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Transports scolaires dans l’ouest : « Le fond du problème n’a pas été résolu »

La grève des chauffeurs de cars scolaires des villes de l’ouest est suspendue. Après quasiment deux semaines de flottement sans savoir à quelle sauce ils seraient mangés, les membres de l’intersyndicale ouvrent un nouveau chapitre, celui de l'élaboration d’un accord-cadre pour éviter qu'une telle répercussion sur le quotidien des parents et des 17.000 élèves transportés des cinq villes de l’ouest ne se reproduise. Joseph Magdeleine, le secrétaire général du syndicat Force Ouvrière Transports 974, fait le point pour Zinfos974 sur les prochaines luttes qu’il reste à mener.

Ecrit par zinfos974 – le samedi 21 août 2021 à 22H40

Zinfos : La grève est terminée mais sous quelles conditions ?

Joseph Magdeleine : « La grève n’est pas terminée, les mots sont importants. En face nos interlocuteurs jouent vraiment sur les mots et la législation, la grève est suspendue, c’est pas pareil ! En aucun cas un accord total n’a été trouvé. On a bien vu hier la volonté quasi inexistante du groupement entrant à négocier (ndlr : Transport Ponin, Groupement Moutoussamy ouest, l’Oiseau bleu, C.joseph). Moi ce que j’attendais de cette réunion de vendredi (avec la médiation de la Direction du travail, ndlr), c’est qu’ils nous montrent une grille salariale de ceux qui sont en face (les nouveaux entrants). 

Ce qu’on en a retiré avec les collègues de l’intersyndicale, c’est qu’un accord avec les entrants aurait permis de rouler lundi mais ils n’ont pas tenu compte de cela, ils sont partis. C’est pour moi le constat qu’ils ne font pas cas des élèves et des personnels avec des collègues qui sont là depuis 15 ans, 20 ans… et qui connaissent les familles des enfants transportés. Des familles d’ailleurs qui comprennent le mouvement.

Nous avons donc décidé de suspendre le mouvement de grève et là nous allons faire appel à l’ensemble des acteurs du secteur afin de sécuriser le parcours professionnel de nos chauffeurs par le biais d’un accord-cadre pour que ce qui s’est produit là ne se reproduise plus sur les circuits scolaires. C’est ce qu’ils ont réussi à faire à Mayotte en 1 mois mais en cassant et en brisant. Nous on ne veut pas en arriver à là. 

On a démontré qu’on était capable de mobiliser. Avec plus de 50% du réseau TCO qui était mobilisé, ils ont compris ! Maintenant la balle est dans leur camp. La grève est suspendue mais à n’importe quel moment ça peut reprendre. Nous avons montré que nous étions capables de le faire.

Le fond du problème n’a pas été résolu. On va dire que les chauffeurs actuels sont les sacrifiés, quelque part, pour mettre en place une convention cadre. il ne faudrait pas que ça soit un sacrifice en vain. 

Les chauffeurs de cette grève ne pourront pas en bénéficier ?

Ceux qui sont là aujourd’hui ne pourront pas bénéficier de cet accord car ce ne sera pas rétroactif.  Les collègues en sont conscients. Aujourd’hui ils ont mené un combat qui était dur avec des gens en face qui ont une insensibilité incroyable parce que ce que nous défendions ce n’était pas une augmentation ou un caprice mais juste notre niveau de vie. N’importe qui pouvait comprendre que notre revendication était justifiée.

Maintenant, en face, on se cache derrière la loi, pourquoi pas… mais la moralité dans cette affaire c’est que les pouvoirs publics n’en ont rien à faire du niveau de vie de leurs travailleurs et de leurs administrés. Au nom de la rigueur budgétaire, que nos collègues perdent cette somme-là, ça ne les regarde pas… Le volet social a complètement été oublié dans cet appel d’offres, c’est cela que nous avons dénoncé. On a fait une démonstration de force. J’espère que l’intersyndicale n’ait plus à refaire cela. 

Je pense que désormais à La Réunion tout le monde comprend ce que c’est qu’un appel d’offres. Quand, quelque part, on oriente vers le moins disant au niveau du prix, eh bien derrière le prix il y a du social ! A la rigueur, si le marché était sur du 50/50, peut-être qu’on aurait pas eu affaire à ce mouvement-là. L’ancien marché était sur du 60/40 privilégiant les critères techniques et 40% sur le prix, c’est donc une inversion totale des normes.

En plus, l’ancienne mandature c’était la droite, la nouvelle la gauche. Le contraire m’aurait pas étonné mais là je tombe des nus car derrière ce marché public, il y a une volonté de casse sociale, je n’en démords pas, je reste ferme là dessus car qu’est ce qui se passe en fait ? Je reprends un peu l’historique : les groupements de sociétés dans lesquelles vous avez des accords salariaux, elles ont fait en sorte de tirer les salariés vers le haut avec des négociations sur le temps de travail, etc. Ç’a été un travail fastidieux et très long. Et là où nous en sommes aujourd’hui à un certain niveau salarial, c’est le résultat d’une quinzaine d’années de combat syndical dans les sociétés présentes (et qui n’ont pas remporté le marché, ndlr).

Dans d’autres sociétés, il n’y a pas de représentativité syndicale, les salariés vont donc négocier individuellement et on sait très bien que quand on négocie individuellement, il y a un écart de salaire sur le même travail. Donc c’est normal qu’en mettant l’accent sur le prix, de facto, le TCO a écarté toutes les sociétés qui avaient des accords salariaux et donc tiré la profession vers le bas. Il est grand temps que le secteur du transport s’assainisse. Il faut cesser le fait que les chauffeurs soient des variables d’ajustement. 

Et au passage, signalons que l’âge limite moyen des bus à La Réunion c’est douze ans. Le TCO l’a ramené à quinze ans. Ce qui fait qu’un bus qui n’est plus valable dans d’autres réseaux scolaires pourra rouler trois ans de plus sur le réseau du TCO, Vous avez vu le relief qu’il y a dans l’ouest ? Ce n’est pas possible. Un bus à quinze ans ne peut pas être dans les mêmes conditions qu’un bus ayant dix ou douze ans. 

La réalisation d’un accord cadre est donc la prochaine étape ?

On va envoyer des courriers dès demain à l’ensemble des interco, à madame la présidente de Région, au Medef. A Mayotte, ils s’y sont pris comme ça sauf qu’ils ont tout brûlé. Nous allons quand même pas en venir à là à La Réunion. 

J’ai dit aux dirigeants que, dorénavant, lorsque vous aurez un appel d’offres dans lequel il n’y a pas un volet social qui est compris, vous nous prévenez tout de suite. M.Séraphin nous avait dit que, « au moment de la publication de l’appel d’offres, vous auriez pu… ». J’ai dit : « oui, excusez du peu, FO Transports existe depuis un an et demi donc ne nous reprochez pas de ne pas être vraiment autant au fait ». On va donc le prendre au mot. La prochaine fois qu’il y aura un appel d’offres, on l’interpellera. 

Vous allez veiller à ce que les 135 chauffeurs aient les meilleures conditions de reprise possibles ?

Malheureusement, ceux-là, comme je l’ai dit, ils se sont sacrifiés pour la branche transport. De part ce mouvement, on arrivera peut-être à sécuriser ceux qui vont arriver demain. Mais malheureusement, les grévistes d’aujourd’hui ne pourront pas en bénéficier. On va essayer de négocier mais seulement à partir du moment où il y a une volonté en face. 

 

Transports scolaires dans l'ouest :

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