Depuis plusieurs semaines, Mayotte subit un manque cruel d'eau dans le Sud dû à une incapacité d'anticiper une sécheresse importante.
Il faut savoir que Mayotte connait un déséquilibre assez flagrant en matière de production et de distribution d'eau :
- l'armée a une station de dé-salement d'eau de mer pour ses besoins propres en Petite Terre
- une grosse station de dé-salement pour produire de l'eau potable pour les habitants de Petite Terre
- une grosse retenue d'eau de pluie et de forage au Nord pour la population du Nord et de l'Est
- une autre grosse retenue au Centre pour desservir les habitants de l'Ouest et le Sud.
Le tout étant plus ou moins interconnecté, sauf la structure de l'armée qui reste indépendante.
Il existe un projet de troisième retenue au Centre-Est depuis des dizaines d'années mais aucune majorité du Conseil Départemental et aucun Préfet ne se sont mobilisés pour faire de cette infrastructure une priorité absolue. D'autant que ces sites de production d'eau potable ont été conçus pour un équivalent 300.000 habitants. Or, les chiffres officiels font état d'environ 200.000 habitants (avec 85.000 étrangers selon l'Insee en 2016) alors que les chiffres officieux sont plus proches de 350 000 habitants au minimum : l'immigration anjouanaise et un peu malgache est passée par là!
Cette sécheresse est telle que depuis quelques semaines, le Sud est soumis à un régime sec : distribution de l'eau 1 jour sur 3, en fonction des communes. Les habitants de Chirongui, de Boueni, de Kani-Kéli, de Bandrélé, de Dembéni, de Ouangani et de Sada sont obligés de vivre au rythme des restrictions.
Malgré la création d'un "Comité de lutte contre la pénurie d'eau à Mayotte" mené par Anchya Bamana, maire de Sada et Ousseni Balahachi, secrétaire départemental de la CFDT, la population ne se mobilise pas trop pour l'instant. Mais jusqu'à quand? Si la manifestation organisée par le comité le 02 février, à Mamoudzou place de la République, a rassemblé moins de 200 personnes, l'échec de la Préfecture de tenir une promesse de faire venir un tanker d'eau potable ainsi que le peu d'eau distribué par les communes pour remplir les citernes à installer dans les écoles qui ne fonctionnent pas correctement, risque de changer la donne.
La restriction risquant de s'étendre à la population du Nord, et les acteurs économiques (notamment du bâtiment et des travaux publics) commençant à trouver le temps long car ne pouvant plus faire de béton par décision préfectorale, il n'est pas sûr que Mayotte ne connaisse pas une fronde généralisée.
En attendant, les pluies générées indirectement sur Mayotte par le cyclone Carlos qui a touché à 2.000 km La Réunion vont apporter un peu d'accalmie : si les réserves sont suffisantes pour affronter les deux semaines de sécheresse prévues encore par Météo France avant les pluies normales de début mars, il n' y aura rien.
Mais si les restrictions s'étendent à toute l'île, la colère s'étendra à toute l'île. Et on peut parier qu'un candidat aux législatives fera monter la mayonnaise à un point de rupture pour se faire élire en juin. Comme en 2011 lors des grèves contre la vie chère...
Omar M'déré