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(Pierrot Dupuy) Emmanuel Macron va probablement annoncer la suppression de l’octroi de mer et une diminution de la surémunération

La vidéo est passée relativement inaperçue. Pourtant elle se trouve sur le site du Sénat et on peut [la consulter ici]urlblank:http://videos.senat.fr/video.1332928_5da647b84c323.audition-de-mme-annick-girardin-ministre-des-outre-mer?timecode=11119000 . Cette discrétion est vraiment regrettable dans la mesure où Annick Girardin y fait l’annonce de deux des principales propositions que le président de la République va faire lors de son séjour à La […]

Ecrit par zinfos974 – le lundi 21 octobre 2019 à 23H08

La vidéo est passée relativement inaperçue. Pourtant elle se trouve sur le site du Sénat et on peut [la consulter ici]urlblank:http://videos.senat.fr/video.1332928_5da647b84c323.audition-de-mme-annick-girardin-ministre-des-outre-mer?timecode=11119000 .

Cette discrétion est vraiment regrettable dans la mesure où Annick Girardin y fait l’annonce de deux des principales propositions que le président de la République va faire lors de son séjour à La Réunion en fin de semaine, à savoir une tentative de suppression de l’octroi de mer et une réforme des taux de la surémunération.

Pour qu’il ne puisse y avoir contestation de la part du ministère des Outre-mer, nous vous retranscrivons ci-dessous le verbatim exact des déclarations de la ministre, jeudi dernier, devant la délégation sénatoriale aux Outre-mer :

 

« Le président de la République aura l’occasion de s’exprimer à La Réunion et à Mayotte puisqu’il va s’y déplacer, mais oui, il faut qu’on accompagne encore davantage la production locale. Il faut qu’on l’aide encore davantage à travers notre système de taxation, octroi de mer et TVA qui, oui, peut être repensé.
 
L’octroi de mer, c’est quand même Colbert. Ça fait quand même quelques années. On sait pourquoi ça a été créé. On sait comment on l’a fait évoluer. Mais peut être aujourd’hui faut-il re-réfléchir à TVA/Octroi de mer, et pas séparément. TVA et octroi de mer et voir comment faire disparaitre cette dernière taxe coloniale qu’est l’octroi de mer. Qui a déjà largement évolué, mais qui mérite peut être d’être regardé.
 
Avec trois obligations :
          – Attention aux collectivités territoriales et aux financements qui sont apportés aux collectivités,
          – Attention à la production locale,
          – Et bien sûr la vie chère qui n’est pas pire avec un nouveau système que ce qu’on connait aujourd’hui.
 
Donc concurrence mais sans doute aussi transformation en profondeur de nos modèles.
 
On y arrivera peut être. Et je rappelle que pour une partie de nos populations, c’est pour ça que la surémunération a été mise en place. Qui est complètement différente d’ailleurs, que l’on soit sur un territoire ou sur un autre. Pas toujours d’ailleurs très lié aux évolutions des dernières années. Mais le président de la République en a pris l’engagement, il n’y aura pas de modification de la surémunération durant son quinquennat. Mais il y aura peut être à re-regarder les différents taux, la disparité des taux par rapport à la réalité des territoires. Je pense qu’il y a un moment où nous devrons tous ensemble regarder ça. Et comme ça dépend des compétences des uns et des autres… Octroi de mer, compétence des collectivités, TVA compétence Etat, nous ne pourrons mener ce travail que si nous avons envie de le mener tous ensemble.
 
L’Etat n’obligera pas à ce type de réforme. Sauf à ce que vous me demandiez, comme ça a été fait avant-hier à l’assemblée nationale, de m’en saisir. Ma réponse a été très claire : je veux bien m’en saisir à condition que la demande soit beaucoup plus large qu’un seul parlementaire. J’ai entendu la proposition de Victorin Lurel. C’est comme pour le statut. Soit on est tous là, soit je n’avancerai pas seule. Je sais ce que ça veut dire en bout de course ».
 

 

Même si cette déclaration est assez longue, nous avons tenu à la publier intégralement car chaque mot compte.

Que faut-il en retenir ?

Le but est de supprimer l’octroi de mer, qualifié de dernière « taxe coloniale »

Tout d’abord, concernant l’octroi de mer, Annick Girardin révèle sans détours que la volonté du gouvernement est la suppression de ce qu’elle qualifie de « dernière taxe coloniale« .

J’entends déjà les Gilets jaunes crier victoire. J’ai peur qu’ils ne déchantent vite dans la mesure où, si on lit entre les lignes, il ne s’agit pas dans l’esprit d’Annick Girardin, et donc d’Emmanuel Macron, de faire un cadeau aux Réunionnais.

Il n’en sera malheureusement rien, et la ministre est assez claire à ce sujet. Si on supprime l’octroi de mer, c’est dans le cadre d’un rééquilibrage du tandem TVA/octroi de mer. Entendez par là, et Annick Girardin l’a rappelé en réponse à une question de la députée Nathalie Bassire, que la TVA à La Réunion n’est que de 8,5%, contre 20% en métropole. Dès lors, on devine aisément la tentation de la ministre et du ministère du Budget : supprimer l’octroi de mer et aligner la TVA à La Réunion sur le taux de 20% de la métropole.

Inutile de vous dire que nous serions énormément perdants. En effet, et les Réunionnais l’ignorent, l’octroi de mer rapporte moins que les 8,5% de TVA. Ce qui signifie que si l’on est aligné sur le taux métropolitain, ou même si nous avions un taux légèrement inférieur, nous paierions beaucoup plus de taxes qu’actuellement !

Les Gilets jaunes auront ainsi été roulés cari sous d’riz : ils auraient certes obtenu la suppression de l’octroi de mer mais ils paieraient au final beaucoup plus de taxes !

Remplacer le financement des communes via l’octroi de mer par une augmentation de la dotation de fonctionnement

Et même si la ministre avance immédiatement qu’il faudra faire « attention à la production locale« , je ne vois pas pourquoi supprimer l’octroi de mer qui protège déjà la production locale en taxant les produits qui la concurrencent, dans le but de protéger l’emploi, pour le remplacer par une TVA qui, par définition, ne fait pas ce type de distingo.

Et là aussi, on peut deviner assez facilement que l’arrière-pensée d’Annick Girardin est remplacer le financement des communes et autres collectivités qui provient aujourd’hui de l’octroi de mer par une dotation globale de fonctionnement versée par l’Etat.

A une différence notable : si les taux de l’octroi de mer sont déterminés localement par la Région et que la totalité de ce qui est perçu est reversé aux Réunionnais via les communes, une fois que l’octroi de mer sera remplacé par la TVA, l’argent partira dans les caisses de l’Etat à Paris et c’est le gouvernement qui décidera tous les ans combien il versera aux communes.

On passerait ainsi d’un système que les Réunionnais contrôlent et qui leur procure un financement garanti qui leur permet d’investir et d’embaucher dans leurs communes, à un système où ils seront totalement dépendants du bon vouloir du gouvernement. Avec à la clé la menace d’une baisse régulière de cette dotation globale de fonctionnement, comme ça a encore été le cas récemment.

Car ne vous faites aucune illusion : quand l’Etat décide de faire des économies, ce n’est jamais lui qui les fait mais c’est toujours aux autres qu’il demande de les faire. J’en veux pour preuve que le budget de l’Etat continue d’augmenter tous les ans, contrairement à toutes les promesses faites par Emmanuel Macron durant sa campagne, tandis que les sommes versées par l’Etat aux collectivités ne cessent, elles, de diminuer.

Faites ce que je dis, pas ce que je fais !

La surémunération passerait de 53 à 40%

Enfin, concernant la surémunération, Annick Girardin s’est empressée de rappeler la promesse faite par Emmanuel Macron qu’il n’y aurait pas de « modification durant son quinquennat« .

Sauf que, juste derrière, elle déclare que le gouvernement ne s’interdit pas de diminuer les taux de la surémunération dans certains territoires.

Rappelons que ce taux est de + 53 % à La Réunion, + 40 % à la Guadeloupe, Martinique, Guyane et Mayotte.

Si on décide de diminuer un taux pour l’aligner sur les autres, je vous laisse deviner lequel on touchera…

Tout n’est peut-être pas perdu

Heureusement pour les Réunionnais que le gouvernement d’Emmanuel Macron n’agit plus aujourd’hui comme au début du quinquennat.

Plus question de faire des annonces au dernier moment et de passer en force. La crise des Gilets jaunes est passée par là et tout se fait plus insidieusement. On lance le débat, on jette le chiffon rouge et on voit comment la population réagit. Et on ne décide que s’il n’y a pas de trop forte opposition.

C’est ce qu’Annick Girardin veut dire par son : « L’Etat n’obligera pas à ce type de réforme. Sauf à ce que vous me demandiez (NDLR : les élus) de m’en saisir« .

Espérons que les élus de La Réunion, tous partis politiques confondus, sauront signifier à Emmanuel Macron, durant son séjour, leur totale opposition à ces coups tordus, particulièrement néfastes pour l’économie locale, qui se remet à peine de la crise des Gilets jaunes.

 

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