Agir en responsabilité sans attendre des pouvoirs publics. C’est en respectant cette devise que l’entreprise Nous La Terre a été créée voilà bientôt trois ans. Depuis, celle-ci étend son réseau à nombre de crèches qui souhaitent s’inscrirent dans une démarche écologique. Du sol au plafond mais toujours en fonction du volontarisme et des possibilités financières de la structure.
Nous La Terre est née de l’imagination d’une saint-leusienne, Catherine Vachon, au moment de la naissance de son enfant. A l’époque, il n’est plus question pour elle, en l’état des connaissances scientifiques, de laisser son enfant subir les pollutions de son quotidien. « A partir de ce moment, toutes mes décisions sont passées au filtre écologique » aime-t-elle à exemplifier.
« La venue de mon enfant m’a immergée dans le monde de la petite enfance, et en particulier les crèches et microcrèches ». Une immersion qui lui révèle le travail « extraordinaire mais trop peu reconnu, précaire, essentiellement porté par des femmes. Des femmes qui ont entre leurs mains nos enfants une bonne partie de la journée ». C’est donc vers elles, et vers ces structures dédiées à la petite enfance que toute son énergie sera désormais tournée. Son entreprise sera la première et toujours seule du genre à La Réunion.
« Je me suis rendue compte qu’elles avaient conscience de la nécessité de bien faire, mais manquaient de temps et d’informations pour modifier leurs gestes quotidiens ». Attention, on ne badine pas avec de tels chiffres : un enfant c’est en moyenne l’assurance d’une utilisation de couches jetables pendant 2 ans et demi. Cela représente environ 4500 couches sur cette période, soit une tonne de déchets au bout. « Vous multipliez ces chiffres par les quelques 40 000 enfants de 0 à 2 ans que compte notre île… » s’alarme-t-elle.
Des couches jetables à la composition affolante
Face à ce constat, Catherine Vachon a tenté de trouver la parade. Comme tout produit écologique qui lutte contre les habitudes établies de « acheter pour jeter », Nous La Terre n’a eu de cesse de mettre en avant les bénéfices de la couche lavable. « Une vingtaine de couches seulement suffisent pendant ces deux ans ». Le calcul est vite fait. Et là, il n’est pas uniquement question de parler écologie, mais aussi de confort qui touche à la santé de bébé.
Les couches jetables sont composées de substances toxiques. Pêle-mêle, la maman chef d’entreprise liste le chlore utilisé pour blanchir les couches et cancérigène selon l’OMS, les composés organiques volatiles comme le toluène, les parfums de synthèse ou encore le polyacrylate de sodium, un absorbant très puissant qui crée l’effet « au sec » mais soupçonné d’assécher la peau et de provoquer de graves allergies et des érythèmes (rougeur de la peau).
De plus, le côté hermétique et super protecteur des couches jetables en fait aussi un de ses points faibles : véritables sacs plastiques, elles font monter la température dans la couche et pourraient avoir des implications dans la baisse de fertilité masculine.
De son côté, la couche lavable « ne contient aucun produit de synthèse, vous protégez donc votre enfant d’une exposition chimique ». Elle peut être lavée 300 fois. Bien que son coût unitaire (environ 25 euros la couche) soit plus important, un lot de 20 (soit 500 euros) est suffisant pour un enfant jusqu’à 2 ans et demi. On s’y retrouve face aux jetables (40 centimes la couche x 4500 = 1800 euros).
Démarche globale ou partielle
Nous La Terre apporte son expertise lorsqu’une crèche souhaite se « convertir » à ces gestes. Le mot est sans doute un peu fort. « Je n’incite pas mes interlocuteurs à adopter de telles pratiques, mais je les guide. Cette démarche doit avant tout être voulue par la structure » car selon Catherine Vachon, les gestes écologiques imposés ne sont pas ceux qui portent les meilleurs fruits. « Il faut que du responsable aux employés, tout le monde soit convaincu ». C’est comme cela qu’elle conçoit l’écologie : « comme une volonté propre, une prise de conscience et non le résultat d’une incitation pécuniaire. »
L’impact écologique des couches n’est qu’un volet d’une démarche globale. De l’effort de tri sélectif, du revêtement des sols en passant par la peinture ou encore la mise à disposition de jouets plus respectueux, tout peut être étudié. « Il y a des crèches qui ne pourront appliquer qu’une partie du projet, d’autres qui respecteront les démarches écologiques complètement », tout dépend de la volonté et des capacités financières de la structure.
Anecdote mise à part, la chef d’entreprise avoue que les démarches vertueuses ne sont, la plupart du temps, pas à mettre au crédit des collectivités et de leurs crèches municipales. Bien au contraire, ce sont les crèches privées qui offrent une réceptivité et une adaptabilité plus rapide. Sans doute que l’attente des parents sur ces questions se font de plus en plus pressantes. « Le changement est très lent » reconnaît Catherine Vachon, « mais c’est pareil en métropole ». En France, toujours pas de pétrole mais des idées… et loin d’être jetables celles-là.
[www.nouslaterre.re]urlblank:http://www.nouslaterre.re/