Nickel VO est un concessionnaire qui marche très bien à en croire les commerçants du quartier. « Il vend des voitures tous les jours, même le dimanche« , explique la gérante d’un snack-bar de la rue. Les annonces de vente paraissent sur un site de petites annonces bien connu : leboncoin.fr. Pour autant, le gérant ne prend pas de gants en matière de législation. Faute de concession automobile, il a opté pour une solution de facilité. Il gare la totalité de ses véhicules sur la voie publique, dans un parking appartenant au Conseil général, à Champ-Fleuri, et sur les stationnements réservés aux locataires de la SIDR. Une situation qui agace fortement dans le quartier. C’est bien simple, les voitures y sont parquées matin et soir – nous avons vérifié – et le petit manège dure depuis quelques mois maintenant.
Un rendez-vous est pris par téléphone avec le gérant, pour voir de plus près comment sa concession fonctionne.
Journaliste à Zinfos974, je me fais passer pour un acheteur intéressé par un véhicule haut de gamme. Arrivé sur place, le gérant de la concession est avec son fils – à peine 18 ans – pour me présenter les modèles. En même temps que nous discutons, un autre acheteur inspecte une petite citadine à vendre. Très fier de sa petite affaire, le gérant me montre l’étendue de sa concession. « J’ai des voitures partout. Là il y en a une vingtaine (ndlr: en pointant du doigt le parking de Champ-Fleuri) et là dans toute la rue, tout ça ce sont mes voitures (ndlr : rue Jean Cocteau)« , explique-t-il.
Des voitures, Nickel VO en a partout mais pas de trace de concession automobile, ni d’informations sur les véhicules (ndlr: pourtant obligatoire pour les vendeurs professionnels. Selon un décret de 1978, les véhicules en vente ou exposés en vue de la vente doivent être munis d’un étiquetage apposé sur le véhicule et portant, en caractères apparents et de mêmes dimensions, les mentions obligatoires : kilométrages, année, modèle, puissance, motorisation… ). A croire que le gérant ne veut pas trop mettre en avant son petit commerce. Pour le véhicule demandé, il faut se rendre dans un autre parking situé dans le sous-sol de la résidence et où se trouve son bureau et son appartement personnel. Avant d’aller voir la voiture, je suis les autres acheteurs dans les bureaux de la concession pour récupérer les clés du véhicule qui m’intéresse.
Discrétion avant tout
Au quatrième étage de la résidence, un bureau sans inscription, sans plaque. Il faut savoir rester discret. A l’intérieur, canapé, bureau, chaises et pneus entreposés dans le fond de l’appartement. Le gérant me demande de patienter pendant qu’il règle les derniers détails pour finaliser l’achat de l’autre véhicule. Tout est payé en cash et c’est fiston qui fait les factures. Après avoir vu les billets défilés – 2.500 euros en petite coupure – le gérant m’emmène dans le sous-sol voir le véhicule haut de gamme. « C’est là où je mets les belles voitures« , explique-t-il. Au premier sous-sol, plusieurs 4×4 BMW, un coupé sportif… garés un peu partout. Je me dis intéressé par la voiture, on l’inspecte. De prime abord, le véhicule parait convenable. J’embarque avec son fils pour faire un tour, pendant ce temps là papa voit un autre client. Des clients qui se bousculent puisque le téléphone du gérant n’arrête pas de sonner. Dans la voiture, le fils me vante les mérites du véhicule. « Elle monte facilement à 180 ou 190 km/h, c’est une bonne voiture« , lâche-t-il. Pas très rassurant pour l’acheteur sur l’utilisation précédente du véhicule.
Après notre petite virée – en espérant que le véhicule était assuré – pas le temps de réfléchir. « La voiture vous intéresse ? Vous la voulez pour combien ? Dis moi ton prix« , me demande-t-il. Chez Nickel VO, on ne perd pas de temps avec les clients. Le véhicule affiche 16.000 euros. Je propose 1.000 euros de baisse. « Pas de problème. On va dans mon bureau vous déposez un acompte pour bloquer le véhicule. Vous me donnez 1.500 euros et c’est bon« , lâche-t-il. Je calme alors le jeu et explique que je préfère payer par chèque de banque puisque je n’ai pas cette somme sur moi.
On préfère les transactions en cash et par virement
Mais avant d’acheter, j’aimerais avoir connaissance du carnet d’entretien, du contrôle technique, du certificat de non gage et des papiers nécessaires à la vente. Le fils reprend la main et m’amène dans le bureau. Il sort le carnet d’entretien pas à jour, un peu embêtant pour une voiture de cette gamme, et des tas de factures avec lesquelles se mélangent des devis. Il faut bien regarder mais tout est fait pour que vous ne vous attardiez pas trop sur la paperasse. Le temps c’est de l’argent. Par contre, le contrôle technique ne m’a jamais été présenté. Le gérant insiste pour un règlement par virement. « C’est plus rapide et plus simple« , explique-t-il. Je lui explique préférer ne pas faire de transaction sans chèque de banque, pour plus de sécurité. Il comprend mais insiste une nouvelle fois pour un virement et donne son RIB. Devant l’insistance, je m’arrête là, décide de réfléchir et de lui donner une réponse le lendemain. Bien sûr, aucune suite ne sera donnée à la transaction.
Au-delà de ce commerce à la limite de l’illégalité, plusieurs questions se posent. Le concessionnaire a été sommé par la police de ne plus garer ses véhicules sur la voie publique. Pourquoi rien n’a été fait alors que les commerçants et riverains se plaignent continuellement du problème ? Le gérant préfère et insiste lourdement pour des paiements en liquide ou par virement. Se pose alors la question de sa situation vis à vis du Fisc. Comment le Conseil général – propriétaire du parking de Champ-Fleuri – ou la SIDR laisse-t-elle perdurer cette situation ?
En plus de faire de la concurrence déloyale – pas de charges inhérentes à la concession – le gérant de Nickel VO s’expose à des sanctions pénales si et seulement si la mairie de Saint-Denis, la SIDR ou le Conseil général décident d’appliquer un certain nombre de dispositions pénales entre leurs mains. Le gérant de Nickel VO risque plusieurs amendes et la confiscation de ses véhicules.