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Lettre ouverte… au Père Noël

« C’est cool ! On peut demander ce qu’on veut ? » C’est bientôt noël et comme dit mon petit cousin Lulu, qui fait semblant de croire au Père Noël parce que ça attendri les grandes personnes et que ça lui laisse la possibilité de commander plus de cadeaux, « si je fais ma liste […]

Ecrit par – le jeudi 01 décembre 2016 à 10H06

« C’est cool ! On peut demander ce qu’on veut ? »

C’est bientôt noël et comme dit mon petit cousin Lulu, qui fait semblant de croire au Père Noël parce que ça attendri les grandes personnes et que ça lui laisse la possibilité de commander plus de cadeaux, « si je fais ma liste dans les premiers, j’aurai plus de chance ».

« C’est mon crêve, la chance ! Avec elle on peut gagner plein de pognon ! » réagit Lulu, 8 ans, qui m’inspire cette « commande ». Il dit « crêve » pour « rêve », comme un acte manqué, un mot manqué… comme si on allait tous « crêvé »….

Il fait des fautes de français, de prononciation. Sa maîtresse s’acharne à lui enseigner le bon français alors qu’il entend penser que le créole c’est trop la honte. On fait toujours venir des maîtresses, des journalistes, des méthodes, des modèles qui ne pourront jamais saisir toutes les spécificités façonnées par l’Histoire, toutes les subtilités de l’âme d’un peuple forgée dans les épreuves du métissage pour apprendre à vivre ensemble et à mettre ce savoir au service du développement. La filière rhum peut continuer à enrichir les mêmes, pendant que le peuple crève à boire, à manger, à acheter ce qui est importé, suivant la politique des profiteurs qui prive notre jeunesse d’emplois, de rêve de développement.

Qui prend en compte ce que le petit créole a à apporter ? Voter et c’est tout ! Suivons le vieux courant qui nous abreuve et qui nous laisse sous perfusion, sous illusion pour croire que « La France n’est pas coupable d’avoir fait partager sa culture », dans la violence, la peur et l’humiliation, sans tenir compte de ce que l’autre peut apporter… C’est lui que nous voyons comme Président. Même pas Marine qui a le ton mais pour qui la diversité ne semble pas être une richesse pour la France…« Vive la France bande quitte ta mère ! » comme dirait le gramoun de mon quartier, des propos que je laisse à votre analyse, pour observer une jeunesse bloquée.  
Dès ses premiers pas de métisse, Lulu sait qu’il faut se cacher de grand-mère Kal, de tous les esclavagistes, de toutes leurs peurs. Domine dans l’inconscient maltraitée par trois siècles de drame (esclavagisme, engagisme, colonialisme), l’idée du « diable rouge », de « la dame blanche » d’un grand « miconnémifétoupouzot », même si c’est « Sitarane », ou Daech pourvu qu’il soit tentateur du camp qui connaît tout et promet la lune en cachant la forêt.

Lulu ne sait pas écrire sans faute mais lit comme un « p’tit Zoreil » de 10 ans et calcule comme un « Chinois » de 12, sans compter qu’il se vante comme un authentique « Malbar » d’être « couillon comme la lune » car les autres ne voient rien en lui. Il veut travailler dans la « finance » des plantes qui libère la tête pour « crêver »(rêver ), comme le copain de son grand frère, fumeur notoire de zamal, alors que son grand cousin, étudiant en faculté de médecine tombe dans la dépression à la suite des affaires qui secouent l’Université de la Réunion. Il y voit bien plus que ce qu’on dit, sauf un avenir. On lui a refusé à 0,3 de la moyenne un outil pédagogique censé soutenir les étudiants proches d’un résultat en lui disant, « Pas de passe droit »…  alors que sa copine, en France, avec 7 de moyenne s’est vue repêchée et encouragée  par cet outil. « Pas de passe droit », alors que la presse révèle les faveurs faites « aux étudiants » qui trichent. 0, 3 est ce l’échec d’un étudiant ou d’un système, un système, qui comme tous les autres systèmes qui se sont succédés sur île ont provoqué des siècles de drames, de souffrances ? Ils ont pour but l’exploitation de la « misère » et la division. Lulu voit lui, « la misère noire » dans les yeux de son cousin, jusqu’à en faire des cauchemars. Son momon i croit li voit bébête !

Plutôt que d’admettre notre ignorance ou notre lâcheté ne condamnons nous pas tout espoir ? Quel parent, quel politicien, quelle société peut on se vanter d’être quand une jeunesse qui a tout, manque de l’essentiel et attend la mort dans l’âme ? Trois siècles de souffrance pour ne plus mépriser l’être différent, pour apprendre par le vivre ensemble, la fraternité, nous n’avons donc rien appris ?

On va tous « crêvé » prédit Assad, le grand camarade zarabe de Lulu qui affirme que le métissage ça ne rapporte pas, « c’est pas du pétrole ! »

Vite ! Acceptons l’autre, sa vérité comme un atout et retenons les couleurs qui doivent « rayonner » (réyonné pour Réunionnais en créole) pour d’une île à la France au monde … Mais j’ai entendu Lulu rétorquer à Assad : « Je sais ce qui rapporte gars ! Les bombes »…

L’histoire parlera toujours pour nous Mais nous avons le choix de nos armes. Ecrire, raconter les épreuves d’un métissage qui a forgé un peuple qui cherche les moyens de dire comment il pense. Encore faut il qu’il croie sans chercher l’approbation d’un « Miconnémifétoutpouzot », encore faut il que les fautes soient assumées, pour que Lulu assume les siennes sans chercher encore à se cacher, à croire que penser, écrire c’est pour une race…

Je demande au Père Noël une opération « 1000 sourires » pour tous les petits Lulu, une émission littéraire pour prouver « qu’un nègre peut penser » (l’inverse est affirmé dans l’histoire de Furcy), des postes d’écrivain public pour faire grandir l’humanité par la jeunesse, et comme Lulu m’a dit qu’un minimum de trois cadeaux c’est raisonnable, mais que quatre c’est « paire et Zuste », je rajoute, qu’on ressuscite grand-mère pour Lulu.

« Assez Foutor » ! Ton petit mot grand-mère pour exprimer ton exaspération devant nos « batailles » que tu orchestrais sous le nez frémissant de grand-père, aussi noire que ta marmite, pour nous éveiller à la fraternité. Et si c’était la clé ? Ecrire pour raconter « Foutor », une connaissance de moins en moins accessible et qui véhicule la valeur qui manque tant au monde, la paix.

En fait, je voulais répondre à un lecteur de Zinfo « Que pense l’étudiant honnête de toutes les magouilles de l’Université à l’heure ou la peur de rater les partielles nouent ses trippes ?

Signé : Un père noël en avance et un Lulu qui s’exclame : J’ai trouvé ! Voilà ce que je veux faire quand je serai grand !

 

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