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(Pierrot Dupuy) Quand l’ARS Mayotte préfère une compagnie aérienne métropolitaine à une mahoraise

Dominique Voynet, l'ancienne ministre de l'Ecologie, est depuis janvier dernier directrice de l'ARS à Mayotte. Une nomination grâce à un gros coup de piston pour quelqu'un qui n'avait jusque là jamais dirigé un service de l'état de sa vie. Ses relations très tendues avec le préfet de Mayotte et la directrice du CHU de Mamoudzou expliquent dit-on en partie la venue d'Annick Girardin dans l'ile aux Parfums. La ministre des Outre-mer pourrait profiter de son séjour pour jeter un oeil sur le dossier de la passation de marché en passe d'être signé entre l'ARS et la compagnie aérienne Amelia pour les évacuations sanitaires entre Mayotte et La Réunion. Une compagnie métropolitaine, alors qu'Ew Air, la filiale mahoraise d'Air Austral, était dit-on moins chère et que ses avions sont cloués au sol. Sans aucune activité.

Ecrit par zinfos974 – le mardi 19 mai 2020 à 20H46

A La Réunion, nous avons Martine Ladoucette rendue célèbre par ses apparitions régulières à la télévision et l’affaire des masques avariés distribués aux soignants, mais apparemment Dominique Voynet, la directrice de l’ARS Mayotte, n’est pas triste non plus.

Celle qui a été ministre de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement de 1997 à 2001 sous Lionel Jospin, a abandonné la médecine et son poste d’anesthésiste réanimatrice en 1994.

Un magistral coup de piston la propulse inspectrice générale des Affaires sociales

Elle est ensuite propulsée en 2014 grâce à un magistral coup de piston au poste d’inspectrice générale des Affaires sociales, un des plus hauts grades de la fonction publique. Et pas n’importe où : à l’IGAS un des corps les plus prestigieux de l’administration, mais aussi l’un des mieux rémunérés.

Le 1er janvier dernier, elle est nommée à la tête de l’Agence régionale de santé de Mayotte. Difficile de croire que ce soit pour ses compétences puisqu’elle n’a exercé la profession de médecin anesthésiste réanimatrice qu’en pointillé, entre ses différents mandats politiques. Et qu’elle l’a abandonné depuis 1994. Il y a 25 ans !

Par ailleurs, on ne voit pas en quoi le fait d’avoir été médecin, voire même ministre de l’Ecologie, vous donne les compétences pour diriger un service comme une Agence Régionale de Santé. D’autant qu’il n’existait pas d’ARS à Mayotte avant son arrivée et qu’elle a du tout bâtir, en partant de zéro.

Des relations exécrables avec le préfet et la directrice du CHU de Mamoudzou

Voilà dressé le contexte dans lequel Dominique Voynet exerce ses fonctions. J’aurai terminé le tableau quand je vous aurai dit qu’elle a construit son ARS plus comme un ministère que comme un service décentralisé de l’Etat. Les professionnels de la santé à Mayotte ont par exemple été surpris de découvrir qu’elle avait créé un poste de directeur de cabinet, occupé par un ami venu de métropole…

Ajoutez à ça un caractère… bien trempé et vous comprendrez pourquoi les relations sont extrêmement tendues avec le préfet ainsi qu’avec la directrice du CHU de Mamoudzou. Il se murmure même que c’est l’une des raisons de la venue d’Annick Girardin dans l’ile : mettre tout ce beau monde au pas et calmer les tensions.

Le marché juteux des Evasan

Puisqu’Annick Girardin est jusqu’à demain sur place, nous lui conseillons de se pencher -à moins qu’elle ne soit déjà au courant- sur les conditions de passation du marché des évacuations sanitaires (evasan pour les spécialistes) en passe d’être signé entre l’ARS de Mayotte et la compagnie aérienne Amelia, une marque du groupe Regourd Aviation.

Le patron de Regourd Aviation est récemment venu à Mayotte dans le but de faire du département français une base arrière pour y installer à demeure un avion Embraer 145 destiné à assurer les évacuations sanitaires pour le compte des compagnies pétrolières devant prochainement prospecter le gaz et le pétrole dans le canal du Mozambique.

Mais le début des opérations est un peu plus long que prévu et pour Regourd Aviation, la crise du coronavirus à Mayotte et le nombre de malades à transporter en direction de La Réunion est vite apparu comme une opportunité à saisir. Contact est donc pris avec Dominique Voynet et ses équipes et un accord est rapidement conclu pour un coût, selon nos informations, de 200.000€ par mois, hors « variables ». En quoi consistent ces « variables »? Mystère…

Pourquoi une compagnie de métropole alors que Mayotte a une compagnie aérienne clouée au sol?

Le contrat, selon nos informations, est toujours en attente des dernières signatures mais une question nous vient à l’esprit : pourquoi être allé chercher une compagnie aérienne en métropole alors que Mayotte dispose de sa propre compagnie, Ewa Air, une filiale d’Air Austral, qui dispose sur place de deux ATR 600, actuellement cloués au sol et totalement inactifs.

D’après un de nos interlocuteurs très au fait du dossier, l’explication fournie par Dominique Voynet serait que les pilotes d’Air Austral refuseraient d’assurer les Evasan. Totalement faux, nous assure-t-on.

Ce choix est d’autant plus surprenant que les prix pratiqués par Ewa Air seraient inférieurs à ceux d’Amelia.

Et pourquoi pas les avions d’Air Austral?

Et si d’aventure les ATR 600 ne convenaient pas aux desiderata de l’ARS, Air Austral peut parfaitement aménager ses Boeing 737 et 787 pour assurer les Evasan. Le premier peut transporter quatre malades en configuration « Covid » et le 787 peut en embarquer huit. Et plus si ce ne sont pas des malades Covid, comme ça semble être le cas.

Nul doute qu’Air Austral aurait été ravie de faire voler ses avions et de remplir un peu ses caisses, au lieu de les voir dépérir sur le tarmac de Gillot…

N.B : Pour vous donner une idée des magouilles liées aux nominations aux postes d’administrateurs généraux, voici ci-dessous copie d’un article publié en avril 2016 par la fondation IFRAP, un « think tank dédié à l’analyse des politiques publiques, laboratoire d’idées innovantes » alors qu’il était question de parachuter Stéphane Lardy (FO) à un poste d’inspecteur général des Affaires sociales et intitulé : [Syndicats et postes publics : entre recasages et conflit d’intérêt]urlblank:https://www.ifrap.org/emploi-et-politiques-sociales/syndicats-et-postes-publics-entre-recasages-et-conflit-dinteret :

C’est une nouvelle qui détonne. Le gouvernement serait sur le point de décider de parachuter l’ex-patron de la CGT, Thierry Lepaon, à la tête d’une nouvelle agence nationale de la langue française pour la cohésion sociale et par la même occasion, de nommer à l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) son collègue de Force Ouvrière (CGT-FO), Stéphane Lardy. Ces différents recasages mettent en lumière le pouvoir des syndicats sur les nominations dans la haute fonction publique.

De nombreux précédents

Messieurs Lepaon et Lardy rejoignent la longue cohorte des nominations politiques au sein des postes publics convoités de la République, comme avant eux François Chérèque, ex-patron de la CFDT, nommé à l’IGAS puis à la tête de l’Agence du service civique, Jean-Christophe Le Duigou, ex-CGT, nommé au Conseil d’État après un passage au Conseil économique, social et environnemental (CESE) ainsi qu’au Conseil d’orientation des retraites (COR) et au Conseil économique de la Nation (CEN), ou encore Luc Guyau, ex-leader de la FNSEA, nommé inspecteur général de l’agriculture, lui aussi après un passage au CESE et à la présidence du FAO sur choix du gouvernement. Par ailleurs, Thierry Lepaon est également passé par le CESE, tout comme Stéphane Lardy, qui vient tout juste d’y achever son mandat.

Thierry Lepaon devrait donc prendre la tête d’une nouvelle Agence de la langue française pour la cohésion sociale… créée spécialement pour lui et doublonnant au passage l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (ANLCI). Alors pourquoi cette création ? Tout simplement parce que le poste de président de l’actuel ANLCI n’est pas rémunéré et que la centrale syndicale a besoin d’un point de chute pour son ancien leader, toujours salarié de la CGT pour la modique somme de 4.200 euros nets par mois. Selon des informations du journal Les Échos, « à fin mars, la note [finale pour la CGT, ndlr] s’élevait à 115.000 euros en salaire chargé hors treizième mois et 31.000 euros de location pour l’appartement [de fonction, ndlr] qu’il a continué à occuper jusqu’en février. Soit au total quelque 150.000 euros ».

Si à terme, l’ANCLI devrait disparaitre au profit de la nouvelle agence de la langue française, les deux structures devront coexister pendant un certain temps, tout en exerçant des missions quasi-identiques puisque la future agence sera dotée de compétences élargies. La Cour des comptes estimait pourtant qu’il conviendrait « de ne pas négliger le risque de dilution de la question très spécifique de l’illettrisme au sein d’un organisme aux compétences élargies, la communication autour du sujet, et donc sa dédramatisation, étant considérées par tous les acteurs comme un facteur-clef de succès de la politique publique ». Mais surtout, la Cour rappelle que « la formule du GIP ANCLI est plus que jamais pertinente pour garantir sa cohérence ».

Qui coûtent très cher

L’inspection générale des affaires sociales (Igas) est l’un des corps les plus prestigieux de l’administration, mais aussi l’un des mieux rémunérés (NDLR : ces chiffres datent de 2016) :

 

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