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Pour une vraie continuité territoriale de l’Etat

Quelques évidences préalables à prendre en considération : Aucune réelle politique publique maîtrisée des transports tant aériens que maritimes n’existe à la Réunion. Non seulement, dans un secteur de l’économie d’une région insulaire, les TRANSPORTS, pour laquelle une politique est un élément essentiel pour un développement économique exogène générateur de ressources, il n’existe aucun pilote […]

Ecrit par jonathan – le jeudi 06 novembre 2008 à 06H44

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Quelques évidences préalables à prendre en considération :

Aucune réelle politique publique maîtrisée des transports tant aériens que maritimes n’existe à la Réunion. Non seulement, dans un secteur de l’économie d’une région insulaire, les TRANSPORTS, pour laquelle une politique est un élément essentiel pour un développement économique exogène générateur de ressources, il n’existe aucun pilote dans l’avion, mais il n’existe même pas de cabine de pilotage. Aucune entité représentative de l’intérêt général et susceptible de concevoir, d’organiser, de coordonner, de rationaliser avec l’ensemble des opérateurs, des acteurs et des bénéficiaires une politique des transports et des déplacements des biens et des personnes n’existe à ce jour à la Réunion. Dans ce contexte de la société réunionnaise, chacun des opérateurs aériens ou maritimes est libre de faire ce qui lui semble BON et BIEN POUR LUI, y compris par des ententes de fait, en ne tenant que très secondairement compte de ce qu’attendent ou de ce dont ont besoin ses « clients » puisqu’ils sont captifs et que leurs représentants élus, tant locaux que nationaux, et que les Pouvoirs Publics, n’interviennent pratiquement pas, au nom de l’intérêt général qu’ils sont pourtant censés représenter. Pour l’aérien, déterminant du fait de l’insularité et des distances, les opérateurs ont comme devise commune, véritables renards dans le lucratif poulailler réunionnais, « ne jamais tuer la poule aux œufs d’or d’une clientèle captive qui nous est si généreusement offerte », et ce d’autant plus que les financeurs publics de toutes natures d’une part ne remettent pas en cause cet état de fait et que d’autre part une minorité réunionnaise prospère possède les moyens pécuniaires de financer ces rentes de situation grâce à la solidarité de la Nation et de l’Europe, si bonnes filles à leur égard.

Poser le problème des transports aériens passagers et le régler nécessite de distinguer deux types de clientèle : la clientèle publique financée par l’argent public et la clientèle privée financée par les particuliers. Dans le cadre d’une saine gestion des deniers publics de toutes natures, les clients publics ne devraient jamais accepter de payer n’importe quels prix leurs billets tout comme les assurés sociaux, dont la SS et les mutuelles assurent le remboursement, ne peuvent accepter de payer n’importe quels prix leurs consultations de généralistes ou leur forfait journalier hospitalier public. Aujourd’hui aucun ordonnateur de dépenses publiques ne devrait accepter de payer des billets à « des prix invraisemblables ». Dans le cadre des congés bonifiés de fonctionnaires, nous voyons l’Education nationale payer 1400 € ou plus un billet qui sur le marché peut se trouver à 800 €!!! L’ordonnateur dans ce cas là n’est-il pas malhonnête et ne devrait-il pas être poursuivi et contraint à payer de ses deniers personnels cette escroquerie de 600 € qu’il fait subir à son administration et aux contribuables?

A cette absence de politique conforme à l’intérêt général (et où donc seul prévaut l’intérêt des opérateurs du transport) qui contribue largement au désordre et aux abus incohérents des politiques commerciales et tarifaires, s’ajoute dans l’aérien le recours à un système de gestion particulièrement pervers dans le contexte insulaire réunionnais : le yield management. A son origine, aux USA, ce système, résultant de la dynamique multiplicité des opérateurs aériens et des progrès inouïs de l’informatisation qui gère l’optimisation de la rentabilité de l’activité aérienne vol pas vol et siège par siège, avait pour principal objectif de permettre à chaque compagnie de définir en temps réel « le prix le plus bas possible de chaque siège » conforme à la rentabilité nécessaire attendue et ce afin d’être et rester le plus concurrentiel possible. En effet, le développement massif des déplacements aériens sur le continent nord américain avait donné lieu à une profusion de compagnies et donc à une concurrence exacerbée au bénéfice incontestable des consommateurs et de la demande … et donc, ce qui est naturel dans une économie libérale marchande authentiquement concurrentielle, au développement du marché et de l’offre de sièges puisque le recours au yield management, dont c’était la principale raison d’être, permettait à chacun de toujours proposer « le plus bas prix possible » tout en évitant tout risque financier à l’entreprise. L’exacerbation de la concurrence des nombreuses compagnies assurait au marché de l’aérien, grâce au yield management, la garantie des plus bas prix possibles, donc une dynamisation évidente du marché. Les parts de marché ont dû alors être conquises non plus seulement sur la seule base du prix du siège mais aussi et de plus en plus sur la nature et la qualité de la prestation offerte avec le siège.

L’apparition de la gestion « low cost » de South West très novatrice a très largement perturbé le marché aérien nord américain puisque ce nouveau mode de gestion, qui ne s’appuie plus sur la qualité de la prestation pour gagner ses parts de marché mais sur un coût toujours plus bas par l’organisation de sa gestion, donc plus attractif, car ne faisant payer au client, sans fioritures, que le seul fait de se déplacer d’un point A à un point B, et non plus les modalités et le confort du déplacement.

Ainsi le yield management aux USA était un dispositif nouveau de gestion conforme simultanément aux intérêts des transporteurs mais aussi et surtout des consommateurs, donc particulièrement efficace pour les deux tenants du marché aérien : le transporteur et le transporté ! Dans ces conditions, les Pouvoirs Publics n’avaient pas à intervenir sur un marché qui se régulait effectivement et efficacement par le jeu concurrentiel libre et non faussé de l’offre et de la demande.

Sur la Réunion, curieusement, et ce fait a été dénoncé par un rapport de la commission européenne du temps de Mme Nelly KRESS, la commissaire européenne espagnole aux transports, le recours au yield management a un effet totalement contraire car les opérateurs n’y exercent pas une véritable concurrence mais au contraire y pratiquent des ententes de fait reposant sur le caractère captif et sur le relatif pouvoir d’achat de ses clients. Grâce à ce système, les compagnies ne recherchent plus le prix « le plus bas » à proposer pour gagner leurs clients puisqu’ils sont captifs mais au contraire le prix le plus haut possible et « supportable » pour ces clients. Ainsi ce qui ne vaut que 800 € pourra être vendu 1600 € ou plus car la demande existe y compris à ce prix prohibitif et ce d’autant plus que l’offre de sièges, faute de véritable concurrence, est artificiellement maintenue très en-dessous de la demande. Soulignons que les Antilles, avec un peu plus de 800.000 habitants ont 2.100.000 offres de sièges par an vers et en provenance de métropole alors que la Réunion, avec une population presque équivalente n’a que 660.000 offres de sièges d’où situation malthusienne propice aux prix surfaits.

Ainsi le yield management, qui en situation réellement concurrentielle permet d’obtenir sur le marché « le prix de siège le plus bas possible », joue donc en faveur des consommateurs et de la demande mais aussi des opérateurs puisqu’il contribue à l’optimisation de leur rentabilité. Dans le contexte réunionnais de non concurrence réelle, le yield management devient un outil pervers qui ne joue plus en faveur du consommateur mais totalement à son détriment et au détriment du développement du marché.  

Dans ce contexte pervers, puisque le fonctionnement du marché sur la Réunion n’est plus authentiquement libéral mais manipulé et faussé, il revient alors aux Pouvoirs Publics et aux élus, qui en ont seuls la compétence et l’autorité, de mettre en place, non pas de manière coercitive mais de manière négociée, « le juste prix, le plus bas possible » et ce d’autant plus qu’il en est le plus important consommateur quantitatif avec les deniers publics. N’est-ce pas la méthode utilisée entre la CNAM et les syndicats de médecin pour fixer le prix de la consultation remboursée par la SS et les mutuelles? Ce respect simultané de l’intérêt général et des intérêts particuliers est-ce du soviétisme?

Pour faire de même, il conviendrait que les Services de l’Etat à la Réunion, déterminent de façon exhaustive, dans le sens Paris-Réunion et Réunion-Paris, le montant des crédits publics de toute nature apportés au marché du transport aérien, ainsi bien sûr que le nombre de sièges acquis auprès des transporteurs. Ces données permettront d’avoir un éclairage sur la place des finances publiques dans l’économie des transports aériens et de renseigner sur les besoins publics de déplacements aériens au cours de l’année entre la Réunion et la métropole ou l’Europe pour définir les bases objectives des besoins à assujettir à un dispositif de véritable et efficace continuité territoriale. L’identification précise du montant qu’occupent les financements publics dans le secteur du transport aérien justifieront pleinement l’intervention négociée des Pouvoirs Publics auprès des opérateurs pour définir avec eux « le juste prix » qui dans un authentique marché concurrentiel libre et non faussé résulterait du jeu de la vraie concurrence. Pour ce prix, qui peut évoluer, toujours de façon négociée, en fonction des aléas internationaux, Coll’Air avait utilisé la dénomination de « prix plafond » mais il conviendrait mieux de le qualifier de « prix continuité territoriale » car il concerne avant tout l’argent public qui doit être dépensé avec rigueur, surtout du fait d’un Etat miné par un déficit de 1.210 milliards  €.

Ainsi dans le souci de mieux gérer les dépenses publiques, le nombre de sièges financés annuellement par les fonds publics de toutes natures servirait de base pour la négociation du prix du billet « continuité territoriale », valable toute l’année, mis en place par les services de l’Etat.

Antoine FRANCO

 

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