"Ma femme et moi étions au bord du divorce. Elle connaissait Bruno Picard depuis l’adolescence. On a décidé de se rapprocher de Dieu et on a rejoint Extravagance", raconte Pierre*, gérant d’une entreprise informatique dans le sud de l’île. Le quadragénaire qui aime la musique et le chant intègre le groupe des louanges. "Petit à petit, j’ai dû m’impliquer de plus en plus mais aussi donner 10 % de nos revenus".
Pendant trois ans, Pierre a versé 3600 euros par an au mouvement évangélique dont les célébrations se déroulent trois fois par semaine dans la zone industrielle de Saint-Pierre. "Personne ne nous obligeait à rien. Mais le discours des pasteurs est culpabilisant. Si vous ne donnez pas, c’est que vous n’obéissez pas à Dieu... et vous aurez des problèmes. Toute notre vie tournait autour de l’église. Manquer une célébration était très mal vu de sorte que nous n’avions plus de vie sociale".
Comme d’autres, Pierre raconte qu’au début, chacun peut donner ce qu’il veut à l’église dirigée par Bruno Picard. Mais très vite, les dons deviennent systématiques "Bruno Picard nous parle de loi spirituelle c’est à dire que Jésus a tout donné pour nous. A nous de faire pareil en nous acquittant de notre dîme avant toute chose" poursuit Pierre.
"Comme par hasard, les prophéties sont le plus souvent destinées à ceux qui donnaient beaucoup de leur temps et de leur argent" témoigne Valérie* qui a pris ses distances avec le mouvement. "Tous nos choix de vie doivent être soumis à Bruno Picard comme déménager, se marier, changer de travail" témoigne la jeune femme qui s’est investie au sein du mouvement de 2014 à 2018 en effectuant de nombreuses tâches pour "expier ses péchés".
"La dime, c’est 10 % de tout ce que l’on touche. Même s’il s’agit du RSA ou de prestations sociales" indique Béatrice*, 38 ans, qui déplore que sa famille soit totalement investie dans la vie du mouvement et parle "de lavage de cerveau".
La trentenaire a par ailleurs participé au projet "Les cuisines de l’espoir", un projet de réinsertion sociale à l’attention d’anciens détenus et de nécessiteux. Des fonds avaient été récoltés via le site Hello Asso. "Mais le projet n’a jamais vu le jour et l’argent a disparu" fustige l’ancienne fidèle.
"Plusieurs critères caractérisant la dérive sectaire sont réunis" lance Rudy Thazard qui a porté plainte le mois dernier contre Bruno Picard et le mouvement. Une plainte prise au sérieux par la procureure de la République du sud, Caroline Calbo, qui a ouvert une enquête préliminaire il y a trois semaines pour abus de faiblesse.
Rudy Thazard évoque la déstabilisation mentale, les exigences financières, l’engagement exclusif dans le mouvement, le dévouement aux pasteurs et la perte d’esprit critique pour en citer quelques uns. "J’ai des éléments et j’irai jusqu’au bout. Bruno Picard est dangereux" martèle l’ancien conseiller en gestion de patrimoine qui a intégré le centre évangélique protestant lorsqu’il avait 16 ans. Bruno Picard, qui marche sur les traces de l’évangéliste sud-africain Marc Bredenkamp, était alors en charge des jeunes avant de créer son propre mouvement, Hosanna en 2000, devenu Extravagance il y a une dizaine d’années.
"Il y a des familles qui nous ont contactés en 2017, 2019, 2020, car elles s’inquiètent pour un des leurs. Une mère était prête à déshériter sa fille et donner un terrain à l’association Extravagance" raconte Serge Fabresson à titre d'exemple. Le président de l’association de défense de la famille et de l’individu victimes de sectes, une émanation de la Miviludes basée à Saint-Denis, évoque des ramifications d’Extravagance dans des associations sportives, sociales ou bien dans le domaine de la formation. Et selon nos informations, dans la presse réunionnaise aussi.
Un système pyramidal bien huilé mais rien d’illégal bien au contraire, affirme l’avocate de Bruno Picard depuis 2018, Me Mahalia Galais, une fidèle du mouvement. "Tous les dons sont manuels. Il n’est rien demandé de précis, chacun donne ce qu’il veut selon le fonctionnement d’une association qui souvent repose sur l’implication de chacun", explique le conseil rappelant les principes d’enseignement bibliques dispensés au sein de l’église que chacun est libre de respecter.
"Sur les 1500 fidèles, il y a très peu de mécontents. C’est regrettable pour eux car l’église est là pour les aimer, les aider et les servir", poursuit la robe noire annonçant un revenu de 3.000 euros net par mois pour le couple pastoral Picard. Pas de quoi fouetter un chat.
L’association cultuelle est une association à but non lucratif. Un conseil d’administration est à sa tête, accompagné d’un commissaire aux comptes. "Tout est transparent et certifié", assure Me Galais.
C’est ce que les enquêteurs de la brigade financière de Saint-Pierre vont s’employer à vérifier dans les semaines qui viennent.
*Prénoms d'emprunt
Pendant trois ans, Pierre a versé 3600 euros par an au mouvement évangélique dont les célébrations se déroulent trois fois par semaine dans la zone industrielle de Saint-Pierre. "Personne ne nous obligeait à rien. Mais le discours des pasteurs est culpabilisant. Si vous ne donnez pas, c’est que vous n’obéissez pas à Dieu... et vous aurez des problèmes. Toute notre vie tournait autour de l’église. Manquer une célébration était très mal vu de sorte que nous n’avions plus de vie sociale".
Comme d’autres, Pierre raconte qu’au début, chacun peut donner ce qu’il veut à l’église dirigée par Bruno Picard. Mais très vite, les dons deviennent systématiques "Bruno Picard nous parle de loi spirituelle c’est à dire que Jésus a tout donné pour nous. A nous de faire pareil en nous acquittant de notre dîme avant toute chose" poursuit Pierre.
"Comme par hasard, les prophéties sont le plus souvent destinées à ceux qui donnaient beaucoup de leur temps et de leur argent" témoigne Valérie* qui a pris ses distances avec le mouvement. "Tous nos choix de vie doivent être soumis à Bruno Picard comme déménager, se marier, changer de travail" témoigne la jeune femme qui s’est investie au sein du mouvement de 2014 à 2018 en effectuant de nombreuses tâches pour "expier ses péchés".
"La dime, c’est 10 % de tout ce que l’on touche. Même s’il s’agit du RSA ou de prestations sociales" indique Béatrice*, 38 ans, qui déplore que sa famille soit totalement investie dans la vie du mouvement et parle "de lavage de cerveau".
La trentenaire a par ailleurs participé au projet "Les cuisines de l’espoir", un projet de réinsertion sociale à l’attention d’anciens détenus et de nécessiteux. Des fonds avaient été récoltés via le site Hello Asso. "Mais le projet n’a jamais vu le jour et l’argent a disparu" fustige l’ancienne fidèle.
Une pompe à fric. Rien de religieux
"Plusieurs critères caractérisant la dérive sectaire sont réunis" lance Rudy Thazard qui a porté plainte le mois dernier contre Bruno Picard et le mouvement. Une plainte prise au sérieux par la procureure de la République du sud, Caroline Calbo, qui a ouvert une enquête préliminaire il y a trois semaines pour abus de faiblesse.
Rudy Thazard évoque la déstabilisation mentale, les exigences financières, l’engagement exclusif dans le mouvement, le dévouement aux pasteurs et la perte d’esprit critique pour en citer quelques uns. "J’ai des éléments et j’irai jusqu’au bout. Bruno Picard est dangereux" martèle l’ancien conseiller en gestion de patrimoine qui a intégré le centre évangélique protestant lorsqu’il avait 16 ans. Bruno Picard, qui marche sur les traces de l’évangéliste sud-africain Marc Bredenkamp, était alors en charge des jeunes avant de créer son propre mouvement, Hosanna en 2000, devenu Extravagance il y a une dizaine d’années.
"Il y a des familles qui nous ont contactés en 2017, 2019, 2020, car elles s’inquiètent pour un des leurs. Une mère était prête à déshériter sa fille et donner un terrain à l’association Extravagance" raconte Serge Fabresson à titre d'exemple. Le président de l’association de défense de la famille et de l’individu victimes de sectes, une émanation de la Miviludes basée à Saint-Denis, évoque des ramifications d’Extravagance dans des associations sportives, sociales ou bien dans le domaine de la formation. Et selon nos informations, dans la presse réunionnaise aussi.
Un système pyramidal bien huilé mais rien d’illégal bien au contraire, affirme l’avocate de Bruno Picard depuis 2018, Me Mahalia Galais, une fidèle du mouvement. "Tous les dons sont manuels. Il n’est rien demandé de précis, chacun donne ce qu’il veut selon le fonctionnement d’une association qui souvent repose sur l’implication de chacun", explique le conseil rappelant les principes d’enseignement bibliques dispensés au sein de l’église que chacun est libre de respecter.
"Sur les 1500 fidèles, il y a très peu de mécontents. C’est regrettable pour eux car l’église est là pour les aimer, les aider et les servir", poursuit la robe noire annonçant un revenu de 3.000 euros net par mois pour le couple pastoral Picard. Pas de quoi fouetter un chat.
1.250.000 euros de dons en 2018Pourtant, les ressources de l’association provenant essentiellement des offrandes faites par les donateurs - plus d’un million d’euros en 2018 -, la moitié, soit 650.000 euros, est directement reversée à la dizaine de pasteurs qui officient. Et ce, sous la forme d’indemnités plutôt que de salaires, une formule permettant d’éviter de payer des charges sociales.
L’association cultuelle est une association à but non lucratif. Un conseil d’administration est à sa tête, accompagné d’un commissaire aux comptes. "Tout est transparent et certifié", assure Me Galais.
C’est ce que les enquêteurs de la brigade financière de Saint-Pierre vont s’employer à vérifier dans les semaines qui viennent.
*Prénoms d'emprunt