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Saint-Leu : L’ophtalmo remplaçant adepte de la strangulation sur ses patientes

C’est dans ses remplacements au sein d’un cabinet privé que le docteur Maxence LaPeyre a bafoué son serment d’Hippocrate et a violenté 12 de ses patientes. Alors qu’elles venaient logiquement le voir pour des soucis oculaires, le jeune médecin a exercé des pressions sur leur cou jusqu’à leur couper la respiration. Il a été jugé devant le tribunal correctionnel de Saint-Pierre ce jeudi.

Ecrit par 376508 – le vendredi 28 avril 2023 à 13H28

La séance commençait parfois de manière tout à fait habituelle pour un rendez-vous chez l’ophtalmologiste et parfois le docteur disait dès le début déceler un problème de posture chez la patiente. En effet, le jeune médecin n’a pratiqué de gestes de strangulation que sur des femmes de 16 à 50 ans.

Prétextant un problème de posture qui pourrait avoir des répercussions sur la vue, il apposait ses mains sur la nuque, massait le cou et finissait par appuyer de part et d’autre de la trachée des patientes suffisamment fort pour leur faire mal mais heureusement pas assez pour provoquer l’évanouissement, l’asphyxie ou la mort. Pour légitimer ses gestes et obtenir, quand il le demandait, l’accord des patientes, il enrobait le tout d’un verbiage à consonance médicale, parlant tantôt d’une formation suivie aux Etats-Unis, au Canada, d’études de la médecine chinoise ou indienne et même d’une étude en cours au CHU de La Réunion. A son arrivée sur l’île, le jeune docteur avait effectivement pris la tête du service d’ophtalmologie au CHU Sud et officiait à l’occasion en remplacement dans un cabinet de Saint-Leu.

Reste que manipuler une patiente en ophtalmologie ne se fait que très rarement et que le docteur Lapeyre a aussi utilisé pour étrangler ses patientes un cordon de chargeur de téléphone et une fois la propre chaîne de l’une des victimes.

Maxence Lapeyre demandait également à la patiente de filmer ou photographier la séance de strangulation à des fins pédagogiques, assurait-il, en cas de publication. Là encore, la pratique est d’ordinaire peu courante.

De plus, quelques heures après la séance, le médecin envoyait des mails avec son adresse personnelle pour savoir si elles avaient apprécié et étaient d’accord pour une nouvelle « petite séance « .

Une première alerte en 2017

L’enquête a débuté avec la plainte d’une patiente de 17 ans. Le docteur a été placé en garde à vue le 24 août 2020. Des vidéos et photos des séances d’étranglement ont été retrouvées dans son téléphone et les perquisitions ont également révélé que le médecin de 33 ans avait consulté des sites pornographiques en lien avec de l‘ »asphyxie érotique ». Dans la sphère privée, sa femme, avec qui le divorce a depuis été prononcé, a confié ne pas avoir eu vent de pratiques de ce genre.

Une première alerte avait pourtant été lancée en 2017 par trois internes alors que lui-même faisait ses études à Bordeaux. Le projet de mise en garde solennel n’avait pas abouti faute de preuve.

Les pressions exercées par Maxence Lapeyre ne laissent effectivement pas de trace, expliquant l’absence de jours d’ITT pour les victimes mises à part celles liées au choc post-traumatique.

 

Le prévenu souffre de TOC 

Durant l’enquête, au pied du mur, le trentenaire a finalement admis avoir un trouble sexuel lié à la scène du film Quasimodo, dans lequel Esmeralda est morte pendue. Sa fascination morbide et perverse pour le cou des femmes prendrait source dans cette scène. C’est ce qui ressort en tout cas du travail d’analyse mené à son initiative avec le docteur Pascal De Sutter. Le docteur en psychologie, sexologue, écrivain, connu également pour son expertise dans l’émission « Mariés au premier regard » a fait le voyage à La Réunion en tant que témoin de la défense pour l’expliquer au prétoire. Son patient souffre ainsi de « TOC, trouble obsessionnel compulsif intello-sexuel ».

« Je ne voulais pas être cette personne. J’ai accumulé les mensonges pour ne pas voir ce trouble que j’ai depuis petit », confie Maxence Lapeyre en triturant le bord de sa chemise blanche. Le médecin conteste l’intention de blesser mais explique « son besoin de contrôle » alors qu’il travaillait à des cadences intenables.

Cauchemars, crises de panique, flash-back… Les victimes témoignent à la barre des conséquences encore pesantes sur leur vie quotidienne. Certaines se sont vu mourir lors de ces consultations avec le docteur Lapeyre. « Elle a placé sa santé entre les mains du docteur et elle a reçu de la souffrance », lance Me Ghislain Chung To Sang en soutien d’une jeune victime.

« Quand on entre dans un corps, on prête serment , tous les jours ce serment résonne au fond de nous », fait le parallèle entre blouse blanche et robe noire Me Nathalie Pothin pour la partie civile. La confiance a été abusée et le serment d’Hippocrate a ici été rompu. « Son intelligence est mise au service de sa propre personne pour s’en sortir dans ce dossier ».

S’estimant guéri avec l’aval de son psychologue, Maxence Lapeyre espère pouvoir échapper à l’interdiction d’exercer. Aujourd’hui, il est de retour dans l’Hexagone et espère pouvoir se reconstruire professionnellement. Durant son contrôle judiciaire, il avait pu ainsi continuer à exercer dans les murs du CHU jusqu’à la fin de son contrat à la fin octobre 2021.

L’absence de l’Ordre des médecins pose questions dans cette affaire. Constitué un temps partie civile, l’Ordre se serait rétracté selon les victimes.

Des violences avec arme « plusieurs fois dans la même journée »

A l’instar des parties civiles, le parquet s’est également posé la question de la réelle empathie dont pouvait faire preuve le prévenu 3 ans après les faits et retient qu’« il s’est appuyé sur son aura de médecin pour satisfaire ses tendances déviantes ». 5 ans de prison dont 2 avec sursis probatoire, l’obligation de suivre des soins, d’indemniser les victimes et l’interdiction d’exercer durant 5 ans ont été requis par la représentante de la société. « A chaque remplacement c’est arrivé et parfois plusieurs fois dans la même journée », tance-t-elle.

« 2 ans et demi d’enquête et aucun magistrat n’a estimé qu’il fallait l’écarter de la société », s’offusque pour la défense Me Jean-Pierre Gauthier. Si l’infraction sexuelle n’a finalement pas été retenue « c’est parce qu’il n’y a pas eu le début d’un geste en ce sens », précise l’avocat.

Les arguments de la robe noire ont été entendus. Le docteur Maxence Lapeyre échappe à la prison et à l’interdiction d’exercer. Sa condamnation à 4 ans de prison totalement assortis d’un sursis probatoire ne sera pas inscrite au bulletin N°2 de son casier jusque-là vierge. Le tribunal a pris en considération « l’absence d’incident durant son contrôle judiciaire ».

Ont également été prononcés l’obligation de soins, de régler les amendes contraventionnelles et de payer les indemnités de dommages et intérêts des parties civiles. Ces dernières feront part de leurs demandes lors d’une audience spéciale prochainement. Seule l’une des victimes qui avait déjà formulé sa requête a obtenu 3.000 euros de préjudice moral.

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