituer à l’Education nationale. Je pense aussi que nous devons placer en bonne place, un outil comme l’école municipale de musique et de danse Loulou Pitou. Elle est un levier indispensable pour une politique culturelle inclusive.

Que dire de la coopération avec les îles de l’océan Indien, elle est très sélective au point de susciter des interrogations. Or Tananarive a été la capitale de la région Sud Ouest de l’océan indien dans les années 50/60. Qu’attend St Denis pour suivre cet exemple ? Mais cela a été dit, la ville a vocation à devenir la capitale culturelle de l’O.I., à l’instar de Strasbourg ou d’autres grandes cités.

Nous sommes dans la ville de Roland Garros, de  Sarda Garriga, du Prince Vinh-San, le sultan Said Ali, la Reine Ranavalo, Abdelkrim, …Lorsqu’un zarboutan tire sa révérence nous devrions lui rendre un hommage appuyé, le cas récent de M. Vautier.  Je ne crois pas qu’une rue ou square porte le nom du ségatier passé à la postérité Maxime Laope. 

La gestion du dossier de l’ancienne prison Juliette Dodu, comme sur d’autres projets semble avoir été guidé par l’amateurisme. La municipalité a d’abord tenté une opération immobilière qui a provoqué la vive réaction des associations. Deux mois avant les élections la même équipe affirme qu’elle détient un projet défiant toute concurrence pour ce site mémorable. L’ancienne prison mérite plus de considération. Les hérauts de la gauche ont failli à leur mission. N’oublions jamais la phrase de Nelson Mandela, « Faire pour nous, sans nous, c’est faire contre nous ».

Sur la question des arts urbains, aujourd’hui des jeunes artistes comme Konix et bien d’autres méritent d’être soutenus dans leurs quartiers, pour les actions qu’ils mènent en faveur du plus grand nombre. L’utilisation de la langue créole à tout bout de champs, est un cache misère. Notre langue régionale mérite mieux que cela. L’anglais dans les petites classes et l’initiation au yoga sont des éléments sans doute à poursuivre. Mais quels liens avec les écoles et leurs équipes pédagogiques ? 

In fine, nous devons rechercher ce qui rassemble dans la Cité que certains baptisent rapidement de capitale. La notion du « mieux vivre ensemble » transcende le concept éculé du « bien vivre ensemble ». La première expression est remplie d’espoir, pour bâtir une société plus égalitaire où chacun dispose d’une place. Quand à la notion de « bien vivre ensemble » c’est un cliché, qui n’a pas plus de sens dans une ville où le risque communautaire est grandissant, le respect devenu parfois un luxe. 

Le déficit de fierté est proportionnel au manque d’évènements majeurs. Une fois par an, toute la population devrait se retrouver autour d’un événement sportif ou culturel majeur. Cet événement qui ferait l’unanimité aurait le mérite de gommer les éventuels replis identitaires ou individualismes pour se retrouver dans une forme d’unité dionysienne. Sinon la fracture culturelle s’élargira, au risque de semer les graines de divisions et l’accroissement des conflits interpersonnels. 

Nous savons depuis longtemps que la gauche n’a pas le monopole de la Culture. Les déclarations de principe, les gesticulations et le saupoudrage ne sauraient servir de programme et encore moins de projet culturel. Saint- Denis est riche de son histoire (ville d’art et d’histoire), de ses quartiers, de son patrimoine, de ses équipements culturels et de ses nombreuses associations. Mettons en place des parcours culturels/cultuels pourraient être organisés à l’intention des touristes, des dionysiens eux-mêmes. Mais ce qui nous manque cruellement, c’est un projet qui mobilise pour bien se déployer au profit de toute notre population. Celle du centre  ville comme de tous ses quartiers périphériques et  des écarts. Nous  voudrions accorder un intérêt particulier à l’expression culturelle dans chaque nouveau projet de développement. Cette réflexion est à partager. Si nous sommes tous conscients de cette nécessité il n’y a pas de doute que la Culture sera encore plus valorisée. 

En clair, il nous faut repenser l’ensemble du projet culturel, sa philosophie, ses axes directeurs, sa stratégie, ses démarches. 

 

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