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St-Denis : Le Petit Marché sous le contrôle d’une « mafia » ?

"Tout le monde est en train de crever dans ce marché". Entre travail illégal, menaces, intimidation et favoritisme présumés, les bazardiers racontent survivre tant bien que mal au Petit Marché de Saint-Denis. Situé dans le bas de la rue Maréchal Leclerc, dans ce coin du centre-ville laissé à l’abandon, le marché couvert semble abriter une "mafia" avec notamment des commerçants peu scrupuleux qui imposeraient leur règne par la terreur.

Ecrit par zinfos974 – le vendredi 16 août 2019 à 17H19

« J’ai envie de jeter l’éponge, mais j’aime trop mon métier », nous confie un bazardier du Petit marché. Comme lui, ils sont un peu moins d’une dizaine à nous faire part des conditions de travail devenues insupportables à l’angle de la rue Sainte-Anne et de la rue des Limites.
 
Si l’atmosphère s’est clairement dégradée, c’est d’abord à cause de la cinquantaine de travailleurs non déclarés, employés par certains commerçants peu scrupuleux, et qui règnent en maîtres sur les lieux depuis quelques années, selon nos témoins.
 
En plus de la concurrence déloyale qu’ils représentent, c’est leur grand nombre, constitué parfois de familles entières, qui crée le chaos dans le marché : « Ils nous manquent de respect, nous insultent, se baladent torse nu, et laissent jouer leurs enfants dans les allées. Si on se plaint, ils viennent la nuit vandaliser et voler dans nos stands », raconte une bazardière exaspérée, et ses collègues confirment.
 
« Dans certains box, ils sont plus d’une vingtaine. Ils mettent la musique à fond dans des enceintes bluetooth, avec des chansons vulgaires qui font fuir les touristes « .

 

Des nuisances quotidiennes
 
Cinquante travailleurs, cela veut dire au moins autant de véhicules à stationner dans le parking réservé aux commerçants : « On ne peut plus se garer, les camions qui doivent nous livrer ne peuvent même plus accéder au marché. Ils profitent aussi de la bouche d’incendie pour laver leurs dizaines de voitures« , explique une deuxième commerçante.
 
Ces familles auraient également installé une bouteille de gaz pour cuisiner, une installation évidemment interdite qui représente un vrai danger au sein du marché couvert.

Sans parler des déchets abandonnés à même le sol : fruits pourris, épluchures de légumes, eaux croupies des bacs à fleurs, qui attirent les rats et les moustiques, et ont déjà provoqué des accidents : plusieurs clients auraient glissé sur les détritus et se seraient cassé la figure sous les yeux des bazardiers.

 

 

Des régisseurs fantômes …
 
Mais le Petit Marché n’est pas complètement livré à lui-même. Du moins sur le papier. Trois régisseurs ont été embauchés par la mairie pour faire respecter l’ordre dans ce lieu public. « Des gros bras qu’on ne voit jamais et qui ne font rien. Quand on leur signale les nuisances, ils disent qu’ils ne peuvent rien faire. À quoi servent-ils alors ? » demandent les commerçants que nous avons rencontrés.
 
Sur place, nous avons pu observer le manège de l’un d’entre eux : il arrive à 14h comme l’exigent ses horaires, fait le tour pour montrer sa présence avant de disparaître des lieux.

 

… et un responsable jugé tyrannique
 
Ces régisseurs travaillent sous les ordres d’un certain Papa Diop, responsable du pôle gestion du domaine économique, chargé d’assurer la bonne gestion du Petit Marché et du Grand Marché. [Nous avions déjà évoqué son embauche suspecte au sein de la maire de Saint-Denis en août 2016]urlblank:https://www.zinfos974.com/Un-drole-de-bonhomme-deambule-dans-les-couloirs-de-la-mairie-de-St-Denis_a104161.html , alors que selon nos informations, il dépassait l’âge limite pour être recruté par une commune. Sur ce point, la mairie de Saint-Denis n’a pas répondu à nos questions. 
 
« L’année dernière, il nous avait promis qu’il remettrait de l’ordre dans le Petit Marché. Aujourd’hui, il nous hurle dessus lorsqu’on lui demande ce qu’il en est », explique une des vendeuses.
 
« Avec ses airs supérieurs, il menace de ne pas renouveler nos baux précaires si on ouvre trop notre bouche. Parfois ils envoient leurs « clients » nous dire « bientôt ton box sera à moi ! » On a peur, alors on subit ».
 
Qui sont ces « clients » dont parlent les forains ? De mystérieuses personnes qui accompagnent parfois M. Diop dans ses allées et venues au Petit Marché, et qui auraient en tête de s’y faire une place.
 
« Ce harcèlement qu’on subit, c’est pour nous inciter à quitter le Petit Marché. Trois bazardiers sont déjà partis cette année. Tout ça pour faire de la place pour ses « clients » » , expliquent-ils. « Je vois un défilé d’agents de la mairie et d’élus dans le box qui se trouve en face du mien. Je me demande bien ce qu’il s’y passe… »
 
Certains bazardiers ainsi que d’autres sources évoquent même des distributions d' »enveloppes« , sans que nous ayons pu vérifier cette information. Une observation surprenante puisque, comme le confirme la mairie, seul les régisseurs sont habilités à récupérer les loyers des commerçants. Que vient donc faire M.Diop sur les lieux ?

 

Des dizaines de courriers sans réponses
 
Les bazardiers que nous avons rencontrés ont dénoncé ce qu’ils subissent à de multiples reprises. Des dizaines de lettres ont été envoyées à Philippe Naillet, conseiller municipal, qui aurait renvoyé la balle du côté de l’inspection du travail. Un inspecteur se serait d’ailleurs rendu sur place au mois de mai dernier, mais depuis, pas de nouvelles : « Ça fait plus de 15 ans qu’on se plaint et qu’on envoie des lettres partout », s’exclame une commerçante très en colère.
 
La mairie confirme avoir reçu plusieurs courriers adressés à la direction Economie de Proximité, parfois de façon anonyme : « Parmi les doléances, il y a des conflits entre commerçants, sur d’autres bases que professionnelles, qui perdurent depuis longtemps malgré des interventions répétées de l’équipe de la Mairie pour essayer de calmer une situation qui encore une fois est de nature privée. »

Les forains exaspérés ont également écrit au procureur, à la caisse d’allocations familiales, ainsi qu’au préfet de La Réunion. Mais ce dernier courrier est finalement arrivé jusqu’aux mains de M. Diop, ce qui a valu aux marchants une nouvelle pluie de hurlements et de menaces.

 

De son côté, la municipalité explique que le nettoyage du site est assuré par un prestataire depuis 2017, « qui a inclus dans son marché une inspection régulière du lieu faisant l’objet de compte rendu d’intervention ».

Elle reconnaît que des problèmes de propreté peuvent perdurer dû notamment à l’utilisation massive des toilettes publiques de Petit Marché par les passagers des bus Citalis, dont l’un des arrêts les plus fréquentés se trouve à proximité. « Nous échangeons en ce moment avec nos partenaires de la Sodiparc afin de trouver des solutions comme la mise en place de toilettes spécifiques à proximité des arrêts de bus » indique la mairie.

 

 

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