Tout commence par un échange d’informations entre les autorités mauriciennes et françaises. Les Mauriciens indiquent qu’un couple est en voyage à la Réunion afin de préparer un envoi important de zamal vers Maurice. Une surveillance est mise en place à leur arrivée et les enquêteurs dessinent peu à peu un organigramme où chacun des prévenus a son rôle. La tête de réseau est un Mauricien qui se nome Yohan F.
À la Réunion, deux branches bien distinctes apparaissent avec Kevin S. qui fait le lien entre elles. Son rôle est de trouver du zamal, de le collecter et de le remettre à ses contacts à Maurice. À ce titre, il trouve deux producteurs, Dany T. et Laval V. Si le premier est fiable et capable de produire en quantité, le second apparait peu fiable en raison de son addiction à l’alcool. C’est la première branche. Kevin S. entre ensuite en contact avec David S. et Emilie R. qui sont en couple. Il doit se faire livrer des quantités importantes de zamal comme en attestent leurs communications tracées par les inspecteurs. Ils représentent la seconde branche du réseau.
Interpellations et perquisitions
Une fois tout ce petit monde identifié et surveillé pendant plusieurs mois – de janvier 2022 au 11 octobre 2022 – les gendarmes, sous l’impulsion de l’OFAST, procèdent aux interpellations ainsi qu’aux perquisitions chez chacun d’entre eux. 211 pieds en cours de culture, 33 pieds séchés et 4050€ en espèce sont retrouvés chez Dany T. Une balance de précision, un peson et 11kg d’herbe séchées, trouvées chez David S. Chez Laval V., sont retrouvés 2,5 kg d’herbes. Deux bateaux, deux canoës et deux gilets sont saisis. Seul le couple s’en sort quelque peu avec « seulement » 2g retrouvés et 98 sachets de conditionnement saisis.
Chacun passe à la barre tout à tour afin de s’expliquer sur son rôle. La jeune femme de 25 ans semble ne pas chercher à se dédouaner, n’épargnant pas le rôle établi de son conjoint David S. déjà en instance de jugement pour des faits identiques en décembre prochain alors qu’il est sous contrôle judiciaire. Idem pour Dany T., qui ne peut nier l’évidence des quelque 244 pieds retrouvés chez lui. Même s’ils prétendent ne pas se connaitre compte tenu des peines encourues par la prévention, les écoutes et les messages prouvent clairement le contraire.
« Nous distinguons deux branches séparées avec une personne commune »
Après avoir établi le rôle de chacun, la procureure requiert de lourdes peines, voire très lourdes : « Nous distinguons deux branches séparées avec une personne commune venant de l’île Maurice. Ensuite, chacun entre scène afin de lui assurer des livraisons importantes afin de les exporter. Je requiers 3 ans de prison à l’encontre de Dany T. et 5000€ d’amende, 5 ans de prison à l’encontre de David S. et 5000€ d’amende, 2 ans de prison avec sursis probatoire à l’encontre d’Emilie R., 6 ans de prison à l’encontre de Kevin S. qui est à l’origine de ce trafic et 5 ans de prison à l’encontre de Laval V et 5000€ d’amende. Je vous demande de les maintenir en détention ».
Les trois avocats tentent de démonter l’idée qu’ils se connaissent afin d’obtenir la relaxe pour l’association de malfaiteurs. « Ils ne se connaissent pas et il n’y a pas de preuve sur la prévention de consommation de stupéfiants même si la détention, la cession et l’usage sont clairement caractérisés. Il convient de resituer les choses dans leur contexte, le zamal pousse à La Réunion partout comme du chiendent. Les peines sont absolument énormes au regard des faits. Vous devez tenir compte du parcours de chacun pour les juger« , plaident les avocats de la défense.
Le tribunal condamnera les cinq prévenus. David S. et Kevin S. à 4 ans de prison, Dany T. et Laval V à 3 ans de prison. Emilie R. est condamnée à 2 ans de prison avec sursis simple. Pour les peines fermes, les quatre prévenus sont maintenus en détention et devront s’acquitter de 5000€ d’amende chacun.