La connaissance du passé de Saint-Paul s’affine avec ce qui remonte de la découverte près de la mairie, rue François Lenormand. Les experts qui y travaillent visent à mieux camper le puits dans le contexte historique de l’époque. Les archives, grâce aux recherches d’un historien saint-paulois, ont déjà pas mal parlé.
La signature sculptée d’Elie Eudor, un esclave tailleur de pierre de talent, est présente sur le site, comme en d’autres endroits de la ville. Vient d’apparaître un autre personnage intéressant, Marcelin Galon, dont le nom est sculpté sur le mur de la maison Pota, à côté de celui d’Elie Eudor. Pour qui cherche un trésor, eh bien le voilà ! En ce sens que ce sont de tels personnages qui enrichissent la connaissance du passé de la ville ! Marcelin Galon est un affranchi qui s’est enrichi et qui a acheté des esclaves pour les affranchir. Il a montré en plusieurs occasions sa solidarité avec le petit peuple saint-paulois. C’est aussi dans ce type de comportement que le métissage qui construit la Réunion a puisé toute sa force.
Le journaliste qui a présenté ce dossier, sensible à la portée symbolique de cette découverte, suggère que la rue Labourdonnais, qui fait un angle avec celle de Lenormand, pourrait après débat et recherche de consensus avec les riverains porter le nom de Marcelin-Galon. Tout en sachant qu’à l’autre coin du mur se trouve la rue Sarda-Garriga.
Mais l’exploitation de ce trésor historique ne doit pas être l’affaire des seuls experts et d’un petit comité décisionnel. Le travail de recherche et de confrontation doit être mené largement dans le cadre d’une étude socio-économique de toute cette zone qui va de l’église à la place de mairie, et au débarcadère sur le front de mer où l’activité maritime était florissante. Il importe aussi de resituer des femmes et des hommes qui ont marqué leur époque pour mieux comprendre les relations sociales parfois complexes qui se tissaient, bien que l’on sache que l’affranchi n’a pas eu un statut d’égalité de citoyens, même si une vision d’assimilation existait.
Oui, « l’histoire n’a pas la place qui lui revient dans notre espace culturel ». C’est pourquoi, par exemple, la préparation du 20 décembre doit prévoir une plongée dans nos mémoires de façon à améliorer encore et toujours notre vivre ensemble, par des débats ayant fait l’objet d’une large information et qui doivent être suivis d’une publication des contenus pour enregistrer les avancées et cerner les dissensions. Ce n’est qu’à partir de cette confrontation des regards sur le passé entre experts, citoyens engagés et associations diverses que l’on pourra mieux, par exemple, approcher un consensus pour parler de l’affectation de l’hôtel Lacay, de la réhabilitation de la maison Pota et d’un nouveau nom à une partie de la rue Labourdonnais. Notre histoire forge aussi notre avenir.
Aimé LEBON, Bois de Nèfles Saint-Paul