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Lettre ouverte d’un citoyen attentif sur la contestation populaire

Le mouvement des «  gilets jaunes » est en train de prendre une ampleur inattendue pour certains. Inattendue pour les politiques mais pas si inattendue que ça pour le peuple. Le peuple, qui depuis des décennies, souffre au quotidien et désespère face aux difficultés qu’il doit affronter. La fracture avec les gouvernements successifs n’a fait […]

Ecrit par Obi, citoyen concerné de la Réunion – le lundi 26 novembre 2018 à 13H56

Le mouvement des «  gilets jaunes » est en train de prendre une ampleur inattendue pour certains. Inattendue pour les politiques mais pas si inattendue que ça pour le peuple. Le peuple, qui depuis des décennies, souffre au quotidien et désespère face aux difficultés qu’il doit affronter. La fracture avec les gouvernements successifs n’a fait que s’agrandir au fil des ans et le fossé s’est continuellement creusé face à l’inefficacité des politiques. Manifestation après manifestation, contestation après contestation, le peuple, soi-disant souverain, n’a pu que constater son impuissance devant une situation qui empire continuellement. Le mouvement de contestation actuel n’est pas apparu sur un coup de tête il y a quelques jours, mais est le résultat de dizaines d’années de «  maltraitance sociale et politique » et d’une accumulation de souffrances quotidiennes résultant d’une inefficacité constante des différents gouvernements. Le peuple se sent abandonné par une classe politique totalement déconnectée des réalités et des difficultés quotidiennes.

Les français en ont marre car leur qualité de vie ne s’améliore pas. Tout augmente sauf les salaires. Aujourd’hui, même le fait d’avoir un emploi stable ne protège pas contre la pauvreté et bon nombre de travailleurs sont dans une situation aussi précaire que ceux qui ne travaillent pas. Les jeunes s’inquiètent pour leur avenir qui paraît plus qu’incertain, ceux qui travaillent tentent bien que mal de survivre malgré les difficultés croissantes et les retraités, après avoir trimé pendant des décennies, se voient encore ponctionnés, sans aucun espoir d’une vie plus paisible après une vie de labeur.

Le fossé se creuse inévitablement entre la classe dirigeante et le peuple. Les français ne veulent plus être gouvernés par des gens qui ne les comprennent pas. La majorité des personnalités politiques de premier ordre au niveau national sont issues de milieux favorisés et n’ont jamais partagé les difficultés quotidiennes de bon nombre de français malgré leurs tentatives répétées d’affirmer qu’ils comprennent la souffrance du peuple et qu’ils sont comme eux. Emmanuel Macron, fils de médecins, diplômé de Sciences Po et de l’ENA, ancien banquier d’affaires et multimillionnaire, n’a certainement jamais connu de fins de mois difficiles, ayant grandi dans un milieu aisé. Il n’est pas le seul car la plupart des grandes figures politiques française sont millionnaires et ont donc un niveau de vie dépassant largement celui du français moyen. Même l’insoumis Jean Luc Mélenchon, si prompt à critiquer les élites. François Hollande, Nicolas Sarkozy, Alain Juppé, Edouard Philippe, Laurent Fabius, Jean Marc Ayrault, Muriel Pénicaud, Bruno Le Maire, Jean Yves Le Drian, Dominique de Villepin, Christian Estrosi, Anne Hidalgo, Jean Pierre Raffarin, etc…Tous sont millionnaires et la liste est loin d’être exhaustive ! Bon nombre d’hommes et de femmes politiques ont un patrimoine largement supérieur aux 113 900 € du patrimoine moyen des français selon l’INSEE.

Comment pouvoir prétendre comprendre les difficultés que rencontrent chaque jour les français quand on a jamais connu le chômage, le surendettement, les fins de mois difficiles ? Comment dire «  je vous comprends » quand on ne s’est jamais retrouvé face à un frigo vide, une lettre de relance d’un huissier, une facture impayée, un relevé bancaire affichant un découvert ? Comment dire «  je sais ce que vous ressentez » quand on a jamais été obligé de dire à ses enfants «  cette années on partira pas en vacances parce qu’on a pas les moyens » ? Bon nombre d’élus n’ont pas mis les pieds dans un hypermarché depuis des lustres car ils ne font pas leurs courses eux-mêmes et ne connaissent même pas le prix d’une baguette, d’un pack de yaourts, d’un bidon de lessive, d’un kilo de tomates, d’un ticket de métro ou d’un pain au chocolat, à l’image de Mr Coppé par exemple. Bon nombre de députés ou de sénateurs sont incapables de réserver eux-mêmes un billet d’avion ou de train , tant ils sont habitués à être assistés continuellement dans leur vie quotidienne.

Un député gagne 5 782€ net par mois et bénéficie de presque 19 000€ par an pour ses frais de taxi, téléphone et courrier, soit presque 1 600€ par mois. Il bénéficie également de 15 500€ pour s’équiper en matériel informatique. Il voyage en train gratuitement et en 1ère classe et a un accès gratuit à tous les transports parisiens. Il peut aussi se faire rembourser ses nuits d’hôtel jusqu’à 200€ par nuit. Les sénateurs sont également logés à la même enseigne. Un niveau de vie qui est au-delà de l’imaginable pour le français lambda, smicard, qui lui, paye tous ces services et ne bénéficie d’aucun passe-droit ni privilège. Et que dire de tous ces autres élus qui cumulent les postes (président de ceci, vice-président de cela, membre de tel conseil d’administration, de tel directoire…) et qui s’enrichissent avec l’argent de ceux qui les ont élus ?

Que dire d’un président de Région qui s’octroie une augmentation de 6 800€ ( portant ses revenus à plus de 11 000€) en tant que président de la SEM des musées régionaux alors même que 9 employés de cette structure avaient dû être licenciés faute de moyens financiers? Et cela sans aucun état d’âme, dans le contexte social actuel que nous connaissons tous…( ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres)

Que dire de tous ces élus multi-condamnés par la justice pour des faits commis pendant leur mandat et qui aujourd’hui, siègent toujours au sein de l’Assemblée Nationale, du Sénat, des Conseils Régionaux et Départementaux, des Communautés de communes et des mairies ? Quelle image cela renvoie auprès du peuple ? Aujourd’hui on doit avoir un casier judiciaire vierge pour enseigner à quelques dizaines d’élèves, mais on peut représenter des milliers voire des millions de personnes et avoir accès à des millions d’euros d’argent public en ayant déjà été condamné par la justice de son pays. Tout est normal…

La classe politique dirigeante est de plus en plus déconnectée des réalités même si elle s’obstine à nous dire le contraire pour préserver son image, car on a l’impression qu’elle n’est accessible qu’à une certaine élite privilégiée qui vit confortablement dans les bureaux dorés des palais parisiens. Depuis plus de 40 ans, les différents gouvernements nous disent qu’il faut leur faire confiance et les réélire car eux seuls ont la solution. Et depuis plus de 40 ans, la situation économique et sociale du pays se dégrade, les inégalités se creusent, le chômage augmente, la pauvreté gagne du terrain. Les riches deviennent plus riches et les pauvres deviennent plus pauvres. En 1986, les Restos du Cœur ont distribué 8,5 millions de repas. En 2017, ils en ont distribué 136 millions !  16 fois plus 30 ans après !!! En 2016, l’association a dépassé le cap des 2 milliards de repas servis depuis sa création. Triste résultat… Et pendant ce temps, le pouvoir en place demande aux retraités de participer à l’effort collectif, fait des cadeaux fiscaux au plus riches, augmente les prix du carburant et pénalise les ménages les plus pauvres.

Toutes les couches de la société sont touchées et toutes les professions sont impactées par le malaise qui règne depuis des années.
Le personnel soignant des hôpitaux travaille dans des conditions épouvantables, en sous-effectif, en manque de moyens financiers. Des services entiers ferment leurs portes, des malades sont pénalisés et la qualité des soins n’est pas toujours ce qu’elle devrait être malgré toute la bonne volonté des médecins, infirmiers et aides soignants qui doivent composer avec les maigres moyens qu’on leur donne. Les forces de l’ordre travaillent également dans des conditions souvent précaires, avec des moyens inadaptés face à l’insécurité croissante. Les enseignants sont logés à la même enseigne et la qualité de l’enseignement se dégrade au fil des ans par manque de moyens.  Les agriculteurs, pris à la gorge par la mondialisation, les politiques agricoles européennes et la grande distribution, peinent à vivre décemment de leur travail alors que ce sont eux qui nous nourrissent. Ils passent leur vie à travailler dans des conditions que peu de gens pourraient supporter, sans aucune reconnaissance de l’Etat et de l’élite parisienne qui n’a que faire des «  bouseux de paysans », et tout ça pour un revenu qui leur permet à peine de survivre et une retraite misérable au vu du noble et honnête travail fourni. Du petit patron de PME au simple employé, tous subissent de plein fouet ces difficultés croissantes avec un sentiment grandissant d’impuissance.
 
Mais aucun élu, aucun ministre, aucun président n’assume sa part de responsabilité dans l’échec que nous connaissons aujourd’hui. Tous ceux qui sont ou qui ont été au pouvoir accusent les autres, leurs prédécesseurs, en disant qu’ils ont juste hérité de la situation et qu’ils estiment avoir fait leur boulot, pour pouvoir dormir sur leur deux oreilles et conserver leur électorat. Qu’ils soient de droite ou de gauche, tous ces politicards se rejettent la faute. Personne ne dit «  oui je suis en partie responsable de ce qui arrive car j’ai été au pouvoir, j’ai fait ceci, je n’ai pas fait ça, j’aurais dû faire ci, je n’aurais pas dû faire ça… » Personne ne dit «  oui j’ai échoué ». Tous sont persuadés (et essayent de nous persuader) qu’ils ont eu un bilan exceptionnel, qu’ils ont fait de grandes choses, qu’ils ont fait avancer le pays et que tout ce qui est positif c’est grâce à eux et tout ce qui est négatif c’est à cause des autres. Chacun se met des œillères et ne voit que son propre intérêt. Le gouvernement dit «  on vous entend, on comprend votre colère, votre souffrance, mais faîtes nous confiance, on sait ce qu’on fait, même si on dirait pas ». Les français sont traités avec un tel mépris de la part des hommes politiques, qui sont persuadés d’incarner la solution ultime, qu’ils n’ont d’autre choix que de descendre dans la rue pour se faire entendre, au risque de froisser la sensibilité et l’égo démesuré des membres de l’exécutif, confortablement installés dans leur palais doré, tels Zeus et ses dieux veillant sur les mortels du haut de l’Olympe.

 Et là, aujourd’hui, tous essayent de récupérer la colère des français dans un but purement électoral, tels des charognards à l’affût d’une carcasse encore tiède, animés par un profond désir de pouvoir. Car c’est le pouvoir ainsi que tout ce qu’il implique qui attire et fait ressortir ce qu’il y a de plus sombre chez les politiques. Tous veulent être adulés, respectés, reconnus et s’enrichir au passage. Peu d’élus « de grande envergure » sont engagés en politique dans l’unique but de servir le peuple. Je mets des guillemets à «  grande envergure » car c’est un terme qui n’a pas vraiment de sens. Les plus diplômés ou les plus médiatisés ne sont pas forcément les plus compétents, bien au contraire. Ils sont soumis à des tentations plus grandes car leurs intérêts sont d’un autre niveau, par rapport à des petits élus locaux ( qui eux-mêmes ne sont pas tous blancs comme neige…)

Le peuple s’est désolidarisé de ses représentants et le mouvement de contestation que nous connaissons actuellement en est la preuve flagrante. La société a évolué mais la façon de faire de la politique est restée la même. On nous a promis un «  nouveau monde » mais on se rend compte que ce nouveau monde n’est finalement rien d’autre qu’une mauvaise copie déguisée de « l’ancien monde » que l’on a tant détesté et combattu. Les nouveaux, sous couvert d’une pseudo-volonté de changement, reprennent en fait les mêmes méthodes que les anciens et retombent donc dans les mêmes travers qui nous ont conduit à la situation calamiteuse que nous connaissons aujourd’hui. Ils sont autant enivrés par l’ivresse du pouvoir que leurs prédécesseurs, autant euphoriques d’avoir accès une telle médiatisation et autant satisfaits d’avoir pu contenter leur égo en accédant au pouvoir pendant que ceux qui les ont élus triment dans la fange comme des forcenés condamnés à engraisser les élites. Mais les français continuent de souffrir et vont de désillusion en désillusion, élection après élection, à cause des intérêts des élus qui divergent inlassablement de ceux du peuple. Ca fait longtemps qu’on ne se comprend plus car le système politique français a éloigné le sommet de la base. Et aujourd’hui, la base veut reprendre la place qui lui est due au sommet…

Le mouvement des gilets jaunes est légitime bien que très mal structuré, malheureusement. Bloquer des routes et des ronds-points, empêcher les gens de travailler, asphyxier les entreprises déjà en difficulté, créer des pénuries….tout cela n’a pas grande utilité et pénalise tous les citoyens qui luttent déjà pour s’en sortir. Contester oui, mais contester intelligemment pour ne pas que le mouvement se retourne contre ses instigateurs. Bloquer les endroits stratégiques comme les ministères, les préfectures, les conseils régionaux et départementaux, les centres des impôts, les dépôts pétroliers, les ports, les péages ; en permettant des déblocages ponctuels afin que les commerces et stations services puissent se ravitailler pour que la population ne soit pas complètement isolée et prise en otage et qu’elle puisse continuer à suivre le mouvement. Un blocage complet équivaut à se tirer une balle dans le pied. C’est totalement contre-productif car ça fait le jeu des politiques et ça augmente le ressentiment envers les manifestants, ce qui n’est pas le but.

 La contestation doit se faire dans la concertation et le bon sens, sans quoi, elle finira par se consumer elle-même et n’aura servi à rien. Le peuple doit se montrer plus intelligent que les gens qu’il a élu car la France ce n’est pas le président, ni les ministres. La France c’est le peuple. La République française a plus de 67 millions de représentants, 67 millions de voix. Ce sont ces voix qui doivent se faire entendre et pas une minorité qui s’accapare la tribune.

La colère gronde, le peuple hurle, les français n’en peuvent plus… Ecoutez-nous !!!!

 

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