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Tribune de Nadia Ramassamy : « Ne bradons pas l’Océan Indien »

Avant-hier, mardi 18 septembre, Mme Maria Fernanda Espinosa Garcés (Équateur) a donné le coup d’envoi de la 73e session de l’Assemblée générale de l’ONU. L’ensemble des États membres de l’institution y sont attendus, les « grands » comme les « petits ». Mais qu’est-ce qu’un « grand » dans les relations internationales ? Vaste question. […]

Ecrit par Nadia RAMASSAMY – le vendredi 21 septembre 2018 à 10H58

Avant-hier, mardi 18 septembre, Mme Maria Fernanda Espinosa Garcés (Équateur) a donné le coup d’envoi de la 73e session de l’Assemblée générale de l’ONU. L’ensemble des États membres de l’institution y sont attendus, les « grands » comme les « petits ». Mais qu’est-ce qu’un « grand » dans les relations internationales ? Vaste question. Si l’on prend la définition classique d’une puissance, le hard power, ce sont les capacités militaires d’un État qui forgent sa puissance. Et quoi de mieux qu’un porte-avions nucléaire pour incarner la Puissance et la Force.

Récemment, le 9 septembre dernier, la ministre des Armées Mme Florence Parly a fait savoir que la décision d’équiper ou non la France d’un deuxième porte-avions sera tranchée lors de la prochaine Loi de programmation militaire (LPM), donc en 2025.
Aujourd’hui, la France ne dispose que d’un seul porte-avions, le Charles de Gaulle, actuellement en train de terminer à Toulon sa rénovation de mi-vie pour permettre à ce dernier de naviguer encore pour les vingt-cinq prochaines années.

Alors que la France dispose du deuxième espace maritime au monde, elle ne peut, pour autant, se targuer d’être la deuxième puissance maritime et navale du monde. Pour incarner la deuxième puissance maritime et navale, la France devra non seulement avoir besoin d’un remplaçant au Charles de Gaulle afin de garantir la permanence à la mer, mais également assurer et assumer une posture de défense sur l’ensemble de son territoire maritime de façon à protéger sa Zone économique exclusive qui s’étend sur 11 millions de km2.

Or, si aujourd’hui, toutes les attentions se concentrent sur les activités des marines marchandes et militaires dans le Pacifique, force est de constater que l’Océan Indien n’a rien perdu de son caractère stratégique, bien au contraire. Sur les 22 millions de km2 que couvre l’Océan Indien, 3 millions sont à la France. Paris ne peut donc rester passif.

En outre, cet Océan constitue le coeur de l’économie mondiale. En effet, 25 % du trafic mondial transite par cet Océan. 75 % des exportations de l’Union européenne empruntent cet Océan, 30 % de la production mondiale de pétrole transite par le canal du Mozambique et 70 % des exportations d’hydrocarbures du Moyen-Orient sont à destination de l’Asie.

Alors que la mission Jeanne d’Arc de la Marine nationale s’était déployée dans cette région en 2017, les puissances riveraines fourbissent de plus en plus leurs armes. Par conséquent, la France se doit d’entretenir une relation exigeante avec l’ensemble des puissances établies ou (ré) émergeantes de la zone. C’est, entre autres, le cas de la Chine. Pékin a déjà commencé la construction d’un troisième porte-avions et transforme ses installations portuaires civiles dudit « collier de perles » en base militaire ; alors que New Dehli se focalise actuellement sur la construction d’un groupe aéronavale crédible et modernise ses sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE).

Parallèlement, le multilatéralisme régional demeure trop faible. Qui connaît l’Organisation régionale pour la coopération des pays riverains de l’océan Indien ? Qui sait que La Réunion représente la France au sein de la Commission de l’océan indien, et qu’un Conseil des ministres de l’organisation vient de se dérouler ?

Certes, la Mission de l’Union européenne Atalante a permis de diminuer les actes de piraterie au large de la Somalie, mais la liberté de navigation, inhérente au droit de la Mer est de plus en plus compromise, la pression sur le patrimoine naturel s’accroît, et les tensions géopolitiques n’ont jamais été aussi fortes entre les pays du Golfe arabo-persique.

Si l’Inde entend être une puissance installée dans cette zone qui lui est naturelle, le développement de la Chine et les incertitudes quant à la présence américaine (les États-Unis ont une base militaire à Diego Garcia) pourrait faire passer la région d’un relatif vide stratégique à une ère géopolitique incertaine. Du multipolaire à l’unipolaire ?

Archipel Crozet, îles Kerguelen, îles Éparses, îles Saint-Paul, Nouvelle-Amsterdam, La Réunion, les Glorieuses, Juan de Nova, Bassas da India, Europa, Tromelin et Mayotte… Cessons de qualifier avec un relent colonial cette zone les « confettis de l’empire ». Dois-je rappeler que 26 % de notre ZEE se situe dans l’Océan Indien ?

Dans ce contexte, La Réunion revêt d’une importance capitale. La Zone de défense et de sécurité du sud de l’Océan Indien de l’armée française est basée à La Réunion et à Mayotte. Ces forces armées contribuent à la protection des intérêts de la Nation, mais aussi à la sécurité des populations, tout en coopérant avec les États voisins.

Enfin, il convient d’accentuer au sein de la zone « indo-pacifique » les partenariats stratégiques que Paris a noué avec les acteurs de la région. Comme en témoigne la Vision stratégique commune que le Président Emmanuel Macron a signé avec le Premier ministre indien Narenda Modi en mars dernier.

 

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