La colère, l’inquiétude de parents face à leur fille de 15 ans qui annonce qu’elle est enceinte paraît on ne peut plus normal. Certains accepteraient qu’elle garde le bébé, d’autres préfèreraient une IVG. Mais S.B et T.B se sont retrouvés devant le tribunal correctionnel de Champ Fleuri ce mardi pour avoir forcé leur fille à prendre du Cytotec, déclenchant l’IVG, alors qu’elle était enceinte de 17 semaines, soit cinq de plus que la limite légale. Les faits remontent à juin 2016. Un avortement sous pression, sans l’accord de l’adolescente et sans surveillance médicale.
« Elle nous a demandé notre aide, je voulais l’aider »
Le père reconnaît s’être rendu à l’hôpital pour obtenir une ordonnance de Cytotec, médicament qui soigne les ulcères. La mère reconnaît lui avoir donné les cachets. « Elle nous a demandé notre aide, je voulais l’aider », affirme-t-elle.
Enceinte de son copain, elle assure que personne ne lui a demandé son avis. Baladée de médecin en médecin, elle raconte que sa mère lui aurait même fait dire qu’elle serait violente avec le bébé si elle le gardait ; une manière de pousser le corps médical à l’avortement. Elle avoue n’avoir jamais dit qu’elle voulait le garder, de peur. » J’avais besoin d’en parler, j’étais toute seule », ajoute-t-elle néanmoins.
S.B et T.B ont deux autres enfants et ne voient plus leur fille qui vit désormais chez les parents de son copain. Mais l’adolescente a déménagé non pas suite à l’avortement, mais suite à une plainte déposée contre son père pour agression sexuelle en juillet 2017. C’est alors qu’elle est envoyée à l’hôpital pour un examen médical dans le cadre de ses accusations que l’incident de l’année précédente refait surface. L’affaire d’agression sexuelle est classée sans suite.
Pour le procureur, l’affaire est compliquée : « Il y a deux points de vue qui ne sont pas contradictoires. Leur fille veut garder le bébé mais ne s’exprime pas ». Il reconnaît cette « double souffrance d’avoir perdu le bébé et sa relation avec ses parents qui étaient censés la protéger ». « Qu’aurait-on fait à leur place ? » demande-t-il en précisant que ce sont pas nécessairement de mauvais parents. Mais pénalement, il rappelle le délai dépassé et le risque de santé encouru pour la victime. Me Sandrine Antonelli, avocate de la jeune fille, énumère la liste de risque : problèmes neurologiques du bébé, déchirure de l’utérus, stérilité… Et une absence de prise en charge psychologique professionnelle.
Le couple a été condamné à six mois de sursis.