Le 2 juin 2020, le maire du Port mettait au vote une affaire qui pourrait finalement faire grand bruit. Ce jour-là, Olivier Hoarau fait voter son conseil municipal sur l’octroi d’une majoration indemnitaire de fonction pour lui-même et ses adjoints. La majorité vote en bloc naturellement alors que l'opposition vote contre. Tout ce qu'il y a de plus classique à ce stade.
A peine votée, la décision est remise en cause par le préfet, plus exactement par son service du contrôle de la légalité. Le préfet est dans son bon droit puisque l’article L. 2123-22 5° du Code général des collectivités territoriales ne prévoit l’attribution de cette majoration que pour les communes bénéficiant de la DSUCS. Or, seules les villes de l'Hexagone peuvent en bénéficier, toujours selon ce même article du CGCT.
La DSUCS, un sigle barbare qui désigne la "dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale", est une dotation de l'Etat réservée aux communes en difficultés. Elle bénéficie aux villes dont les ressources ne permettent pas de couvrir l'ampleur des charges auxquelles elles sont confrontées. A ce titre, les villes de La Réunion remplissent tous les critères d'éligibilité sauf qu'elles ont le malheur de ne pas se trouver sur le continent...
C’est donc fort logiquement que le préfet de La Réunion a contesté, le 11 septembre 2020, la légalité de la délibération portoise devant le tribunal administratif.
Le principe d'égalité mis à mal par cette discrimination ne devrait pas échapper au CC
Dans son argumentaire, l’autorité préfectorale estimait que la commune du Port ne pouvait se prévaloir de l’article L. 2123-22 5° du CGCT dans la mesure où les collectivités d’outre-mer bénéficient d’une dotation d’aménagement spécifique, à savoir la DACOM, la dotation d'aménagement des communes d'outre-mer.
Mais la commune du Port n’en démord pas et confirme qu’elle est bien bénéficiaire de la DSUCS au travers de la DACOM puisque cette dotation est composée d’une quote-part relative à la Dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale. En 2017 par exemple, la commune a bénéficié de 2,4 millions d’euros de DSUCS elle-même inscrite dans un montant total de 3 millions d’euros de... DACOM.
A ce jour, le juge des référés du tribunal administratif de La Réunion a suspendu l’exécution de la fameuse délibération dans l’attente d’une décision sur le fond. Une fenêtre procédurale chronophage a en effet été ouverte par la Ville du Port. Mais elle pourrait s’avérer payante, et pas que pour les seuls élus du Port. L'avocat de la mairie, Me Eric Dugoujon, a soulevé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) pour faire la lumière sur cette divergence de lecture.
Les premiers pas du conseil juridique sont encourageants. Estimant la demande fondée, le tribunal administratif de La Réunion l’a transmise au Conseil d’Etat. Et les magistrats de la plus haute juridiction de l’ordre administratif français ont considéré à leur tour, dans un arrêt du 26 juillet, que la question était sérieuse et ont donc décidé de la transmettre au Conseil constitutionnel.
Il reviendra aux Sages de dire si l’article L. 2123-22 5° du CGCT est oui ou non conforme à la Constitution. De l’avis des juristes, il ne fait guère de doute que la QPC de la ville du Port devrait faire mouche.
Si Le Port obtient gain de cause, ce sont toutes les communes des DOM qui pourraient suivre
Ainsi selon Me Eric Dugoujon, avocat de la commune de l’ouest, les dispositions de l’alinéa 5 de l’article L.2123-22 du Code Général des Collectivités Territoriales "portent atteinte au principe d’égalité". Elles établissent même "une discrimination directe entre les élus des collectivités de métropole et les élus des collectivités d’outre-mer. En considérant que les collectivités d’outre-mer ne perçoivent pas la DSUCS au motif qu’elles perçoivent la DACOM, dont l’enveloppe provient pourtant d’une partie de celle de la DSUCS, les élus de l’outre-mer se trouvent ipso facto privés d’un avantage financier alors que la réalité locale à laquelle ils sont confrontés dans l’exercice de leurs fonctions justifie l’octroi d’une majoration de leurs indemnités", fait-il remarquer.
De l'avis de l'avocat dionysien qui intervient habituellement en droit public, il n’existe aucune raison objective de priver les élus ultra-marins d’une majoration de leurs indemnités de fonction. Une lecture appuyée par d'autres juristes observateurs.
L’avis du Conseil constitutionnel devrait être connu d’ici la fin de l’année. Avec lui, ce sont 107 conseils municipaux d’autant de communes des cinq départements d’Outre-mer qui attendent de savoir si elles peuvent elles aussi majorer les indemnités de fonction de leur maire et adjoints.
A peine votée, la décision est remise en cause par le préfet, plus exactement par son service du contrôle de la légalité. Le préfet est dans son bon droit puisque l’article L. 2123-22 5° du Code général des collectivités territoriales ne prévoit l’attribution de cette majoration que pour les communes bénéficiant de la DSUCS. Or, seules les villes de l'Hexagone peuvent en bénéficier, toujours selon ce même article du CGCT.
La DSUCS, un sigle barbare qui désigne la "dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale", est une dotation de l'Etat réservée aux communes en difficultés. Elle bénéficie aux villes dont les ressources ne permettent pas de couvrir l'ampleur des charges auxquelles elles sont confrontées. A ce titre, les villes de La Réunion remplissent tous les critères d'éligibilité sauf qu'elles ont le malheur de ne pas se trouver sur le continent...
C’est donc fort logiquement que le préfet de La Réunion a contesté, le 11 septembre 2020, la légalité de la délibération portoise devant le tribunal administratif.
Le principe d'égalité mis à mal par cette discrimination ne devrait pas échapper au CC
Dans son argumentaire, l’autorité préfectorale estimait que la commune du Port ne pouvait se prévaloir de l’article L. 2123-22 5° du CGCT dans la mesure où les collectivités d’outre-mer bénéficient d’une dotation d’aménagement spécifique, à savoir la DACOM, la dotation d'aménagement des communes d'outre-mer.
Mais la commune du Port n’en démord pas et confirme qu’elle est bien bénéficiaire de la DSUCS au travers de la DACOM puisque cette dotation est composée d’une quote-part relative à la Dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale. En 2017 par exemple, la commune a bénéficié de 2,4 millions d’euros de DSUCS elle-même inscrite dans un montant total de 3 millions d’euros de... DACOM.
A ce jour, le juge des référés du tribunal administratif de La Réunion a suspendu l’exécution de la fameuse délibération dans l’attente d’une décision sur le fond. Une fenêtre procédurale chronophage a en effet été ouverte par la Ville du Port. Mais elle pourrait s’avérer payante, et pas que pour les seuls élus du Port. L'avocat de la mairie, Me Eric Dugoujon, a soulevé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) pour faire la lumière sur cette divergence de lecture.
Les premiers pas du conseil juridique sont encourageants. Estimant la demande fondée, le tribunal administratif de La Réunion l’a transmise au Conseil d’Etat. Et les magistrats de la plus haute juridiction de l’ordre administratif français ont considéré à leur tour, dans un arrêt du 26 juillet, que la question était sérieuse et ont donc décidé de la transmettre au Conseil constitutionnel.
Il reviendra aux Sages de dire si l’article L. 2123-22 5° du CGCT est oui ou non conforme à la Constitution. De l’avis des juristes, il ne fait guère de doute que la QPC de la ville du Port devrait faire mouche.
Si Le Port obtient gain de cause, ce sont toutes les communes des DOM qui pourraient suivre
Ainsi selon Me Eric Dugoujon, avocat de la commune de l’ouest, les dispositions de l’alinéa 5 de l’article L.2123-22 du Code Général des Collectivités Territoriales "portent atteinte au principe d’égalité". Elles établissent même "une discrimination directe entre les élus des collectivités de métropole et les élus des collectivités d’outre-mer. En considérant que les collectivités d’outre-mer ne perçoivent pas la DSUCS au motif qu’elles perçoivent la DACOM, dont l’enveloppe provient pourtant d’une partie de celle de la DSUCS, les élus de l’outre-mer se trouvent ipso facto privés d’un avantage financier alors que la réalité locale à laquelle ils sont confrontés dans l’exercice de leurs fonctions justifie l’octroi d’une majoration de leurs indemnités", fait-il remarquer.
De l'avis de l'avocat dionysien qui intervient habituellement en droit public, il n’existe aucune raison objective de priver les élus ultra-marins d’une majoration de leurs indemnités de fonction. Une lecture appuyée par d'autres juristes observateurs.
L’avis du Conseil constitutionnel devrait être connu d’ici la fin de l’année. Avec lui, ce sont 107 conseils municipaux d’autant de communes des cinq départements d’Outre-mer qui attendent de savoir si elles peuvent elles aussi majorer les indemnités de fonction de leur maire et adjoints.
Le 2 juin 2020, le tout nouveau conseil municipal mettait au vote l'affaire 35, celle de la majoration des indemnités de fonction :
Si le Conseil constitutionnel venait à donner raison à la Ville du Port, le maire obtiendrait exactement 126,39 euros de majoration à son indemnité actuelle de 3500 euros.
Pour ses adjoints, ce serait 47,30 euros à ajouter aux 1283 euros prévus là aussi par le CGCT en fonction de la strate démographique.
Autre exemple possible, celui des villes composées de plus de 100.000 habitants, comme Saint-Denis ou Saint-Paul. Leurs maires respectifs pourraient prétendre à une majoration de 103 euros et leurs adjoints à 35 euros.
Dans certaines conditions d’éligibilité comme celles de communes classées stations de tourisme ou ayant enregistré une augmentation de leur population suite à des travaux d’électrification, les majorations d'indemnités de fonction résultant de l'application de l'article L. 2123-22 peuvent même s'élever au maximum à 25% pour celles dont la population totale est supérieure à 5000 habitants, autrement dit la totalité des communes de l’île. Mais il revient à chaque majorité de déterminer jusqu'à quel taux elle souhaite moduler cette enveloppe qui lui est offerte.
Pour ses adjoints, ce serait 47,30 euros à ajouter aux 1283 euros prévus là aussi par le CGCT en fonction de la strate démographique.
Autre exemple possible, celui des villes composées de plus de 100.000 habitants, comme Saint-Denis ou Saint-Paul. Leurs maires respectifs pourraient prétendre à une majoration de 103 euros et leurs adjoints à 35 euros.
Dans certaines conditions d’éligibilité comme celles de communes classées stations de tourisme ou ayant enregistré une augmentation de leur population suite à des travaux d’électrification, les majorations d'indemnités de fonction résultant de l'application de l'article L. 2123-22 peuvent même s'élever au maximum à 25% pour celles dont la population totale est supérieure à 5000 habitants, autrement dit la totalité des communes de l’île. Mais il revient à chaque majorité de déterminer jusqu'à quel taux elle souhaite moduler cette enveloppe qui lui est offerte.