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Le proxénète se faisait payer en espèces… et en nature. L’un des policiers relaxé

Salim Rangila aura quatre longues années pour méditer, à l’ombre, sur l’ingratitude du genre humain. Lâché par tous, y compris son fils, il reste pour le tribunal ‘le’ grand responsable de cette affaire de proxénétisme peu ordinaire. Un méli-mélo qui aura duré de 2014 à 2018, ruelle Pavé à Saint-Denis. « De linge z’Arabes seulement, M. […]

Ecrit par zinfos974 – le lundi 29 avril 2019 à 12H19

Salim Rangila aura quatre longues années pour méditer, à l’ombre, sur l’ingratitude du genre humain. Lâché par tous, y compris son fils, il reste pour le tribunal ‘le’ grand responsable de cette affaire de proxénétisme peu ordinaire. Un méli-mélo qui aura duré de 2014 à 2018, ruelle Pavé à Saint-Denis.

« De linge z’Arabes seulement, M. le président! »

La police n’a commencé à s’intéresser à ce curieux manège qu’en 2015 et il lui a fallu deux années avant de tirer les choses au clair. En bref, cette année-là, des habitants du quartier ruelle Pavé (entre le bas des rue Maréchal-Leclerc et Général-de-Gaulle) remarquent des allées et venues aussi fréquentes que tardives, qui intéressent deux immeubles de ce passage discret. Il va ressortir des écoutes, filatures et autres « planques » que de fort attirantes jeunes femmes, très dévêtues, reçoivent là une clientèle qui aurait plutôt tendance à raser les murs.

Les immeubles appartiennent à Salim Rangila, commerçant très peu honorablement connu de la Rue-Grand-Chemin, autrefois spécialisé dans babioles et fanfreluches en vrac, reconverti dans les vêtements « pou Z’Arabes seulement, monsieur le Président ».

Il ressort des différents témoignages puis des auditions des suspectes, que le petit commerce était gentiment organisé par deux jeunes Malgaches, Tina Power et Natacha, et occupait le plus clair du temps de 7 à 8 jeunes femmes venues de la Grande-Île. Le nombre exact reste flou mais quand on aime, pas vrai… ?

Les deux organisatrices ne font aucune difficulté pour reconnaître que si elles « organisaient » effectivement les ballets doux de leurs compatriotes, elles payaient aussi de leur personne, comme tout le monde.

Natacha: « Je travaillais beaucoup. Souvent jusqu’à deux heures du matin ». Elle ne nie même pas percevoir en même temps les allocations CAF, le RSA ainsi qu’une maigre pension de son ex.
Chez elle, on a retrouvé une foule de reçus de mandats Western Union : la majeure partie de ses bénéfices nourrissait sa nombreuse famille restée au pays. Ce qui est le cas, apprenons-nous, de la quasi-totalité des prostituées originaires de l’Île-Rouge.

Le stakhanovisme revu façon maison close

Aujourd’hui, Natacha s’est reconvertie dans l’artisanat d’art car manifestement lassée de payer de son corps mais aussi tombée gravement malade en raison de ses activités physiques. Pensez donc: « 40 euros pour une passe simple en parking, 50 la turlutte sinon 200 une nuit entière ». San Antonio appelait ça « de l’abattage »: 4 à 5 michetons la nuit par professionnelle. Et on nous rebat les oreilles avec ce chômage qui empoisonne Macron!

Tina, qui s’exprime haut et clair, avoue d’emblée: e suis innocente… mais je me prostituais ». Pour elle, l’opportunité de cette « pension » était claire. « Avant, devant la Gare, je me faisais attaquer et assommer souvent. Je me suis dit que là au moins, j’allais être en sûreté ». Et à une question du Président, elle ajoute: « Toutes les filles ne travaillaient pas en même temps, bien sûr, car on n’avait que trois lits. Pendant qu’ils étaient occupés, les autres jouaient aux cartes, se racontaient des blagues. Chacune des autres filles casquait 10 euros par jour, pour le loyer! ». Le stakhanovisme, rien de tel pour le rendement!

La grande question a été de savoir si le propriétaire des lieux savait ce que faisaient ses loueuses. Lui prétend que non: il n’a jamais voulu que toucher un loyer. Et puis, aussi, cet homme, né en Grande-Bretagne, a un argument qu’il juge imparable: « Je ne savais pas qu’en France, il est défendu de louer à des prostituées ». Ben voyons. Le drame de ce pauvre homme, c’est que Tina et Natacha disent tout le contraire.

« Même que » dira l’une des deux coquines « même qu’il nous demandait régulièrement des faveurs gratuites, une pipe ou un rapport complet selon son humeur. Pourquoi pas un pourboire, tant qu’on y est? Il n’y a pas de petits bénéfices ».

Casier judiciaire chargé à ras bord

« Il encaissait le loyer, 880 euros, avec une pénalité de 20 euros par jour de retard, avec de petits coups supplémentaires assez souvent ».

Ce qui fut l’occasion pour le Président Molié de sortir une de ces tirades dont il garde jalousement le secret: « Cette prestation n’était pas écrite dans le bail. Un contrat oral sans doute? » Il n’a pas dit « buccal’ par pure décence.

Shoyeb, fils du commerçant, n’y va pas par quatre chemins, avouant de but en blanc: « Je suis partagé entre colère et tristesse! Mon père nous avait donné ces deux immeubles, à ma soeur et moi, en 2017. Sans jamais nous dire ce qui s’y passait. Mais il continuait à percevoir les loyers », ce que confirment les deux filles concernées. Il a bien tenté de rompre le bail mais trop d’obstacles, notamment la saison cyclonique, l’en ont empêché.

Le papa, d’emblée, admet sa culpabilité, ce qui ne laisse pas de surprendre: lorsque des voisins se sont plaints, il les a carrément expédiés sur les roses: « Je fais ce que je veux de mon appartement! »

Et pour les « prestations gratuites »? C’est rien que des mensonges, vous pensez bien. Lui, obsédé? Faut croire… parce que son CV porte un bon nombre de condamnations, deux pour agressions sexuelles, une pour exhibition, plus diverses escroqueries, subornations de témoins et autres histoires de faux passeports. Et on va l’accuser, lui? Est-ce que ce monde est sérieux?

Un client embarrassant

L’homme ne sait plus que répondre lorsqu’on lui fait remarquer que c’est un cadeau salement empoisonné qu’il a fait à son fils.

Yann T… apparaît alors dans le réseau. Policier de son état, il présente des états de service remarquables mais voilà, Ève lui donna la pomme à croquer… Dans la seconde maison de Rangila officie une jeune femme qui, apparemment, a trop de clients aux dires des filles d’à côté.  Concurrence inadmissible. Natacha s’en plaint à Yann qui y va de ses imprécations, menaçant la redoutable concurrente de lui retirer ses enfants et l’expédier dare-dare au gnouf. Gagné. À la barre, il dit que c’est grâce aux renseignements de Natacha qu’il a fait arrêter quelques voyous de bas étage. Main droite/main gauche…

Un autre policier, Sully E…, commandant à la retraite, n’aurait quant à lui pas été avare de ses conseils à Tina pour débrouiller ses petites affaires. Mal défini, tout ça.

Parlant de Salim Rangila, Me Girard dira: « Il a sans doute fait un cadeau empoisonné à son fils ; mais comme client, ce n’est pas un cadeau non plus ». Comme tous ses confrères, il a tenté l’impossible, en vain. Le seul qui tire son épingle du jeu est le sudiste bâtonnier Djalil Gangate. Au risque de me répéter, je dirai qu’il est de la race des ténors obstinés. Précis voire pinailleur, il ne laisse rien passer, réussissant même à faire éclater de rire les juges et le parquet. Grâce à quoi son client, le fils Rangila, ressort relaxé. Chapeau, cher Maître. 

Rangila père : 4 ans ferme et réquisition des immeubles.
Les deux copines : 12 mois avec sursis.
Yann T… : Ce policier a été relaxé pour les faits de proxénétisme. Il a été condamné à 6 mois avec sursis pour usage de sa carte professionnelle à mauvais escient (Note de la rédaction : contrairement aux 12 mois avec sursis que nous avons mentionnés par erreur dans la première version de l’article, et qui concernaient l’autre policier ci-après).
Sully E… : 12 mois avec sursis pour « aide, assistance ou protection de la prostitution d’autrui » (NDLR : contrairement aux 6 mois avec sursis que nous avons mentionnés par erreur, en raison d’un quiproquo avec le premier policier, dans la première version de l’article).

 

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