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Nadia Ramassamy : « Les Outre-mer n’appartiennent pas à la France, ils sont la France »

La Députée de La Réunion, Nadia Ramassamy, livre une tribune libre sur la situation des territoires ultramarins alors que l'année 2019 débute. "L’année qui commence sera pleine de défis pour la métropole et les territoires ultramarins. En raison des derniers mois de 2018 qu’a connu La Réunion, une partie de notre avenir se décide en 2019", écrit-elle.

Ecrit par Zinfos974 – le vendredi 04 janvier 2019 à 17H17

« L’année qui commence sera pleine de défis pour la métropole et les territoires ultramarins. En raison des derniers mois de 2018 qu’a connu La Réunion, une partie de notre avenir se décide en 2019.

En effet, la fin d’année 2018 a été marquée à la Réunion par le mouvement des « Gilets jaunes » avec des actions menées sur l’Île pendant plus de deux semaines. Report des examens universitaires, fermeture des écoles, discontinuité des services administratifs, perturbation du trafic aérien, portuaire et routier, rayons des supermarchés vides…L’Île fut à l’arrêt.

En marge des « Gilets jaunes », des violences ont secoué La Réunion, des pillages aux incendies en passant par des dégradations. Le Préfet a même dû instaurer pendant quelques jours un couvre-feu.

Les violences sont inacceptables et les attaques délibérées contre les pompiers et les forces de sécurité, tout autant.

Loin des plages paradisiaques, d’une biodiversité foisonnante et des éruptions volcaniques, La Réunion a connu sa plus grande crise sociale depuis le début des années 1990. Des « Gilets jaunes » du jour aux « Gilets noirs » la nuit tombée, ce sont deux expressions d’un seul et même sentiment de colère et d’abandon qui ont frappé les Réunionnais.

La ministre des Outre-mer est venue annoncer une baisse des prix des carburants, une baisse des prix des biens de consommation et la définition d’un nouveau modèle de contrats aidés, mais ces annonces relevaient de la gestion de crise et non d’un traitement politique de la situation réunionnaise.

Le constat est connu et il est rappelé régulièrement, 40 % des Réunionnais vivent sous le seuil de pauvreté, plus de la moitié des moins de 25 ans sont au chômage et la nourriture est 40 % plus chère qu’en France métropolitaine.

Après la Guadeloupe en 2009, la Guyane en 2017 et Mayotte en début d’année, c’est fut le tour de La Réunion de s’embraser et de susciter l’incompréhension d’une métropole qui aurait tort de lire ces mouvements comme des simples émotions postcoloniales.
La Métropole a toujours éprouvé un sentiment mêlé de fascination et de langueur à l’égard des territoires ultramarins, lointains et divers.

Autrefois chantre d’un discours universaliste et fière d’assumer son dessein de puissance mondiale, la France se recroqueville sur elle-même. Pour preuve, seulement 40 % des Français savaient qu’un référendum sur la pleine souveraineté et l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie allait avoir lieu en octobre dernier et la disparition de France O ne semble pas susciter une grande émotion.
Or les Outre-mer, n’appartiennent pas à la France, ils sont la France. Une France présente sur les cinq continents, aux frontières maritimes et terrestres avec d’innombrables États et riche d’une multitude de cultures. Implantée aux quatre coins du monde, la France n’est pas uniquement européenne, elle est caribéenne, pacifique, atlantique et de l’Océan Indien. Cette position lui permet de côtoyer de près les principales puissances régionales et mondiales. La Chine, les États-Unis, le Brésil, l’Afrique du Sud, l’Inde, l’Australie…

Présente dans l’ensemble des bassins océaniques du monde, la France dispose d’un trésor de biodiversité, des ressources énergétiques offshore exceptionnelles et la deuxième Zone économique exclusive du monde. Avec son espace maritime, la France est le sixième plus grand pays au monde, pour une population représentant seulement 1 % de la population mondiale.
Si la France métropolitaine s’est historiquement construite sur un modèle hérité de Colbert et des Jacobins, la globalisation contemporaine valorise les réseaux, les échanges, les mobilités, les flux et les diasporas. L’hexagone et les territoires ultramarins donnent à la France une stature archipélagique, lui permettant d’être un véritable acteur de la mondialisation et non de la subir. Suite au Brexit, la France sera d’ailleurs le seul État européen présent dans l’hémisphère sud.

Les outre-mer c’est 97% de notre espace maritime, c’est la fusée Ariane, ce sont des bases militaires navales aux abords des carrefours stratégiques, c’est 80 % de la biodiversité française, c’est de l’or, du nickel, du cobalt, du pétrole, des environnements idéals pour le développement des énergies renouvelables, pour la recherche médicale des maladies émergentes ainsi qu’une jeunesse nombreuse, formée et avide de s’engager, comme en témoigne le succès du Service militaire adapté.

Loin d’être les « reliquats » de l’Empire, ils sont à l’avant-garde des grands défis de demain auxquels la France devra composer et méritent mieux que le trio subventions, dérogations, défiscalisations.

A l’heure où l’expansionnisme chinois se renforce dans le Pacifique, où la Russie plante son drapeau au fond de l’Arctique, où le Canada réagit vivement aux demandes d’extension du plateau continental de Saint-Pierre-et-Miquelon, où Maurice revendique l’île Tromelin, où Madagascar revendique les îles Eparses, où le Brésil lorgne sur l’or guyanais, certains devraient s’interroger sur l’apport inqualifiable des Outre-mer à la métropole au lieu de véhiculer un discours mélangeant relents coloniaux et égoïsme financier.

Inestimable, voilà la valeur des territoires ultramarins. Ils apportent à la France les biens les plus précieux pour une Nation et un État : le rayonnement, l’indépendance, et la souveraineté. En un mot, la liberté. »

 

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