Malgré les initiatives de médiation interne du FFKM (Conseil des Eglises Chrétiennes de Madagascar) et externe (SADC-UA- Francophonie- Nations Unies), les positions des partisans « légalistes » pro-Ravalomanana et de la Haute Autorité de Transition de Andry Rajoelina restent inchangées depuis le 18 Mars 2009 et les ambassadeurs ont boudé la fête nationale malgache du 26 juin. Quelles sont dans ce contexte les conditions de succès du nouveau médiateur de la SADC Joachim Chissano ?
Schémas de médiations importés
Face au blocage des négociations politiques, les protagonistes et les médiateurs internationaux se renvoient la balle: les acteurs malgaches seraient « trop rigides », les médiateurs feraient preuve « d’ingérence dans les affaires nationales ». En fait, du point de vue des observateurs nationaux, les causes de cet échec prévisible sont connues:
· premier facteur: la médiation à quatre (Ratsiraka, Zafy, Ravalomanana, Rajoelina) était un bon préliminaire avant le « débat de fond » entre les deux principaux acteurs de la crise de 2009 mais ce débat l’ayant pas eu lieu, les négociations se sont vite transformées en marchandages et ce au détriment des revendications du mouvement de masse;
· deuxième point: en corollaire, l’opinion publique a réagi négativement face aux exigences d’amnistie des camps Ratsiraka et Ravalomanana, posées comme préalables à la signature de la charte de la transition, d’autre part assimilée à une « distribution de chaises » entre présidents déchus (avec près de 300 postes à pourvoir pour la seule période de transition!).
En somme, en voulant satisfaire tout le monde, la médiation internationale a compliqué l’équation au lieu d’en simplifier les termes, notamment avec le « feu vert » donnée aux quatre mouvances pour se présenter aux élections présidentielles alors que l’Union Européenne prêchait pour une « abstention » du chef de file controversé de la transition malgache Andry Rajoelina.
Après l’échec des schémas de médiation importés, l’opinion publique malgache reste divisée entre la recherche de solution « à la malgache » (ady gasy**) à trouver d’abord entre malgaches, et une intervention extérieure à l’initiative de la troïka FMI – Banque Mondiale-Union Européenne pour accélérer la sortie de crise politique malgache, sous l’effet de pressions financières en matière d’aide publique…
Eviter une approche « Top Down »
Alors que la médiation internationale annonçait une sortie de crise proche, trois mouvances se sont désistées l’une après l’autre:
· d’abord l’AREMA du tandem Ratsiraka-Rajaonarivelo pour n’avoir pas obtenu l’amnistie des évènements de 2002;
· puis le tandemTIM-MFM de Ravalomanana, à cause de ses leaders locaux toujours en prison ou en résidence surveillée;
· et enfin la HAT Andry Rajoelina, refusant de cautionner le retour de Ravalomanana au pays et l’amnistie générale.
Sur le terrain, la mouvance HAT a repris la main en donnant le coup d’envoi du 30 Juin au 03 Juillet dernier des assises régionales, pilotées par la société civile dans les 22 chefs-lieux de régions dans tout Madagascar. La transition marque un premier point du fait de la participation de personnalités du TIM comme l’ex-président du Sénat et actuellement ambassadeur à Genève Rajemison Rakotomaharo. Sur les revendications de fond, les participants ont exprimé quelques tendances d’opinions majoritaires à savoir:
· l’acceptation du principe d’abaissement de l’âge minimal présidentiel (aval indirect à une candidature de Andry Rajoelina),
· le principe d’Etat unitaire décentralisé au niveau des régions (mais des régions du Nord et de l’Est – exportatrices de produits de rente – ont privilégié la formule fédéraliste),
· et le principe d’amnistie sélective pour les évènements politiques de 2002 à 2008 (pas d’amnistie automatique pour Ravalomanana).
Sur le plan médiatique, les actualités d’autres pays appellent certaines comparaisons pour les protagonistes et observateurs malgaches: les pro-Ravalomanana comparent ainsi les situations malgache et hondurienne, tandis que les pro-HAT appellent de leurs voeux une reconnaissance de départ volontaire de Marc Ravalomanana, à l’instar du Président déchu mauritanien…
En tous cas, le nouvel émissaire de la SADC fera bien de ne pas répéter les erreurs de la précédente médiation internationale qui péchait par sa propension à l’approche « top-down » en n’écoutant que les voix des « quatre présidents »: pour aboutir, la médiation de Joachim Chissano devra aussi tenir compte des avis des assises régionales malgaches!
Jean-Pierre Randriamampandry
** à voir également sur zinfos974 du 08.04.2009: « Madagascar 2009: pas d’état de grâce pour la transition malgache! »
AdyGasy-SystemD 07/07/2009