Que voici une superbe BD ! Et vous savez quoi ? Comme première remarque, je vous dirais qu’elle est écrite en une langue créole très compréhensible, étymologique, sans ces k w z, voire des tildes, oumlaouts et autres doubles slashes pourquoi pas, inventés par de doux rêveurs pas tout-à-fait guéris d’une certaine indépendance.
Comme toute bonne BD, celle-ci se lit d’une traite ; elle est poignante, tourmentée tant le sujet est dramatique ; souvent, on a l’oeil humide, pourquoi ne pas l’admettre. On peut être sentimental ET m’en-foutiste. Mais le talent de Téhem est tel qu’il parvient, par la magie du dessin et de l’ironie, à nous faire rire, histoire de dédramatiser un peu par la magie du moucatage. Par exemple quand il compare le fast-food à un camion-poubelle : bravo gars !
Il est dommage que ce dessinateur au talent fou n’ait pas eu accès aux « archives cachées » du dortoir de l’APEP d’Hell-Bourg. Mon pote Louis-Claude Fontaine (frère d’un célèbre Moutardier), avant qu’on ne se retrouve au Collège de la Sakay, a été surveillant dans ce zoo humain (je déteste les zoos).
Un matin, alors qu’il faisait l’appel, un gosse malingre et souffreteux lui a dit en souriant : « A mwin même guèrnouille ». Parce que la nuit, les plus grands lui montaient dessus. Tas de salauds ! Qui a dit que l’enfance est un âge d’or ?
Il faut saluer les inserts de monsieur Gauvin, historien, dont les pages restituent leur authenticité à l’histoire, loin de tous ces clichés si volontiers répandus par ailleurs.
Bref, vous avez compris, j’ai aimé cette BD sur notre histoire réunionnaise dans toute sa souffrance. Merci, monsieur Téhem, vous êtes un champion.