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Les frontières indépassables de la planète

On ne vous parle que de cela, changement climatique et biodiversité, mais il est d’autres frontières indépassables sur notre bonne vieille Terre. Dans une étude publiée dans Nature (1), il est chiffré neuf frontières vitales à ne pas franchir pour éviter de basculer dans une zone dangereuse pour notre survie : l’acidification océanique, la déplétion […]

Ecrit par Dr Bruno Bourgeon, président d’AID http://aid97400.re – le mardi 10 avril 2018 à 11H34

On ne vous parle que de cela, changement climatique et biodiversité, mais il est d’autres frontières indépassables sur notre bonne vieille Terre. Dans une étude publiée dans Nature (1), il est chiffré neuf frontières vitales à ne pas franchir pour éviter de basculer dans une zone dangereuse pour notre survie : l’acidification océanique, la déplétion de l’ozone atmosphérique, la perturbation du cycle du phosphore et de l’azote, la charge en aérosols atmosphériques, la consommation d’eau douce, le changement d’affectation des terres, et enfin la pollution chimique. Sept ont été quantifiées, quatre sont déjà dépassées. Les deux premières, climat et biodiversité, peuvent à elles seules faire basculer la destinée humaine. Deux autres ont été perturbées de manière irréversible : le changement d’affectation des sols, mesuré par le déclin de la couverture forestière, et les grands cycles biogéochimiques de l’azote et du phosphore : les quantités de » nutriments rejetés dans les sols et dans les eaux par l’activité humaine, entre autres agricole, ne sont plus absorbés assez rapidement par les cycles naturels et polluent l’environnement par l’eutrophisation des eaux. Les conséquences sont immédiates : non potabilité des eaux, explosion des cyanobactéries toxiques pour les humains et les animaux d’élevage, mort de la faune aquatique par manque d’oxygène.

En ce qui concerne l’eau, les chercheurs estiment à 4000 km3/an la frontière de consommation pour éviter les effets catastrophiques : épidémies, pollutions, déclins de la biodiversité, effondrement des écosystèmes. Mais la conséquence la plus directe est la pénurie alimentaire. La consommation mondiale actuelle est estimée à 2600 km3/an, et la marge de manœuvre restante se réduit : fonte des glaciers, augmentation de la population, épuisement des stocks souterrains par l’agriculture. La zone de sécurité est donc très mince, encore amincie par l’inégalité de répartition de la population mondiale : 80% de la population est exposée au risque de pénurie, particulièrement dans les zones densément peuplées : Europe, Inde, Chine.

La pollution chimique est très inquiétante. On sait aujourd’hui les risques  de certains produits chimiques sur l’embryogenèse, sur la fertilité des adultes, les perturbations endocriniennes (diabète, obésité) ou neurologiques (troubles du comportement). Et l’exposition chronique à faible dose concerne toute la population terrienne. Nous en parlerons lors du colloque le 14 avril, à Stella Matutina : « Colloque Environnement et Santé » . Par exemple, lors d’un épandage, 90% des produits restent dans les sols, peuvent migrer vers d’autres zones non contaminées, et contaminent toutes les eaux du voisinage (cas de la déséthyl-atrazine à La Réunion). Les résidus d’insecticides néonicotinoïdes provoquent la désertification des abeilles, mais aussi agissent sur les vertébrés, et finalement sur la faune sauvage et l’agriculture. La pollution atmosphérique n’est pas en reste, voir les grandes villes chinoises ou la vallée du Gange. Et même dans les villes européennes avec les particules ultra-fines (Paris, décembre 2013). Ces pollutions sont la cause de millions de décès, mais elles impactent aussi la biodiversité et les écosystèmes, grevant le pronostic des générations futures qui ne pourront compter sur un système de santé moderne.

Nous ne pouvons vous détailler toutes les frontières. Le but de cet article est de montrer que nous sommes cernés. La transgression de chacune des frontières affecte sérieusement notre santé et notre économie. Pire, elles interagissent entre elles dans un immense effet domino que personne ne maîtrise, que personne ne voit. Ces frontières nous montrent une chose : la grande machinerie industrielle est paradoxalement de plus en plus vulnérable à mesure qu’elle grandit et gagne en puissance ; elle nous conduit sans coup férir vers l’effondrement de notre civilisation.

(1)J. Rockström et al. : « a safe operating space for humanity”, Nature, vol. 461, n° 7263, 2009, p. 472-5.

 

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