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Les réactions suite au feu vert de l’Autorité de la concurrence pour le rachat de Vindémia

Suite à l’annonce de l’Autorité de la concurrence de son accord pour le rachat de Vindémia par GBH, les réactions des politiques et des personnalités du monde économique s’enchaînent.

Ecrit par Nicolas Payet – le mardi 26 mai 2020 à 17H54

La décision de l’Autorité de la concurrence fait grincer des dents à La Réunion. Des personnalités du monde économique et politique ont réagi à l’une des opérations commerciales les plus importantes de La Réunion.

François Caillé, président du Groupe Caillé :

« Cette décision est regrettable car elle va à l’encontre des intérêts de l’économie réunionnaise et des promesses faites par le Gouvernement en matière de contrôle des monopoles.
Je suis surpris de cette décision, notamment au regard des analyses et rendus des experts économiques mandatés dans ce dossier. »

 

Jean-Hugues Ratenon, député de La Réunion :

« Le rachat de vindémia par GBH, validé par l’Autorité de la concurrence, n’est que l’expression claire et nette qu’entre les gros il y  a toujours un moyen de s’arranger. Par la même occasion, c’est la démonstration que le système peut perdurer dans le temps au détriment du Peuple, des consommateurs. 

Indéniablement, ce bizness entrainera par la suite une situation de monopole dans le domaine de la grande distribution et renforce dès à présent le monopole économique ; en plus que le groupe GBH est en position dominante dans d’autres secteurs. 
Aucune société normalement constituée ne peut accepter cela. J’ai envie de dire : bas les masques. 
Les propos de Madame Ladoucette, directrice de l’ARS, qui remercie publiquement le groupe Hayot d’avoir offert des masques dans cette crise du coronavirus, alors qu’elle a un devoir de réserve comme tous les fonctionnaires, ne pouvait laisser aucun doute sur cet accord. 

La population Réunionnaise paie très chère ce don de masque. Je regrette que certains élus aient préféré jouer le jeu de leur carrière personnelle à l’encontre des intérêts de la population. »

 

David Lorion, député de La Réunion :

« L’Autorité de la concurrence, instance administrative indépendante, vient d’autoriser le rachat de VINDEMIA par GBH et on ne peut que prendre acte de sa décision. Alors qu’il s’agit de la plus grosse opération de fusion-acquisition en outre-mer, il convient de prendre des garanties pour imposer une situation concurrentielle dans les grandes surfaces alimentaires à La Réunion. Afin de valider le rachat, l’Autorité a donc demandé de céder plus de magasins que prévu initialement. Ainsi, sept établissements (4 hypermarchés, 2 supermarchés et un magasin de produits culturels) devront dès lors être revendus à deux repreneurs réunionnais. 

 
Il faudra aussi que la production locale représente entre 25 à 35% de l’ensemble des achats, condition importante que j’avais suggérée dans ma proposition de loi du 6 novembre 2019 relative au développement et à la mise en valeur de la production locale dans les collectivités ultramarines. Nous devons être capables de faire respecter ces obligations liées à l’autorisation de rachat. D’autre part, le groupe HAYOT s’était engagé moralement à baisser de 5% ses prix en raison des effets bénéfiques liés à la concurrence et de maintenir tous les emplois et les salaires dans ses établissements.
 
Chacun aura à mesurer combien il est important d’être respectueux des engagements pris et de défendre les productions et les entreprises locales dans des économies ouvertes. »

 

Pascal Thiaw Kine, président de l’enseigne E. Leclerc Réunion :

« Je considère cette décision préjudiciable et prise précipitamment dans un contexte qui aurait mérité un examen approfondi. Elle n’est, à mon sens, pas en congruence avec les engagements pris par le gouvernement en matière de contrôle des concentrations.

Les différentes crises économiques et sociales, notamment aux Antilles et à la Réunion, ont mis en lumière les attentes des consommateurs. Or, par cette décision, l’intérêt des consommateurs n’apparaît pas considéré. C’est aujourd’hui de nouveau le même schéma que celui qui s’est largement développé aux Antilles qui se répète avec l’absence d’une concurrence plurielle au détriment des consommateurs et du tissu économique du territoire.

Nous avions exprimé une solution alternative pour une distribution autrement avec des engagements inédits tant pour les citoyens, pour les consommateurs, que pour la production locale. C’est une nouvelle ère économique qui s’annonce à la Réunion et
chacun devra assumer les conséquences de la décision prise sur le territoire. »

 

Huguette BELLO, députée de La Réunion :

« C’est une mauvaise décision à plusieurs titres :

Cette décision intervient dans un contexte de crise économique et sociale extrêmement grave liée à la crise sanitaire, crise qui succède elle-même au mouvement populaire des gilets jaunes dont les principales revendications portent sur le pouvoir d’achat des Réunionnais et contre les situations de monopoles.

Cette décision touche en premier les employés de Vindémia, (4600 employés dans l’Océan Indien). Il n’y a aucun engagement concernant la protection de tous les employés afin qu’aucun d’eux ne fasse l’objet d’un dégraissement des effectifs.

Cet évènement touche les acteurs économiques de par la position de domination qu’entraîne le rachat de Vindémia par le Groupe Bernard Hayot, pas seulement à la Réunion mais dans l’Océan Indien.
Depuis 2014, le groupe Bernard Hayot (GBH) est la première entreprise de l’Océan indien ; en deuxième IBL (à l’île Maurice) et en troisième position du classement, on retrouve… Vindémia !!! que GBH rachète ! Le poids économique de GBH se mesure non seulement en effectifs, en chiffre d’affaire (la barre du milliard d’euros a été dépassée en 2017) mais aussi et surtout aussi à travers les postes de dépenses des ménages réunionnais : 16% du portefeuille du Réunionnais pour SE DEPLACER, 14% du portefeuille du Réunionnais pour SE NOURRIR, 15% du portefeuille du Réunionnais pour S’AMUSER et L’ENTRETIEN de la MAISON, et cela, avant le
rachat de Vindémia.

Cette décision assure une position dominante sur le portefeuille des Réunionnais et sur l’économie réunionnaise.

La concentration du poids économique local entre les mains d’un acteur unique est un signal désastreux donné aux Réunionnais en pleine crise économique, alors que la Chambre de Commerce et d’Industrie de la Réunion estime à 4000 le nombre de fermetures d’entreprises et à 3600 le nombre de salariés qui perdront leur emploi au 31 décembre 2020, alors que l’enquête menée par la CCIR montre que 59% des entreprises consultées redoutent une fermeture, 43 % sont très inquiets et 38 % ne savent pas comment faire pour payer leur loyer pour les trois mois d’avril, mai, juin.

Cette décision touche les petites entreprises locales, le commerce de proximité et ses défenseurs. Les pouvoirs publics devraient s’inquiéter prioritairement de créer les conditions d’un nouveau modèle de distribution, un nouveau commerce de proximité moderne et ancré au cœur de la culture créole, en aidant les acteurs indépendants de la distribution à se structurer en coopératives.

Cette décision touche culturellement le consommateur réunionnais : le groupe Hayot exerce déjà un poids sur le consommateur réunionnais car il est sur un spectre large : voitures, bricolage, alimentation, jardins, ciment…il influence déjà énormément l’acte d’achat des Réunionnais. Ainsi, le Groupe Hayot orientera et dictera la consommation réunionnaise voire celle des îles de l’Océan Indien et donc notre identité, notre culture par le choix des produits proposés. Et d’autres questions se posent : quelle alternative dans l’acte d’achat des Réunionnais ? Quelle valeur culturelle aura l’acte d’achat de chacun de nous ?
Nous étions en droit d’attendre des engagements autres que « se fournir auprès des producteurs locaux à hauteur de [25-35] % des achats totaux réalisés par ses grandes surfaces alimentaires ».

Il n’y a aucun engagement social, territorial, environnemental et de santé publique:
• Aucun engagement en faveur du pouvoir d’achat, d’une part à travers la revalorisation des salaires des employés, d’autre part à travers l’adaptation des prix à la situation de pauvreté à la Réunion.
• Aucun engagement stratégique, économique et financier de décider localement, de garder leur valeur ajoutée et leurs résultats à la Réunion, d’investir localement, d’embaucher localement.
• Aucun engagement de leur participation à un fonds d’aide aux ti boutiks dans un partenariat public/privé.
• Aucun engagement sur la vente de produits à faible empreinte carbone, bio, frais, traçables.
• Aucun engagement sur leur prise de responsabilité dans la gestion des déchets car ce qui se retrouve dans les poubelles des Réunionnais-es vient principalement de la grande distribution (films bouteilles plastiques, canettes, verre…).
• Aucun engagement sur leur prise de responsabilité en matière de santé publique et de lutte contre l’obésité et le diabète à la Réunion. »
 

 

ADECALOM (Association contre la Domination Économique et pour la défense des Citoyens Attachés aux Libertés Outre-Mer) : 

« Nous prenons acte de la décision scandaleuse et humilante pour les réunionnais de l’Autorité de la Concurrence d’accorder le 26 mai 2020 au groupe GBH l’autorisation d’acquérir les actifs de Vindemia. Même si cette décision ne nous surprend pas, au regard de la gestion opaque et manifestement partisane dans ce dossier, nous ne pouvions pas imaginer une instance dite indépendante traiter une affaire d’une telle importance avec autant de mépris et de désinvolture.

Par cette décision, l’ADLC autorise un groupe à détenir sur La Réunion, 40% de parts de marché dans le domaine alimentaire et 60% dans le secteur élargi à de nombreux secteurs de consommation courante. Avec le groupe Leclerc, c’est à terme, 70% des parts de marché alimentaire qui seront détenus par deux entités.
 

Par cette décision, l’ADLC légitime une position dominante d’un groupe dans le domaine de la distribution ; ce qui est contraire au Droit de la concurrence en France ;

Par cette décision, l’ADLC laisse toute possibilité au groupe GBH dès l’opération terminée le soin de peser sur la politique des prix et de les augmenter comme il l’a fait aux antilles

​Par cette décision, l’ADLC compromet à terme toute stratégie réunionnaise de production locale dans les domaines de l’agriculture de diversification et de la transformation notamment ;

Par cette décision, l’ADLC rejoint toutes les stratégies visant à placer notre territoire réunionnais dans une position de soumis et d’esclave économique sous la domination de groupes locaux ou extérieurs.

Alors, qu’à aucun moment l’avenir des salariés de Vindémia n’était menacé, il était possible de discuter des autres possibilités de reprise qui existent et qui auraient permis de construire un nouveau modèle de distribution à La Réunion.

Nous ne pouvons pas accepter cette décision en l’état. Après plusieurs interpellations auprès du Président de la République, de son ministre de l’Economie, ainsi qu’auprès des élus réunionnais, nous réitérons notre demande auprès du Président de la République pour qu’il exerce son droit d’évocation sur ce dossier et qu’il permette l’élaboration d’une alternative à la solution humilante pour les réunionnais proposée par GBH et validée par l’ADLC.

Il n’est pas trop tard pour signer pétition contre le rachat de Vindemia https://bit.ly/2yzApcH

Il n’est pas trop tard pour que le Président de la République dise non à l’ADLC

Il n’est pas trop tard pour ester en justice

Nous nous réservons en dernier ressort la possibilité de saisir le Conseil d’Etat qui devra dire le Droit sur cette entorse manifeste à la liberté de la concurrence ?

 

Jean-Luc Poudroux, député :

Je suis un fervent défenseur de la liberté de commercer et d’entreprendre.

Le groupe GBH dispose au même titre que les entrepreneurs Réunionnais de la liberté et du même droit absolu, et je ne suis pas ceux qui confondent racisme économique et patriotisme économique.

Si le groupe GBH donne des garanties pour que le consommateur et que le producteur local s’y retrouvent, je ne peux être que favorable.

Mais dans le même temps, je souhaite que les groupes réunionnais, les entreprises réunionnaises, les chefs d’entreprises de la Réunion prennent conscience et disposent de tous les moyens et de tous les soutiens nécessaires à davantage de solidarité, d’initiative et d’innovation pour maintenir l’emploi et développer leurs activités sur le sol réunionnais et à l’export surtout dans une période de grande tempête économique et sociale qui s’annonce après le Covid-19

 

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