Le monde hospitalier réunionnais est en ébullition. Les « Rencontres hospitalières » qui commencent aujourd’hui pour trois jours sont l’occasion de mettre sur la table les sujets brûlants du secteur. A commencer par l’arlésienne de l’Ouest : le Pôle Sanitaire. Un hôte de marque assiste d’ailleurs à ses rencontres : il s’agit de Gérard Vincent, le délégué national de la Fédération Hospitalière de France (FHF). Très vite, celui-ci invite l’auditoire réunionnais à ne pas se sentir défavorisé par rapport à la qualité des soins délivrés dans l’Hexagone.
« La situation des hôpitaux ici est très comparable à ce qui se fait en métropole et je ne le dit pas pour faire plaisir », annonce-t-il d’entrée. Il concède, puisque cette conférence de presse se déroulait aujourd’hui dans les murs de l’ancien centre psychiatrique de Saint-Paul, « l’exiguïté des locaux comme à l’hôpital de Saint-Paul ». Pour le reste, « la Réunion rivalise. »
C’est son équivalent local, Patrick Gras, le délégué de la FHF Océan Indien, qui a la lourde tâche de livrer les dernières nouvelles sur l’avancée du dossier brûlant du Pôle Sanitaire Ouest. « Notre dossier suit le processus normal », explique-t-il, avant de se mouiller un peu: « La décision d’arbitrage est, à ce que j’en sais, suspendue à la décision du gouvernement ». Rappelons que pour qu’un centre hospitalier flambant neuf sorte de terre sur les hauteurs de Grand Pourpier Cambaie, l’Etat doit mettre sur la table 70 millions d’euros sur les 140 du projet. « Les arbitrages devraient intervenir dans les prochaines semaines », annonce-t-on timidement dans les couloirs de la direction du CHU. Une prudence légitime tant le dossier a connu des soubresauts. Huguette Bello pourrait en témoigner.
« Si tous les médecins partent s’installer sur la côte d’Azur ça ne va pas aller »
Même s’il constitue un menu consistant, le PSO n’élude pas pour autant le travail de pression sur le gouvernement que ne cache pas la FHF. « En tant que défenseur de l’hôpital public, la FHF défend le service public pour la pérennisation de soins de qualité, accessibles de tous, tant financièrement que géographiquement », affirme Gérard Vincent, pour qui le travail de l’hôpital public ne peut se lire qu’à travers le prisme de la simple valeur marchande. « Quand les actionnaires d’un établissement privé disent : on arrête de financer, l’établissement ferme. Ce n’est pas le cas de l’hôpital public », précise-t-il. Vieille de 87 ans, la FHF regroupe ainsi la quasi totalité des hôpitaux publics français et reste le partenaire naturel des gouvernants successifs.
« Le travail de lobbying, dans le bon sens du terme », dit-il , est d’autant plus nécessaire « dans un contexte de restriction budgétaire ». On apprendra de la bouche du délégué national de la Fédération Hospitalière de France que le budget national consacré à l’offre public de soins est le double de celui alloué à la Défense nationale. Tout un symbole.
Au-delà des satisfactions, il rappelle que l’amoncellement des difficultés obligera l’hôpital public à être encore plus inventif et responsable. La première des difficultés pointe déjà le bout de son nez : « nous avons de plus en plus de difficultés d’accès au crédit bancaire », avoue-t-il. Or, un hôpital qui n’investit plus, c’est un hôpital qui se meurt. Enfin, le patron national de la FHF n’a pas tenté d’esquiver la question de la répartition géographique des médecins.
Aujourd’hui, aucune circulaire ne les contraint à s’installer dans un territoire déserté en offres médicales. « Si tous les médecins partent s’installer sur la côte d’Azur ça ne va pas aller », d’où cette petite phrase qui ne manquera pas d’être débattue demain et vendredi à Saint-Gilles : « Il faudra bien, un jour, réguler l’installation sur le territoire des médecins ». Car une population éloignée de son médecin de proximité, c’est (trop) souvent une population qui « finit par se diriger vers les urgences pour de la bobologie. »