

Aujourd'hui, cela fait un an jour pour jour que l'agent de police, Aurélie Fouquet, a été abattue dans le cadre de l'exercice de ses fonctions. Un grand nombre de policiers municipaux lui rendent hommage en arborant un bandeau noir au niveau de l'écusson d'épaule. Un an après, encore bien des dysfonctionnements existent au sein de la police municipale, et notre Département n'est pas épargné.
Jean-Louis Del Pistoia, le délégué départemental de l'Union syndicale professionnelle des policiers municipaux à la Réunion, en a des dossiers. Manque d'effectif, non respect des heures de travail, hygiène à l'intérieur des services… le représentant syndical ne cesse d'alerter. "Les policiers municipaux ont de plus en plus de prérogatives, mais des moyens insuffisants", résume-t-il. Il existe environ 180 policiers municipaux sur l'île, une moyenne de 8 à 10 agents par commune, à l'exception du Port qui a fait le choix de ne pas avoir de police municipale.
Des missions de police ou électoralistes?
Ces agents publics ont parfois du mal à trouver leur place. "Ils ont une certaine pression du fait de leur dépendance aux maires", explique le délégué. Le maire, en France, est chargé d'importants pouvoirs de police administrative, au sens de l'article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales (CGCT), comme la responsabilité d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique. Du coup, il arrive que le policier municipal soit utilisé à toutes fins... En d'autres termes, des missions de police aux missions électoralistes, il n'y a qu'un pas à franchir. "Selon les désirs du maire, on fait plus d'épaves, ou moins de stationnement", explique Jean-Louis Del Pistoia qui constate une recrudescence des agents qui se syndiquent. En découle une perception erronée de la population "qui nous voit comme une police politique. Donc quand le maire change, on change aussi. On est la police d'untel puis demain on nous reproche d'être la police du nouveau…", regrette Jean-Louis Del Pistoia.
En 1999, lorsque les missions et statuts des policiers municipaux ont été redéfinis, on aurait pu imaginer qu'il y aurait une meilleure harmonie entre les polices municipales. Mais la polémique n'a fait que commencer concernant les tenues, les fonctions, l'armement… "A la Réunion, selon les communes, certains sont suréquipés quand d'autres ne sont armés que de leur stylo ! Déjà que les salaires varient d'une commune à l'autre…"
Autre illustration éloquente, le choix des véhicules. Le parc français est très hétérogène et varie d'une ville à l'autre, car il se fait par appel d'offre municipal. On peut ainsi trouver des monospaces, des berlines, des citadines, des motos... Seule la sérigraphie des véhicules est similaire dans toutes les villes.
Pas de délégation sans arrêté municipal
Et alors que chaque police municipale peut ainsi avoir ses propres codes, les textes censés loger tout le monde à la même enseigne ne sont, pour ainsi dire, pas appliqués ou pas entièrement. A titre d'exemple, "au sein de la police municipale, il n'existe pas de délégation de pouvoir, sauf par le biais d'un arrêté municipal. Or, beaucoup de directeurs généraux des services prennent des responsabilités qui ne font pas partie de leurs prérogatives. Le maire se décharge ainsi, mais cela n'est pas prévu dans les textes", dénonce Jean-Louis Del Pistoia.
Autre dérive, "l'ASVP (Agent de Surveillance de la Voie Publique, assermenté par le Procureur pour certaines infractions) n'est pas habilité à intervenir sur ce qui touche au code de la route. Or, parfois, ils sont utilisés comme policier municipal pour les sorties d'école. Mais cela est dangereux car leur responsabilité est engagée !", prévient le représentant syndical.
Dans le registre de la sécurité toujours, "deux civils d'un garage ont un jour récupéré un véhicule sérigraphié et ont traversé trois communes. Trois erreurs : le maire n'était pas au courant, ils s'agissait de civils au volant et ils ont traversé trois communes d'affilée, ce qui est totalement interdit. Imaginez qu'ils tombent pendant leur trajet sur un casse… Il auraient fui? Comment auraient-ils pu réagir s'ils avaient été pris à partie? Qui est alors responsable?", imagine le policier municipal.
Pour conclure, Jean-Louis Del Pistoia regrette que le policier municipal "ne soit pas vraiment un policier aujourd'hui".