L’audience d’aujourd’hui a été marquée par l’étude des personnalités avec d’entrée de jeu, celle de Guillaume Maillot, accusé de complicité lors du premier enlèvement d’Alexandre en juillet 2007. Appelé à la barre, le jeune homme s’est présenté comme « homme nouveau, réinséré par le travail » car « plus sous l’influence de Juliano et du groupe ». Les experts psychologue et psychiatre qui l’ont examiné lors de son incarcération ont décrit un garçon « aveuglé par sa foi ».
Des conclusions qui permettent de le voir sous un autre jour, celui sous lequel il était à l’époque des faits, ou peu de temps après. « C’est un adepte actif, un collaborateur sous influence mais qui parallèlement, influence également. C’est une relation d’interdépendance. Il pense qu’il est chargé d’une mission, alors on lui confie la possibilité d’avoir un rôle dans le groupe et dans l’affaire ».
Une relation de dépendance mutuelle confirmée par l’expert psychiatre qui ajoutera : « Son discernement a été altéré par un excès de foi. J’entends par là que sa conviction religieuse était telle qu’il était à la limite du fanatisme, de l’intégrisme ».
Sa conclusion sera rattrapée à la volée par Me Jean-Jacques Morel, avocat de Guillaume Maillot qui laisse entrevoir là l’axe de sa plaidoirie à venir: l’altération du discernement comme circonstance atténuante.
Mgr Aubry malmené à la barre
Le plus gros chapitre de cette matinée d’audience reste inévitablement l’étude de la personnalité de Juliano Verbard lui même. L’enquêteur de personnalité a livré des éléments de sa biographie : enfant très pieux, d’un bon niveau intellectuel, qui a longtemps vécu avec sa grand-mère et qui n’a jamais travaillé. Homosexuel, le jeune homme a très tôt souhaité prendre la soutane mais, au vu de son charisme et de ses propos déviants, il s’est fait écarter des différents groupes de prière auxquels il était rattaché jusque là.
Afin de cerner un peu mieux le personnage et comprendre ses convictions, Mgr Gilbert Aubry a été appelé à témoigner. Dès le début de sa déposition, l’évêque de la Réunion a souhaité rappeler que sa présence s’inscrivait « dans le cadre de la laïcité » avant d’évoquer l’article 1 de la loi concernant « la séparation de l’Eglise et de l’état ».
Dans son exposé, l’homme d’église a détaillé la chronologie des moments où il a eu à faire à Juliano Verbard, que ce soit physiquement lors de rencontres formelles, à l’occasion d’échanges épistolaires avec ce dernier ou lorsqu’il devait intervenir à son sujet (dans les médias notamment).
Il s’est longuement expliqué sur les apparitions, sujet de discorde avec l’accusé et qui sont la base de la création du « Coeur Douloureux et Immaculé de Marie ». « La reconnaissance officielle de tels faits relève d’un processus qui dure plusieurs années. Le comportement religieux ne peut pas se passer de la logique ».
Le Droit Canon pour appuyer l’attaque
Récupérant l »information, Me Nicolas Normand, conseil de Juliano Verbard, rebondit : « Vous avez reconnu la Vierge de l’Eucharistie (ndlr: statue qui exsudait de l’huile et à laquelle les membres du groupe vouaient un culte) comme étant un phénomène inexpliqué car les différentes analyses ont montré qu’il n’y avait aucune supercherie. En retirant cette statue, vous avez fermé la porte sur ce phénomène sans rien expliquer à ce groupe qui finalement s’est posé des questions et se sont mis en marge de la société en raison de leur foi ».
L’avocat a lu un article du Droit Canon pour compléter son attaque: « Il est permis à tout catholique de se rendre sur les lieux d’apparitions reconnues ou non, dans le respect de la foi et des bonnes mœurs ».
Pour les frères Daleton, Me Djalil Gangate a poursuivi: « Vous avez mis à la retraite un prêtre de Saint-Joseph qui défiait votre autorité en disant qu’il était nécessaire de vénérer cette statue. Vous ne pensez pas que ce conflit ait eu une influence sur le comportement du groupe? » Déstabilisé, Mgr Gilbert Aubry a simplement répondu « ça se peut ».
L’audience a repris a 14h45.