« C’est plus que de la folie, c’est la folie totale ! Les gens font n’importe quoi. On dit que c’est la crise mais les clients achètent des consignes avec des pleins d’essence, c’est de l’argent. Et tout ça pour gagner 7 euros« , explique Joëlle, gérante d’une station-service Engen à Saint-Denis. Tous les jours, cette gérante se retrouve avec des clients devant son pas de porte, attendant la livraison de gaz de la journée. « Les clients font la queue devant le casier de gaz. On a même pas fini de faire la livraison qu’ils veulent nous en acheter« , ajoute-t-elle.
Face à cette situation de rupture de stock permanente, les clients grondent et pensent que les gérants ne vendent pas, uniquement pour faire plus de bénéfices après le passage de la bouteille à 22 euros. « Ils nous jurent en disant que nous faisons des réserves pour gagner des bénéfices sur leur tête. Mais nous n’avons pas d’intérêt à garder les bouteilles de gaz. C’est la crise, on a besoin de faire de la trésorerie. C’est une aubaine pour nous de vendre autant de bouteilles de gaz. Ce n’est pas facile aussi pour les gérants de stations-service. Nous aussi on subit la crise et on ne va pas s’amuser à faire dormir les bouteilles de gaz dans les casiers« , précise Joëlle.
150 bouteilles de gaz vendues par jour
Ce matin à 10 heures, il n’y a déjà plus de gaz. Mais l’achat devient presque compulsif pour certains clients. « En moyenne, sur une semaine on vend entre 40 et 50 bouteilles de gaz. Mais en ce moment, dans une seule journée on vend près de 150 bouteilles de gaz« , lâche la gérante d’Engen. Des clients repartent avec deux ou trois bouteilles de gaz. Pour pallier à la demande, sa station-service est livrée deux fois par jour, ce qui n’empêche malheureusement pas les ruptures en fin de journée.
Autre conséquence avec cette flambée d’achat, la couleur de la bouteille de gaz. Si, dans la station Engen, il n’y a pas de problème pour venir avec une bouteille rouge, jaune ou encore bleue, la donne n’est pas la même dans toutes les stations de l’île. « Sur les couleurs de bouteilles, les pétroliers ont signé avec certaines enseignes une obligation de prendre telle ou telle couleur. Ils ont une obligation d’acheter avec leur pétrolier« , explique-t-elle. Une situation qui n’est pas nouvelle et existe depuis des années. « Les clients ne comprennent. Ils viennent chez vous pour la remplacer. Ici je prends toutes les couleurs mais ce n’est pas le cas des autres stations. Les gens ne s’en sont jamais rendus compte car avant il n’y avait pas de rupture« , conclut-elle.
Le boom des ventes de bouteilles de gaz arrive à sa fin. Dès demain, elle sera revenue à un prix normal, passant de 15 euros à 22 euros, et pas sûr que les clients se bousculent dans les stations à peine la livraison de gaz terminée…