Mercredi matin, le Recteur d’académie a visité deux écoles du Port. Elles ont pour particularité d’accueillir en leur sein des classes bilingues créole / français.
La visite a commencé par un briefing des chefs d’établissements. Une discussion à bâtons rompus où Mostafa Fourar n’a cessé de montrer sa vigilance quant à l’utilisation politique du créole à l’école.
« Ok pour l’aspect culturel de l’apport du créole en classe, mais ce à quoi je dois veiller en tant que Recteur c’est s’il y a une progression dans les connaissances ? Quelle est l’efficacité ? Met-on l’enfant en confiance ? »
Les réponses du corps enseignant se feront attendre. « Le dispositif a démarré à la rentrée 2011 » explique Giovanni Prianon, maître itinérant. Difficile dans ces conditions d’avoir un recul sur les bénéfices de l’apport du créole en classe. Toujours est-il que le dispositif n’a pas fait de vagues dans la ZUP 1 du Port où les parents l’ont vu d’un bon oeil.
L’autre incompréhension entre un corps enseignant acquis à la cause du créole et la posture prudente du Recteur est venue du déploiement de postes jugé toujours faible par les premiers. Le Recteur tempère ces demandes récurrentes. L’ouverture de postes procède selon lui d’une chronologie établie : « ce sont les parents qui en font la demande auprès des chefs d’établissements, qui eux-même font remonter les informations ».
« On a des personnes convaincues qui en veulent toujours plus. Ce n’est pas qu’une question d’envie. L’Education nationale dit « oui » : il faut tenir compte des langues régionales, mais c’est avant tout une question d’efficacité. Moi en tant que Recteur je veux aider les enfants créolophones, même si ça peut les aider dans les mathématiques…Ce sera intéressant de regarder ça dans la durée ».
Au Port, le créole passe bien chez les parents
Sans doute que les réponses entre les parents et le corps enseignant devront également être coordonnées dans le futur. Voyez plutôt : « les parents ont été prévenus de l’ouverture de classes bilingues à l’école maternelle Kergomard et primaire Francis Rivière du Port » nous assurait l’inspecteur de circonscription.
Les parents présents que nous interrogerons diront tout l’inverse. Fort heureusement, la mise en place de classes créolophones n’a pas eu sur eux d’effet répulsif. « J’ai été surprise à la rentrée » raconte Florence, une jeune maman dont l’enfant est en grande section « mais je suis pour la prise en compte de notre culture réunionnaise à l’école ». Même son de cloche du côté de la famille Peltier, des métropolitains venus de Charente. « Notre fille a été inscrite sans savoir, mais je trouve que c’est bien d’apprendre si petit pour former l’oreille. C’est une démarche de découverte » se réjouit le papa.
Le projet expérimental du Port qui concerne 145 élèves (les deux établissements confondus) se poursuit donc en attendant une première évaluation tant attendue par le Recteur.
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Quelques chiffres :
A la rentrée 2012, dans le 1er degré, il y a 20 classes maternelles bilingues, c’est-à-dire des classes à parité horaire français créole. Ces classes scolarisent 476 élèves de petite, moyenne et grande sections.
Dans le second degré, il s’agit de l’option « langue et culture régionale », qui est une option facultative et repose donc sur l’existence ou non d’une demande au sein de l’établissement. Le nombre total d’élèves : 365 en collège et 330 en lycée.