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PCR 4ème partie : Les alliances…

En démocratie, comme on le sait, c’est par la voie des urnes qu’on accède au pouvoir. Mais voilà, La Réunion est une colonie où le PCR déclare mener une lutte de « libération nationale » (voir textes précédents). Or de toutes les « luttes de libération nationale » qui ont réussi, rares pour ne pas dire aucune, sont sont […]

Ecrit par Pierrot Dupuy – le dimanche 10 mai 2009 à 19H14

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En démocratie, comme on le sait, c’est par la voie des urnes qu’on accède au pouvoir. Mais voilà, La Réunion est une colonie où le PCR déclare mener une lutte de « libération nationale » (voir textes précédents). Or de toutes les « luttes de libération nationale » qui ont réussi, rares pour ne pas dire aucune, sont sont celles qui sont arrivées au pouvoir par la voie électorale. Si le PCR va boycotter la voie électorale à la fin des décennie 1960 pour « une voie plus longue, plus difficile », il se gardera d’y renoncer clairement. C’est d’ailleurs l’ambiguïté de ses formules sur la stratégie à mettre en œuvre qui va amener la dissidence de S. Sinamalé (voir article précédent). En 1971, le PCR revient définitivement dans le jeu électoral, année d’ailleurs où il enlève les mairies de la Possession et du Port. Collectivités qu’il n’avait plus gérées depuis le passage du préfet Perreau-Pradier à la tête du département.
Mais dans un processus électoral, qui plus est dans un mode de scrutin écartant toute dose de proportionnelle, si l’on veut gagner des élections il faut créer des conditions pour être majoritaires, d’où des alliances. Cette démarche ordinaire pour tout groupe ou parti cherchant à remporter des élections va trouver au PCR une mise en forme particulière qui repose sur un triple cercle d’alliances électorales et idéologiques et se fonde sur un postulat.
Le postulat c’est la place et le rôle du Parti communiste dans les alliances  idéologiques. Elles sont définies comme hégémonique. Il ne saurait y avoir d’alliances pour le PCR sans garantie de cette place.

 

Pour ce faire, le PCR opère à travers un réseau d’organisations appelées « amies » chez les communistes, « crypto-communistes » chez leurs adversaires et satellites dans un vocabulaire plus neutre. Le rôle assigné à chacune des  ces organisations est double :
   – offrir une zone d’accueil pour tous ceux qui hésiteraient à s’afficher où à rallier directement le PCR
   – diffuser en direction du secteur qui lui est attribué -social, culturel, professionnel- les thèses du Parti communiste avec un vocabulaire propre à ce milieu
Le groupe Témoignage-Chrétien de la Réunion est un exemple remarquable de cette démarche. Crée en août 1970, il répond à une demande pressante du PCR qui cherche à  « pénétrer les couches croyantes » pour reprendre la phraséologie communiste. A charge pour les dirigeants de ce groupe de trouver le vocabulaire et la pédagogie à mettre en œuvre pour parler aux catholiques et leur faire surmonter leurs craintes ou leur peur du communisme et de ses dirigeants.
Cela donne dans leur manifeste fondateur  :
   – « Manifester la portée révolutionnaire de l’Évangile comme exigence de justice et contestation des pouvoirs établis.
   – Dénoncer toute complicité de l’Eglise établie avec l’ordre établi ».
Objectif implicite, et non des moindres, c’est aussi d’empêcher l’émergence dans le sillage de l’Eglise catholique et de ses œuvres, d’un mouvement réformiste qui échapperait au contrôle du PCR et lui enlèverait  une clientèle électorale dans une île où le catholicisme est puissant.
Bien évidemment il ne s’agit pas pour autant de faire de TCR un groupe autonome, ou pire un foyer d’avant-garde intellectuelle, qui finirait par disputer au PCR et à son principal dirigeant le leadership.Tout ceux qui ont oublié ou n’ont pas vu cette limite à ne pas franchir vont le payer chèrement (A Lorraine, les prêtres R. Michels et Cardonnel ou encore les catholiques de l’émigration).

Dans tel scénario, on peut toujours discuter à l’infini pour savoir si Lucien Biedinger avait ou pas sa carte du PCR. Mais celà a-t-il vraiment du sens?
FJAR pour les jeunes, CGPER pour les planteurs, CGTR pour les ouvriers, UFR pour les femmes obéissent à ce même principe. Ce ne sont pas les mésaventures du dirigeant de la CGPER dont la direction du PCR a organisé, si on le croit, sa défaite à l’avant-dernière élection à la Chambre d’agriculture, qui invalideront ce modèle, bien au contraire.  
Le COSPAR ou TERLA sont les derniers avatars en date de ce modèle qui est apelé modèle « frontiste » dans le vocabulaire communiste. Les Alliances électorales découlent de celles-ci et n’ont pas leur importance. Dit autrement, toute alliance électorale qui porterait atteinte, ou susceptible de porter atteinte au postulat idéologique doit être exclue. Quitte à perdre des élections. Cette proposition se lit également dans l’autre sens : toute alliance électorale susceptible de renforcer ce postulat idéologique est à privilégier. Quitte à s’allier avec l’adversaire d’hier. Voilà qui peut aider à comprendre ce qui s’est passé aux élections municipales de Saint-Paul.
A  coté des « amis » il y a  les « alliés » dont il convient de veiller à ce qu’ils ne remettent pas en cause la position hégémonique du PCR. Le principal allié-concurrent, c’est le PS. Dans les opérations électorales, le raisonnement précédent s’applique à lui. Quand il ne réussit pas seul à se paralyser, ce pourquoi il dispose d’une grande énergie, quelques scissions peuvent etre provoquées.

 

Voilà pourquoi à l’approche de rendez-vous jugés importants, nous voyons fleurir un lot de « groupes » se réclamant du socialisme, un raisonnement qui vaut désormais pour l’Ecologie. Des groupes dont on aurait du mal à rappeler leur nom car en général ils ne survivent pas à la saison de l’année. Mais depuis l’élimination politique de Michel Debré par Eric Boyer et ses amis, le cercle des « alliés » s’est largement agrandi. Eric Boyer lui même ouvre la voie avec son alliance avec le PCR qui lui permet de se faire élire d’abord à la présidence du Conseil général, puis au Sénat. Ce triomphe se fait contre la majorité de la Droite, mais aussi contre les Socialistes. Le double exploit d’Eric Boyer fut, on le sait, de tres courte durée. Il précédera de peu sa déchéance  avec sa cavale, appelée « maronnage ». Une idée lumineuse soufflée par les Vergès pour renforcer la justesse du combat d’un autre « marron », Pierre, leur fils et neveu, à qui il était urgent de coller l’image d’un « pt’i Cimandef ». Une dénomination plus à mesure d’un personnage appelé à de hautes responsabilités.
Élargir le cercle des alliances, c’est aussi pouvoir prendre à revers les Socialistes et renouer avec les tactiques politiques, qui faisaient les délices de la vie politique dans cette ile avant l’arrivée de Michel Debré (1963). Les élus de  Droite n’étaient alors  jamais à court d’un complot, d’une petite guerre contre d’autres élus de Droite. Madame Dindar ignore sans doute, et avec elle les soutiens et opposants de Droite, combien elle est l’héritière d’une riche histoire malheureusement peu enseignée!

 

Abordons maintenant le deuxième cercle d’alliances, celui qui a pour cadre la métropole. Historiquement le partenaire privilégié est le PCF et les autres organisations qui lui sont proches. Ce sont toutes ces organisations qui relaient les positions et thèses du PCR sur l’autonomie : Conférence de Paris des partis communistes(1960), Conférence de Paris pour l’autodétermination (1972). Mais de la première  conférence à la seconde, les alliances se sont élargies passant du seul PCF aux autres partis et mouvements de la Gauche française. L’intervention de Paul Verges à coté de Jacques Duclos dans la campagne présidentielle de1969, la place des DOM dans le programme commun de la Gauche (1972) sont des exemples de cette stratégie. Le point d’orgue est la place faite par le PCF à Paul Verges aux élections européennes de 1978. Mais s’il s’agit, à l’approche de victoires électorales françaises, de crédibiliser les thèses du PCR et du Front autonomiste et d’assurer par voie de conséquence leur victoire localement, il s’agit aussi pour le PCR dans un combat sans relâche de s’imposer comme seul interlocuteur crédible auprès de toute la gauche française. Mais pour être peu connu, ce combat ne sera pas moins sans merci. Les socialistes réunionnais, membres du Parti socialiste français, l’apprendront à leurs dépends. Ce n’est pas eux que la direction de leur  parti va pendant longtemps écouter, mais le PCR.
Après la disparition de  Michel Debré et le retour de la  Droite aux affaires de l’État, c’est la même tactique qui est reprise par le PCR en direction des responsables nationaux du RPR puis de l’UMP et de la présidence de la République. Entamée avec le président Chirac, dont le PCR  va soutenir les candidatures à la présidentielle (1995 et 2002), avec un art consommé de la communication, cette conduite connaît un état de grâce qui ne se dément pas depuis l’élection de Nicolas Sarkozy à la présidence de la République. Les nominations successives de Françoise Vergès à des fonctions clés ne constituent qu’un des exemples de cette lune de miel. Une « co-gouvernance PCR-Élysée » dont d’autre dossiers font aujourd’hui l’actualité, en sont la preuve. Ce qui achève d’alimenter l’ambiance délétère de l’UMP locale… 

 

Le dernier cercle qui reste à présenter c’est celui qui a pour cadre l’international. Il n’est plus ce qu’il fut dans les décennies 1960-1980. Longtemps, les relations avec « les pays frères » du mouvement communiste international ont permis au¨PCR et à ses satellites de disposer de tribunes, mais surtout de moyens matériels et financiers importants. L’effondrement de l’URSS et la crise des idéologies ont rendu ce cercle moribond. Tant dans la zone que du coté des partis communistes antillais, les démocraties populaires de Europe de l’Est ayant quant à elles disparu.

Faut-il conclure que nous sommes à la fin d’un cycle? Je ne sais car prédire le passé est une chose plus difficile que de lire l’avenir merveilleux qui nous est proposé. Mais sachant qu’il a fallu 17 ans pour trouver une alternative politique aux communistes après l’assassinat d’Alexis de Villeneuve et la création de l’ARDF pour se substituer à la déliquescence de la Droite toute à ses affaires, notre avenir constituerait peut être à remonter le temps. Un objectif et un rêve à la mesure de certains de nos politiques! 

 

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