La CAF tient à avoir sa livre de chair fraîche et plus c’est facile, meilleur est le gibier. La nausée…
« i[C’est un peu trop facile, a asséné son représentant à la barre. Beaucoup de femmes sont soi-disant seules]i ».
Tout ça pour qui ? Al Capone ? Un ex-ministre mauvais payeur ? Un parti politique tricheur ? Même pas. Pour une jeune femme, 25 ans mais en paraissant 18, timide, effacée devant ses juges. Marie se demande ce qu’elle fait là. Nous aussi tant cette pathétique histoire est simple et navrante.
Depuis 2001, elle est séparée du père de leurs deux enfants. Devant le JAF (juge des affaires familiales), un accord a été conclu : l’homme laissait la maison à la maman et leurs deux enfants, en échange de quoi, faiblement argenté, handicapé de surcroît, il est dispensé de pension alimentaire. Madame sollicitera et recevra légitimement les différentes allocations qui lui sont dues. Ca choque qui ? La CAF.
Un jour de pluie où il s’ennuyait, un zélé fonctionnaire de la Caisse ouvre le dossier de Marie et débusque la fraude du siècle. Marie et son ex ont une adresse commune ; le courrier de monsieur est adressé chez madame ; le compte eau-électricité est commun (la maison est à lui mais broutille que ceci) ; outrage de chez outrage, aucun jugement de versement de pension n’a été délivré contre le papa. Pour graisser le compte, on découvre que la jeune femme utilise un véhicule dont la carte grise est au nom de son ex. Oh ! la ! la !
Son sang ne faisant qu’un tour, la CAF met en branle ses plus fins limiers, à charge pour eux de traquer la redoutable délinquante dans les moindres recoins.
Lors d’un contrôle inopiné (ils le sont toujours), on trouve l’ex copain en train d’effectuer quelques réparations dans la maison de ses enfants et de leur maman. Ah ! Vous voyez bien. Il fait des travaux ? C’est la preuve qu’il habite ici. Oui… mais…
La CAF a vraiment soulevé tous les lièvres de la planète dans sa quête obstinée d’une coupable : l’ANPE, les impôts (qui n’ont rien contre une sans boulot), la poste, EDF, les Restos du Coeur et les Chiffonniers d’Emaüs, que sais-je ! Pour prouver qu’une dangereuse délinquante creusait à elle seule le trou de la Sécu. Scrogneugneu ! On allait voir ce qu’on allait voir. Alloc’ sucrées, plaintes au pénal, ah mais !
Oui… mais…, disais-je plus haut. Si le courrier de monsieur est adressé chez madame, c’est que monsieur, malgré son handicap, entretient un gîte en bas-là-bas, au fond de Grand-Bassin. Et qu’on n’a jamais vu un facteur aller y distribuer le courrier. Donc le sien va chez la maman de ses enfants à Plaine-des-cafres.
Les réparations ? Ben oui. Monsieur aime toujours madame et leurs enfants. Alors, il améliore comme il peut, malgré son handicap, leurs conditions d’existence. Moi qui ai déjà du mal à planter un clou sans le tordre et m’exploser l’index, je lui vote des félicitations. Mais pas la CAF.
Les prestations familiales ont été sucrées en 2012, pour leur apprendre à vivre. En attendant le jugement. Heureusement que la peine de mort n’existe plus !
Le procureur Saunier, admettant que la fraude « parent isolé » est courante, comprend les détresses humaines et ne s’acharne pas en comprenant les difficultés de chacun, bien que le représentant de la CAF se soit égosillé sur les dommages causés à la société. Il a juste demandé une amende avec sursis.
Me Germand-Robert n’a eu aucun mal à remettre les choses à leur juste place et quelque peu assaisonné la CAF « i[qui a mal fait son travail ; il n’y a même pas eu une enquête de voisinage ! Nous réfutons ces conclusions hâtives]i ». Prends ça po toué !
Marie s’en tire avec une amende de 2000 euros avec sursis.
On l’aura compris, à la lecture de ce compte-rendu (dont j’assume l’entière responsabilité), que les stupidités administratives nous préoccuperont encore longtemps. Courteline pas mort ! De vraies fraudes existent. Des familles entières portant le même nom, 10, 12 personnes bénéficient de quelque 6 à 8000 euros de prestations sociales, parfois plus.
La CAF juge plus simple, pour quelques centaines d’euros, de chasser à courre une femme sans travail, sans espoir d’en trouver, avec deux enfants à nourrir et un ex handicapé parce qu’il n’y a pas de facteur à Grand-Bassin.
Raconte ça à un cheval de bois et il te fout une ruade. Là, j’ai vraiment les boules !