Jean-Pierre Marchau, vice-président de la CINOR chargé de la mobilité, répond aux interrogations de Zinfos974, pressé comme beaucoup de Réunionnais d’un jour monter à bord d’un tram. L’élu assure que la volonté politique est la clé qui démarrera ces projets de transports collectifs plus modernes et moins polluants.
L’espoir semblait permis lors des changements de gouvernance à la tête de la Région Réunion et au sein des différentes intercommunalités. Les projets, sur papier, allaient-ils enfin pouvoir sortir de terre, plus de 10 ans après le rêve pharaonique d’un Tram-Train tué dans l’œuf, dans les urnes et dans la salle d’audience du tribunal de Bordeaux ?
La réponse, un an et demi après les Régionales, est claire : Les Réunionnais peuvent continuer à rêver, le tram ne sera pas une réalité de si tôt. Jean-Pierre Marchau, vice-président de la CINOR en charge de la mobilité, explique que les projets ne sont pas accordés et que les financements – obtenus en 2009 – ont disparu, avalés entre autres par la Nouvelle Route du Littoral. Pour du transport collectif, il faut se rabattre sur des bus, le temps de préparer l’arrivée de voies ferrées à La Réunion.
Tram Train : Une erreur d’aiguillage aux lourdes conséquences
Jean-Pierre Marchau assure que les difficultés circulatoires actuelles sont liées à l’abandon du projet d’un tram entre Saint-Denis et Saint-Pierre présenté en 2009 par Paul Vergès, alors président de la Région Réunion.
“Plus on avance, plus on s’aperçoit que la décision prise par Didier Robert en 2010 – il ne s’agit pas de jeter la pierre à qui que ce soit – d’abandonner le projet Tram-Train, en perdant au passage plus de 70 millions d’euros de crédits engagés, a provoqué en cascade tous les problèmes que nous avons en matière de circulation aujourd’hui”, déclare le 7e vice-président de la CINOR.
Mésententes marquantes, financements manquants
Durant la campagne électorale des Régionales 2021, plusieurs projets de transport routier guidé ont été présentés. Celui de la Région de Didier Robert (« Run Rail ») était en compétition avec celui de la Cinor (TAO).
Le président sortant a été battu par Huguette Bello qui comptait sur sa liste la maire de Saint-Denis, qui avait milité pour la construction du réseau TAO durant la campagne. L’avènement des majorités de la Région et de la CINOR qui se soutenaient mutuellement et publiquement pouvait alors permettre de mettre enfin ce projet sur les rails.
Il précise que le projet TAO est celui qui est actuellement en suspens par manque de financements : “Sous sa forme ferroviaire, il faudrait 500 millions d’euros et personne ne les a.”
Mais pour le vice-président de la Cinor, le transport sur rail pourrait sortir de terre plus rapidement : “La Région a déjà fait de nombreuses études sur le Run Rail (réalisées par l’ancienne majorité, ndlr) et si demain elle le souhaite, elle peut lancer le projet. Mais cela se heurte à la position de la Cinor qui veut tout d’abord régler la question du transfert des flux de voyageurs venant de l’Est.”
Pas de tram, mais des bus en trompe-l’œil
L’élu chargé de la mobilité dans l’intercommunalité du Nord-Est explique que toutes les collectivités font face aux difficultés circulatoires grandissantes. Un transport routier guidé (TRG) ne sortira de terre que dans de nombreuses années, peut-être à la fin de la décennie.
Les élus des différentes micro-régions travaillent alors à rendre attractif un autre type de transport en commun : le bus. “Le TCO ou la Cinor tablent sur un projet de TCSP (transport collectif en site propre) avec ce que l’on appelle un ‘bus à haut niveau de service’, ressemblant de loin à des trains mais qui bénéficient de voies dédiées. Nous travaillons à la Cinor sur un projet similaire que nous avons appelé le Bao-Bab”, précise Jean-Pierre Marchau. Des bus pour remplacer le projet de TRG évoqué lors des élections : “Ce réseau de bus viendrait se substituer attendant la mise en place d’un éventuel tram.”
Le projet déjà mort-né avait été définitivement enterré par la décision de la cour administrative de Bordeaux en 2011 qui avait annulé en totalité l’arrêté d’utilité publique du projet (DUP). Le rapporteur public avait aussi contredit la majorité de Paul Vergès et prévoyait un surcoût de plus d’un milliard d’euros.
Jean-Pierre Marchau balaie cette décision de justice du revers de la main et rappelle que le pont de l’île de Ré avait aussi eu son arrêté DUP annulé. Mais déjà en cours de construction, l’ouvrage avait été achevé malgré la décision de justice. “On peut entendre effectivement les arguments de pure forme mais en mobilité nous faisons de la politique, c’est la volonté politique qui prime. Parmi les grandes qualités de Paul Vergès, c’est qu’il avait la volonté et il avait dit qu’il irait chercher les financements”, lance le vice-président de la Cinor.